Après son inscription au patrimoine de l'Unesco en décembre 2023, l'heure est à la reprise des transhumances. Dans les Pyrénées ariégeoises, des chevaux de Merens ont pris le chemin de leur estive avec des cavaliers amateurs, avides de connaître ce moment.
Un concert de cloches accompagne leur moindre pas. "Doucement, les loulous..." Éleveur de chevaux de Merens en Ariège, Jean-Louis Savignol mène ses bêtes vers l'estive. Direction, l'étang de Lers à 1260 mètres d'altitude. Une étape dans cette transhumance qui fait partie de la culture de l'élevage dans cette partie des Pyrénées.
"La transhumance, pour nous, cela a beaucoup de sens, nous raconte Jean-Louis Savignol. D'abord, parce que cela n'existait plus et cela a été recréé avec quatre agriculteurs, moutons et chevaux, en l'an 2000. Maintenant, on est plus de 100 éleveurs. Il y a plus de 25.000 têtes qui sont transhumées en Ariège sur les week-ends de juin."
"Les chevaux vont transformer la graisse de l'hiver en muscle"
Au-delà de l'aspect culturel et patrimonial, la transhumance de ses chevaux de Merens, présente plusieurs intérêts pour l'éleveur. "Le premier, c'est que les chevaux mangent l'herbe de la montagne qui est très riche, très azotée. Elle est très bonne pour leur alimentation", raconte Jean-Louis Savignol. Et pour manger, ces chevaux particulièrement robustes et taillés pour la montagne, vont être obligés de se déplacer.
"Ils vont devoir faire jusqu'à 1000 mètres de dénivelé. Ils bougent, donc ils se musclent. Ils transforment la graisse de l'hiver en muscle." Les chevaux en ressortiront encore plus magnifiques."Les chevaux ressortent luisants en octobre", affirme l'éleveur.
Autres avantages : les terres en bas peuvent être laissées au repos, cela permet aussi de faire du foin. "Et cela permet de montrer qu'il n'y a pas que de l'élevage intensif. Que l'on connaît nos bêtes et qu'on les amène à travers tout le département", rajoute l'éleveur qui est accompagné de cavaliers dans cette transhumance.
"Le vivre au moins une fois dans ma vie"
"La transhumance, c'est un état d'esprit d'élevage", nous dit Jean-Louis Savignol. Une pratique sur quatre générations. "Cette estive sur Massat existe depuis 75 ans. Cela fait partie de la culture. Et c'est pour cela qu'on ouvre cette transhumance aux cavaliers extérieurs."
Tout en guidant ses chevaux, Jean-Louis Savignol explique qu'une fois arrivés à l'étang de Lers, un campement va être établi et que les cavaliers vont être testés. "On va faire des essais avec les cavaliers car c'est une montée éthologique compliquée. Il faut qu'on leur donne les codes. Et on va faire un petit crash-test. Et s'ils n'ont pas les capacités à cheval, ils finissent en voiture parce que c'est trop dangereux. On a des zones où seul l'hélico peut nous sauver si on a un problème, donc il faut des cavaliers d'enfer."
Parmi ces cavaliers, Linda. Elle est venue de Tanzanie pour vivre ce moment. "J'ai vu dans un documentaire que la transhumance était inscrite au patrimoine de l'Unesco, nous explique-t-elle. Je voulais le vivre au moins une fois dans ma vie."
Pour ce week-end de transhumance participative, Jean-Louis et ses cavaliers emmèneront les chevaux de Merens à travers la montagne, mais aussi sur des chemins et des routes pour des étapes dans des villages et ville de Saint-Girons.
(Propos recueillis par Jean Colonna et Pascal Dussol)