Elle comparaît depuis hier devant la Cour d'Assises du Gard pour avoir tué son père, Basile Miguel Gabarri. L'homme, alcoolique et violent, avait reçu une balle dans la nuque en avril 2016 à Beaucaire
Dix ans de réclusion criminelle ont été requis par l'avocat général à l'encontre de Carmen Bois, jugée depuis hier par la cour d'Assises du Gard.
La jeune femme aujourd'hui âgée de 23 ans a tué son père, un quadragénaire de culture gitane, le 1 er avril 2016 à Beaucaire. Le drame est survenu après une énième scène de violence familiale et parce qu'elle s'était adressée la veille à son frère en Français.
Tyran domestique ou père modèle
Tyran domestique, violent et menaçant, ou travailleur irréprochable faisant tout pour les siens ? Devant la cour d'assises, deux familles - celle du père tué etcelle de sa femme - qui ne se sont jamais acceptées et deux thèses s'affrontent depuis lundi autour de la personnalité du chef de chantier de 41 ans, un gitan d'origine espagnole.
La jeune femme, qui encourait la réclusion criminelle à perpétuité, "a commis un crime émotionnel" pour "libérer sa famille", a estimé l'avocat général Alexandre Rossi, assurant que "l'intention homicide" était caractérisée et que Carmen, qui affirme n'avoir pas voulu tuer et n'avoir pas su que l'arme était létale, a "menti".
Carmen n'a pas "tiré en l'air" mais "dans la tête de son père qui était assis,de dos, seul et sans défense", a-t-il souligné.
Une famille sous la menace
L'avocat général n'a pas nié "le contexte" de violences mais a estimé que le père
aurait dû être jugé pour ces faits et non "exécuté". Il a refusé que l'on "noircisse"
la victime pour "sauver Carmen", y compris avec des "clichés nauséabonds" visantles gitans.
M. Rossi a requis une peine complémentaire d'interdiction de séjour dans le Gard,les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse, parlant de "mesure de sûreté" alors que Carmen a dû être transférée de la prison de Nîmes à Saint-Étienne et sa mère et ses cinq frères et soeurs ont du quitter Beaucaire après des "menaces".
"Il ne parle pas, il insulte et puis il tape"
"Je ne veux pas que ce soit un procès caricature", a martelé l'avocat général, parlant en toile de fond d'une atmosphère de "règlements de compte entre les Montaiguet les Capulet" dès le soir du drame et tout au long du procès.
"Au début, il ne parle pas, après il insulte, puis il tape", avait décrit mardi matin Carmen, 22 ans, incapable de parler au passé d'un père qu'elle "aime encore".
Le 1er avril 2016, a-t-elle décrit, son père est énervé et met "une énorme gifle"à sa femme en fauteuil roulant, Emmanuelle, qui souffre d'une myopathie. Les enfants s'interposent.
Le père ordonne alors à Carmen d'aller chercher son pistolet et d'y mettre une balle. Alors qu'ils sont dans le salon, la jeune fille tire dans sa direction pour "le calmer". Touché à la nuque, le chef de chantier dans le bâtiment de 41 ans était mort presque immédiatement après.
"Si tu pars, je te mets une balle dans la tête..." ( Miguel Gabarri, la victime à son épouse)
D'une voix faible, entrecoupée de sanglots, sa mère, 43 ans, avait décrit lundi soir le calvaire vécu pendant une vingtaine d'années auprès de Miguel, dont elle était tombée "folle amoureuse" à 17 ans et avec qui elle a eu six enfants. "Si tu pars, je te mets une balle dans la tête, tu es à moi", la menaçait-il. Elle n'ose pas partir ou demander de l'aide par "peur des représailles".
"Ce meurtre, un complot" pour les proches du père tué
La famille Gabarri s'est, elle, inscrite radicalement en faux contre la description faite de la victime. Son père et ses frères décrivent un "travailleur qui voulait le bien de sa famille". Son meurtre ? Le fruit d'un "complot", les problèmes ayant surgi selon lui parce que Carmen "aimait un garçon", ce que la jeune femme dément.
La famille déchirée
Provoquant plusieurs interruptions d'audience, la famille gitane, dont de nombreux membres sont présents dans la salle d'audience, n'accepte pas que la mémoire du défunt soit "salie" et a exprimé sa "douleur" par l'intermédiaire de ses avocats. Lundi, deux psychiatres ont souligné qu'ils n'avaient relevé "aucune velléité de manipulation" de la part de Carmen, aînée de la fratrie traitée comme "la bonniche"et souffrant de "stress post-traumatique" après avoir grandi "dans une ambiance insupportable".
Le verdict est attendu ce soir mardi.
Carmen Bois est jugée par la cour d'assises du Gard pour avoir tué son père en avril 2016 à Beaucaire
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