Polémique : vers une interdiction des corridas aux mineurs ?

Quelques jours après la polémique sur la présence de deux ministres à une corrida, Aurore Bergé, porte-parole LREM, a annoncé vouloir interdire leur accès aux mineurs. Une annonce qui fait vivement réagir pro et anti corridas des départements de tradition taurine en Occitanie.

"La question du bien-être animal ne se réduit pas à quelques bobos parisiens écervelés" a exprimé Aurore Bergé sur France Info. Elle a ajouté "j’aimerais a minima qu’on puisse interdire la corrida aux mineurs. Est-ce que c’est 12 ans, 14 ans, 16 ans… Il faut avancer là-dessus". Une annonce qui fait grand bruit dans la communauté des pros et des antis corridas.
 

Quelques jours après la polémique déclenchée par la révélation par le quotidien Sud Ouest de la présence à une corrida en août à Bayonne du ministre de l'Agriculture Didier Guillaume et de sa collègue chargée de la Cohésion des territoires Jacqueline Gourault. Didier Guillaume a dit lundi "regrette(r)" d'avoir pu "choquer" des militants du bien-être animal opposés à la tauromachie.


Agacée par les propos d'Aurore Bergé, Brigitte Dubois présidente de l’école taurine de Nîmes rétorque: 

Si elle pense qu’elle détient la vérité, tant mieux pour elle mais je pense que les parents sont assez grands pour savoir ce qu’ils font avec leurs enfants .

« On apprend à un enfant à tuer »

Depuis 15 ans, Brigitte est bénévole dans cette association. Elle accueille des enfants de tout âge qui s’initient à cette tradition : la tauromachie. Dans cette école, il n’y a pas d’âges pour accueillir les enfants "ils sont tout à fait aptes à dire ce qu’ils veulent faire alors il n’y a pas d’âge minimum", ajoute-elle. Si majoritairement ceux qui s’inscrivent ont entre 13 et 14 ans, des enfants de 8 ans peuvent également intégrer cette école.
 

Une situation qui scandalise Claire Starozinski, présidente de l’Alliance Anticorrida : "on leur apprend les gestes qui vont permettre plus tard de mettre à mort un animal après avoir perpétré sur lui des actes de cruauté. Ces écoles ne devraient jamais exister, on n’apprend pas à un enfant à tuer".

Claire milite depuis 10 ans pour interdire les corridas aux moins de 14 ans – âge à partir duquel les enfants sont en mesure de s’exprimer selon elle. Alors cette proposition de loi est une première victoire, tout comme pour Roger Lahana, secrétaire général de la FLAC (fédération des luttes pour l’abolition des corridas).

Aurore Bergé a en effet annoncé travailler sur une proposition de loi sur la question du bien-être animal. Une proposition qui devrait être déposée par une cinquantaine de députés LREM d’ici la fin de l’année. Selon le secrétaire général de la FLAC "c’est une grande première qu’une personne à ce niveau-là de responsabilité fasse une telle annonce mais il faut des actes concrets".
 

7 projets de loi ont déjà été déposés pour interdire les corridas aux mineurs dans la précédente législature mais aucun n’a abouti. Pour quelle raison ? Le copinage avec des pro-corridas, estime Roger Lahana, mais cette fois-ci il a espoir de voir aboutir cette proposition de loi.

La configuration est différente aujourd’hui, il n’y a plus de copinage et au gouvernement les gens ont un parcours personnel normal. Interdire complètement la corrida ça me semble difficile mais l’interdire aux mineurs c’est largement possible même si je sais que ce n’est pas la priorité maximale.


75% des habitants des départements taurins seraient opposés aux corridas


De février à novembre, 150 corridas se tiennent partout en France. Mais c’est en Occitanie que cette culture est fortement répandue. Selon André Viard, président de l’Observatoire national des cultures taurines, cette annonce va à l’encontre de la déclaration universelle des droits de l’homme :

C’est un droit fondamental d’être élevé dans la culture de sa communauté et c’est également contraire à la loi française.


Scandalisé par les propos d’Aurore Bergé, André Viard dénonce une stigmatisation de cette communauté culturelle qui représente selon lui, plusieurs millions de citoyens.  "Elle a parlé sans réfléchir, ces propos sont anti-démocratiques", ajoute-il.
 


Selon un sondage commandé à l’IFOP par l’Alliance Anticorrida, 75% des habitants des départements taurins sont opposés aux corridas."C’est un spectacle violent qui peut agir sur la psychologie des mineurs. Quand les parents ne sont pas capables de savoir ce qui est bon pour leur enfant, il faut un garde-fou pour protéger les plus jeunes", explique Claire Starozinski.

Mais du côté des écoles taurines, pas question de se laisser faire. "La tauromachie fait vivre pas mal de gens. Les enfants on les empêchera jamais de pratiquer cela", révèle la présidente de l’école de Nîmes.


Un public vieillissant dans les arènes


Le secrétaire général de la FLAC affirme que dans les gradins des corridas, le public est vieillissant. Alors désintérêt pour cette pratique ou prix des billets trop chers ?

Les adolescents n’ont pas les moyens de se payer une place. On parle d’une problématique qui n’en n’est pas vraiment une en réalité. Les politiques n’ont pas le courage de regarder les vrais problèmes en face, indique André Viard.


Pour l’heure le président de la République, Emmanuel Macron, ne s’est pas exprimé au sujet de cette polémique. En 2017, il avait déclaré "la corrida fait partie intégrante de la culture et de l’économie, y compris du tourisme, de la région. Je suis à ce titre opposé à l’interdiction dans les territoires de tradition taurine".
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