"4000 primates par an sont utilisés en France", une association milite pour des alternatives aux animaux lors des expérimentations scientifiques

En février 2024, Pro Anima a dénoncé l'utilisation de primates pour la recherche à l'Université de Strasbourg. Malgré la perte temporaire de l'agrément de l'université, Pro Anima poursuit son combat, plaidant pour une médecine moderne sans expérimentation animale. Explication avec Lilas Courtot, responsable scientifique toulousaine de l'association.

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Lilas Courtot est titulaire d'un diplôme d'ingénieur en biochimie de l'INSA et d'un doctorat en cancérologie de l'Université Paul Sabatier de Toulouse (Haute-Garonne). Elle est aujourd'hui responsable scientifique au sein de Pro Anima. Une association qui interroge notamment sur la pertinence de tests de médicaments sur des animaux.

France 3 Occitanie : Pro Anima défend-elle la cause animale ?

Lilas Courtot : Pro Anima n'est pas une association de défense des animaux mais un comité scientifique qui œuvre au développement d'une science plus fiable et pertinente pour la santé humaine en s'appuyant sur des arguments scientifiques.

France 3 Occitanie. L'épisode judiciaire qui a concerné le centre de primatologie de l'université de Strasbourg a mis en lumière l'utilisation de primates par la recherche. C'est le cas ailleurs en France ?

Lilas Courtot : L'utilisation de grands singes tels que les orangs-outans est interdite en Europe. Mais certains primates sont, en effet, encore utilisés pour la recherche scientifique. C’est le cas des macaques. En France environ 4000 primates par an sont utilisés à des fins scientifiques. Ce sont les chiffres du ministère de l'Enseignement supérieur. C'est un chiffre qui stagne depuis 2015.

France 3 Occitanie. Dans quels types de recherches utilise-t-on les primates ?

Lilas Courtot : Ils sont utilisés pour la recherche fondamentale, c’est-à-dire pour comprendre certaines maladies. C'est principalement le cas pour les neurosciences : maladie d'Alzheimer, Parkinson. On les utilise aussi pour étudier les maladies cardiovasculaires ou infectieuses comme le VIH.

En ce qui concerne la recherche appliquée cela va être pour tester des vaccins par exemple mais il faut savoir que les primates ne souffrent pas naturellement de ces maladies. Les chercheurs vont dont induire la maladie chez l'animal afin de l'étudier. Au-delà du fait que cela génère des conditions assez difficiles, voire très difficiles en termes de douleurs pour les animaux, les résultats de l'expérimentation sur les primates sont rarement significatifs pour l'homme. L'exemple le plus frappant étant pour les maladies neurologiques. Concernant Alzheimer, la science n'a pas fait de progrès significatif malgré des années de recherches sur différentes espèces animales. Le taux d'échec de développement de médicaments est supérieur à 99%.

France 3 Occitanie. Existe-t-il des alternatives pour la recherche ou les essais de médicaments ?

Lilas Courtot. Oui il existe des alternatives intéressantes pour remplacer le primate ou les autres animaux d'ailleurs, afin de mieux comprendre les maladies humaines et les soigner. Le développement récent de modèles dits "organes-sur-puces" permet de modéliser la physiologie humaine. Ce sont des systèmes miniatures en silicone ou en plastique dans lesquels les chercheurs cultivent des cellules qui permettent une circulation des fluides via des microcanaux afin de connecter les différentes cellules entre elles et mimer la physiologie d'un organe. Le CEA a fait une étude complète sur ce sujet.

France 3 Occitanie. Et cela fonctionne ?

Lilas Courtot. La société Emulate (une entreprise américaine) a récemment comparé des tests de médicaments avec des primates et les organes-sur-puce pour l'évaluation d'une molécule. Les résultats sont très parlants. L'organe-sur-puces permet d'obtenir des résultats plus fiables et plus rapidement. 18 mois au lieu de 5 ans. Cela présente donc aussi des avantages économiques non-négligeables.

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