Avortement. "Enormément de demandes ne viennent pas de notre secteur" : l'IVG toujours difficile d'accès aux femmes malgré son inscription dans la constitution

Depuis le 8 mars 2024, la France a inscrit dans sa Constitution le droit des femmes à interrompre une grossesse. Une étape importante pour garantir et faciliter l'accès à l'avortement qui reste difficile dans certains cas comme le constate Nathalie Laurenceau de l'hôpital Paule-de-Viguier de Toulouse.

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La loi du 8 mars 2024 modifie l'article 34 de la Constitution pour y inscrire que "La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse"
Mais pour autant, est-ce que l'IVG est un acte facile d'accès selon les territoires, les lieux où il se pratique ou les méthodes utilisées ? Comment les professionnels de santé s'organisent pour répondre aux demandes ? Nathalie Laurenceau-Nicolle, sage-femme coordinatrice en maïeutique au CHU de Toulouse dresse un état des lieux.

L'Occitanie dans le trio de tête

En 2022 selon la Drees, 234 900 IVG ont été réalisées en France. L'Occitanie comme deux autres régions (Provence-Alpes-Côte d’Azur et Île-de-France ) se distingue par un taux de recours à l'IVG supérieur à la moyenne en France. En 2022, elle enregistre 21 451 IVG répartis de la manière suivante : 12 328 en établissement hospitalier, 8 990 en forfaits médicamenteux de ville (FMV) et 133 en téléconsultation.

Un accès à l'IVG inégal

Même si ces chiffres sont en hausse constante depuis 1990, l'acte reste difficile d'accès pour de nombreuses femmes comme le constate Nathalie Laurenceau : "L'accès à l'IVG varie énormément en fonction du terme, du lieu de résidence, c'est très hétérogène".

Un délai rallongé, mais pas partout

Depuis mars 2022, le délai pour avoir recours à l'avortement est passé de 12 à 14 semaines de grossesse (soit 16 semaines après le premier jour des dernières règles). Mais tous les centres médicaux ne le proposent pas. Le service maternité de l'hôpital Paule-de-Viguier de Toulouse qui réalise entre 600 et 700 IVG par an est le seul site de la ville à proposer des interventions jusqu'à ce terme : "On reçoit énormément de demandes qui ne viennent pas du tout de notre secteur. Si une femme habite Auch, et qu'elle veut avorter à 15 semaines de grossesse, on nous l'envoie. Une année, une femme est venue de Nice pour avorter chez nous, parce qu'elle ne trouvait pas de rendez-vous chez elle."

Même en France, avorter ce n'est pas si simple !

Nathalie Laurenceau, sage-femme, coordinatrice en maïeutique

Les sages-femmes au rendez-vous

"À Toulouse, on a la chance de ne pas être en difficulté pour accueillir les patientes, sauf peut-être aux vacances d'été et de Noël pour des raisons d'organisation plus difficiles", souligne la sage-femme. Sa profession peut d'ailleurs, depuis le mois de décembre 2023, réaliser l'interruption volontaire de grossesse instrumentale en établissement de santé sans intervention d'un médecin. Une avancée qui est loin d'être parfaite : "On nous soumet des conditions bien plus contraignantes qu'à des médecins généralistes, alors qu'on est mieux formées dans ce domaine en particulier", regrette la coordinatrice. 

Un acte mal rémunéré

Les médecins sont de moins en moins nombreux à réaliser l'acte : "Si nous, sages-femmes, on ne s'y met pas, ce sera de plus en plus difficile. Beaucoup de jeunes médecins ne veulent pas faire d'IVG, car c'est un acte qui est mal rémunéré. La question morale revient aussi chez certains ou certaines, qui préfèrent exercer leur droit de retrait."

Sans anesthésie générale, mais avec discrétion

À Toulouse, une méthode en particulier se démocratise. Les femmes ont le choix entre un IVG médicamenteux ou par intervention chirurgicale (sous anesthésie générale ou locale) : "On a deux médecins qui sont arrivés récemment et qui pratiquent l'IVG par anesthésie locale. C'est une méthode que choisissent de plus en plus de femmes, constate Nathalie Laurenceau. Certaines parce qu'elles y voient un moyen d'assumer leur choix, d'autres parce qu'une heure après, elles peuvent repartir, c'est plus facile pour le cacher à leur famille."
Ce qui illustre le fait que l'IVG reste dans certains cas un acte encore mal perçu par la société.

Dans certains pays conservateurs on retire ce droit aux femmes, c'est horrible.

Nathalie Laurenceau, sage-femme, coordinatrice en maïeutique

Avec la loi du 8 mars 2024, la France devient le premier État à inscrire dans sa Constitution le droit des femmes à interrompre une grossesse.

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