Cueillette des champignons : comment éviter le crime et l'intoxication ?

La cueillette des champignons a débuté en Occitanie. Si elle est tardive en raison des conditions météo, elle peut s'avérer prolixe. Petit guide avec l'association mycologique de Toulouse pour éviter de s'intoxiquer en confondant les comestibles avec leurs faux-frères.

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Toxique ou comestible ? C'est une vraie question pour les cueilleurs de champignons, même les plus aguerris. Pour en savoir plus, nous avons mis nos pas dans ceux de spécialistes de l'association mycologique de Toulouse. Bottes au pied, nous vous proposons une balade dans les bois de feuillus et les bois mêlés des contreforts des Pyrénées (dont on taira le nom pour ne pas contrevenir à la tradition !). 

Première constatation : la récolte a effectivement commencé même si la saison ouvre tardivement. En témoignent, le nombre de voitures garées aux endroits réputés et la présence de promeneurs agitant leurs sacs plastiques avec une discrétion toute relative.

Halte aux sacs plastiques

"Ça, c'est la première erreur, note Marianna Muneretto, membre de l'association. Il faut proscrire les sacs plastiques et leur préférer un panier. Au bout d'une heure de contact avec le plastique, les champignons deviennent impropres à la consommation. Si on n'a vraiment rien d'autre, on peut tapisser son sac de fougères". 

Et aussi, ajoute-t-elle, pour l'avoir déjà vu faire, "éviter de laisser les champignons dans une voiture stationnée en plein soleil"... Dans un cas comme dans l'autre, quelle que soit la qualité du champignon ramassé, l'intoxication n'est pas loin.

Un temps capricieux

Une fois le parking derrière nous, la "chasse" est ouverte. Il faut avoir le coup d'oeil et choisir son angle de vue... Le champignon dévoile davantage sa silhouette à la montée qu'à la descente. Peu de succès dans les premiers mètres. Forcément, tout le monde est déjà passé par là. Il ne faut donc pas hésiter à s'enfoncer dans les bois.  

Mais dans un premier temps, la récolte n'est pas fameuse. En cause, la météo explique Marianna. "Il faut qu'il y ait du chaud, pas trop longtemps, de la pluie, du froid. Un mélange donc. Or, on n'a pas eu assez de soleil ces derniers jours", estime-t-elle.

Cèpes versus amanites

Mais au bout d'une longue approche dans les fougères et les feuilles mortes, différents spécimens commencent à apparaître.

Toute l'équipe s'accorde sur le fait que pour faire une bonne récolte, mieux vaut observer attentivement les caractéristiques botaniques de la trouvaille afin de l'identifier à coup sûr. Objectif : éviter les intoxications qui peuvent être graves. 

Différencier les principales espèces comestibles et toxiques s'avère un bon début. Cèpes et girolles font partie des plus prisés à cette époque de l'année pour leur saveur odorantes en omelettes ou en fricassées. 

Combien existe-t-il de types de cèpes ? Cèpes qu'on nomme aussi bolets, c'est identique. Ils sont au nombre de quatre : boletus aereus (cèpe bronzé), boletus aestivalis (cèpe d'été), boletus edulis (cèpe de Bordeaux), boletus pinophilus (cèpe des pins). On apprend que la couleur de leur chapeau va du brun sombre au brun noirâtre, en passant par le café au lait ou le rouge acajou.

On ne connaît un champignon que si on connaît son cousin germain qui est toxico-mortel.

Marianna Muneretto, association mycologique de Toulouse

C'est à ce moment que l'atmosphère de balade bon enfant dominicale bascule en polar homicide. Et ce petit frisson n'est pas pour nous déplaire.

Mais allons-y progressivement et commençons par le membre de la famille le moins rcommandable : le bolet à beau pied ou à pied rouge (entièrement couvert de fines ponctuations rouge vif persistentes sans aucun réseau). Il se repère aisément donc à la couleur de son pied. S'il est comestible, il faut néanmoins le faire cuire longuement, au moins 20 minutes pour éviter tout problème digestif. Il est toxique cru.
Le vrai cèpe à droite sur la photo. (Faire glisser la poignée pour voir appraître l'intégralité de la photo).

Les cèpes comestibles ont en commun un hyménium tapissé de pores blanchâtres chez les jeunes, puis jaune olivâtre, enfin verdâtres à maturité. Ils présentent une chair blanche, non bleuissante. On trouve le boletus aereus, ou cèpe bronzé, sous les chênes. Il se distingue par son chapeau brun sombre à noirâtre.

Le boletus aestivalis ou cèpe d'été présente un chapeau café au lait à brun. Le troisième, le plus commun est le cèpe de Bordeaux, boletus edulis. Il se reconnaît à son chapeau brun. Enfin, le cèpe des pins ou boletus pinophilus se caractérise par un chapeau brun rouge à acajou (chapeau  ridé ou cérébriforme).

Ces cèpes comestibles, notamment le cèpe des pins, ne doivent pas être confondus avec le groupe des bolets de Satan ou bolet à pores rouges. 
 

Ce groupe se singularise par un chapeau pâle, grisâtre ou café au lait, parfois teinté rosâtre, un hyménium tapissé de pores jaune orangé à rouge, et un pied souvent teinté de rosâtre ou de rouge.

Pour l'identifier, un indice imparable : avoir de bons livres récents. Certes quand on coupe sa chair, elle devient instantanément bleue mais cela ne constitue pas une preuve de toxicité.

Amanites tueuses

Mais il y a pire. En faux amis du cèpe, les amanites tiennent le haut du panier. "Dans notre région, on peut répertorier  les plus fréquentes : l'amanita phalloïdes (amanite phalloide ou ciguë verte), l’amanita verna (printanière), l’amanita  virosa (amanite vireuse). Dans la liste des amanites mortelles, plusieurs sont toxiques. Leur ingestion provoque des conséquences désastreuses  pour l’organisme : l’amanita  pantherina (amanite panthère), l’amanita muscaria (amanite tue-mouches, fausse oronge), l’amanita proxima (amanite blanche à volve rousse)", met en garde Marianna Muneretto.  

L'amanite phalloïde a un chapeau dans les tons verdâtres, un vert délavé avec parfois quelques teintes jaunes, une volve en sac et un anneau. Très répandue, elle tue chaque année... très lentement !

L'amanite tue mouche est sans doute la plus spectaculaire par sa beauté, avec cette couleur rouge vif et ces élégants points blancs (photo de droite). Mais elle est aussi dangereuse. 

Autre toxique patentée, l'amanite panthère. Elle est repérable à son chapeau marron, plus ou moins foncé, sur lequel on trouve des flocons et des marges striées, pied avec anneau et base du pied avec un bulbe surmonté d’un bourrelet net, lui-même surmonté de un à deux autres bourrelets. Elle provoque une intoxication où dominent les signes neuropsychiques. Elle est plus toxique que l'amanite tue-mouches qui donne une intoxication du même type mais sans convulsion.

Leurs points communs : le dessous du chapeau est formé de lamelles blanches, le pied porte un anneau, la base du pied est bulbeuse.

Dans les amanites que l'on croise et que l'on peut consommer bien cuites, on peut citer aussi la golmotte ou amanite rougissante. Elle présente un pied bulbeux (en oignon) sans volve, des lamelles, un anneau strié et des écailles brunâtres sur le chapeau et une chair rougissante.

Girolles, chanterelles et consort

La girolle se caractérise surtout par son hyménium muni de plis ou de veines (et non de véritables lames). Elle affiche une couleur jaune vif caractéristique, comme on le voit sur la publication ci-dessous.

Elle a aussi de faux amis. L’omphalotus olearius (faux-clitocybe lumineux, pleurote de l’olivier) ou encore l’omphalotus olearius var. illudens (clitocybe illusoire) pousse en touffe autour des souches de feuillus, comme les chênes.

Quand il est jeune, ce champignon présente un chapeau semblable à celui de la girolle. Il a la même couleur mais on le distingue car il a des lames et non des plis. Confusion aussi avec l’hygrophoropsis aurantiaca (fausse-girolle)  sans intérêt gustatif.

Le meunier et son âme damnée

Le meunier ou clitocybe blanc mérite toute notre attention. D'une part parce qu'il est appelé la "sentinelle du cèpe" et d'autre part, parce qu'on peut le consommer. Mais il faut là aussi être très vigilant car il a un faux ami éminemment toxique, le clitopile blanc.

Le meunier à droite et le clitophile blanc à gauche de la photo.

Le meunier a un chapeau gluant, des lames décurantes qui descendent le long du pied. Il s'effrite facilement comparé au clitopile dont la chair est plus résistante et fibreuse, elle s'effiloche. Le meunier dégage une odeur très distincte de farine. Mais attention, son ami toxique également. 

Autre cousin peu recommandable, l'entolome livide. Il a la même silhouette mais les lames sous le chapeau son jaunâtres. Il n'est conseillé pas de le consommer.

Humilité en toute occasion

La liste des faux amis est loin d'être exhaustive. D'où cet impératif : être humble en toute occasion. Mieux vaut avoir avec soi un guide digne de ce nom. Nos accompagnateurs s'accordent à dire que le "Guide des champignons France et Europe" de Guillaume Eyssatier et Pierre Roux est de loin le plus complet et le plus explicite.

Néanmoins quand on ne connaît pas, un guide ou internet ne suffisent pas. Il faut se rapprocher d’une société mycologique ou d’un pharmacien. Dans le doute, on laisse le champignon, quel qu'il soit, comestible ou non, à sa place, le chapeau tourné vers le bas, afin que la dispersion des spores puissent se faire et la reproduction s'accomplir. 

Dernier conseil : nettoyer la récolte aussitôt et la consommer rapidement, en quantité raisonnable. Même les champignons comestibles, que l'on mange tous les jours et en grande quantité, peuvent devenir toxiques.

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