Comment Facebook censure un clip musical d'un groupe français défendant la liberté des femmes

Début juillet, le duo toulousain Anadjoh sort un premier extrait de son nouvel album à paraître en septembre. "I will liberate" est un hymne à la femme et à ses libertés. Le groupe sort un clip et lance une publicité sur Facebook. Elle est censurée quelque jours après pour "contenu à caractère politique".

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

En septembre prochain, le deuxième EP (mini-album) du duo toulousain doit sortir sur les plateformes de streaming. Pour annoncer cette parution, Johanna et Christophe Dorso ont publié un premier extrait "I will liberate". Comme souvent, les artistes ont produit un morceau engagé qui est un ode à la femme et à ses libertés. Une liberté contrecarrée par le réseau Facebook qui a décidé de stopper la promo du clip. 

Anadjoh plus fort que Captain America et Wonder Woman réunis

Un "contenu à caractère politique", c'est le motif invoqué par le géant américain pour retirer la pub du clip. Cette chanson pourrait influencer le vote et le cours des élections !

Le groupe Anadjoh comptait bien sur ce morceau et sur ce clip pour trouver de nouveaux fans. Ils ont donc entrepris de défendre ce titre en payant une publicité sur Facebook. Et ça marche. Le post est remarqué et des centaines de personnes demandent à rentrer en contact avec le groupe.

Au bout de 4 jours, le réseau social informe Johanna et Christophe Dorso que la publicité est rejetée et stoppée avec ce message : "votre publicité peut avoir été bloquée parce qu'elle mentionne des personnalités politiques ou concerne des enjeux sociaux sensibles qui peuvent influencer l'opinion publique, le vote des citoyens, les résultats d'une élection ou le devenir d'une loi à l'étude". Rien que ça !

Les 2 artistes sont restés interloqués. "Nous avions 150 prises de contact par jour, c'est énorme pour nous, déclare Johanna Dorso la chanteuse. L'algorithme de Facebook refuse de remettre le clip en avant et la publicité a été bloquée. Wouah je peux influencer le vote ou le cours des élections ? C'est beaucoup d'honneur !"

Même sentiment ironique chez son compagnon Christophe Dorso. "Je vis avec une femme qui a le pouvoir de changer le monde...Plus forte que Captain America et Wonder Woman réunies!"

Pour débloquer cette censure, le réseau invite le duo Anadjoh à répondre à un questionnaire. "Je commence à le remplir, déclare Johanna  et au moment de le valider je lis : attention si vous appuyez sur OK vous serez cataloguée comme activiste ou parti politique. Je ne voulais pas être fichée comme activiste féministe donc je n'ai pas cliqué. J'ai ensuite reposté une nouvelle publicité sans les 2 phrases qui posaient problème dans le texte. Les publicités se sont activées mais bizarrement, elles ne font aucune vue. Ca ne fonctionne pas alors même que j’ai payé les 3 € par jour à Facebook, ce qui d'ailleurs n'est pas cher."

I will liberate

Alors, qu'y a t-il de si subversif dans cette chanson ?

Depuis sa création, le groupe Anadjoh a toujours été militant et engagé pour plusieurs causes : le handicap avec la chanson "Why", la violence faite aux femmes avec "From Hell", ou encore la fraternité et la tolérance (I want to be happy). "I will liberate" est donc dans la lignée. "Pour rester dans la dynamique sur le handicap, j'ai écrit cette chanson. Aux USA, l'avortement est remis en cause et les médecins n’auront plus le droit de prévenir les femmes américaines lorsqu'il y a une malformation de leur fœtus. On doit avoir le choix de décider ou non de garder un enfant touché par le handicap. C'est important de le dire."

Johanna et Christophe Dorso connaissent parfaitement la question car ils ont une enfant handicapée. 

Dans le clip, on entend tout d'abord la voix de Simone Veil lors de son intervention à l'Assemblée Nationale pour défendre sa loi sur l'avortement en 1974. "J’ai sélectionné un passage où elle ne parle pas de l’IVG mais lorsqu'elle déclarer s'adresser à une assemblée composée exclusivement d'hommes. Elle acte le fait que la société tourne autour de l'homme et la femme n'est souvent qu'un objet."

L'actrice israélo-américaine Nathalie Portman intervient aussi. Elle a fait de sa carrière un engagement pour plusieurs causes et révélé ce qui s'était passé lors de son premier rôle au cinéma dans "Léon" de Luc Besson. L'actrice n'avait alors que 13 ans et lors de la sortie du film, elle a reçu pléthore de lettres. La première était celle d'un homme décrivant comment il allait la violer elle, une enfant de 13 ans. La plupart des autres lettres étaient sur la même teneur.

Iréne Monteiro ministre de l'égalité homme-femme y explique aussi qu'en Espagne, il y a trop de sexisme. Enfin Emma Watson vient compléter la panoplie des femmes que l'on entend dans ce clip tourné dans une salle du quartier Saint-Cyprien à Toulouse.

"Je suis partie d'un poème de Rhita Benjelloun "Silence" que j'ai légèrement modifié. Puis j'ai écrit ce morceau. Je remercie mon père et mon mari de ne jamais m'avoir fait sentir que j'e n'étais qu'une femme. Je suis une femme qui ne supporte pas qu’on puisse la rabaisser parce que c’est une femme."

Un morceau engagé dans le texte pour que les libertés acquises ne disparaissent comme ça, un titre très bien produit musicalement entre gospel, slam et lyrique. Une ode à la femme qui refuse d'être discriminée.

On a toutes vécu des trucs sexistes, c’est intolérable et on est conditionnées à ça, on sait que ça va arriver. Féministe est devenu un gros mot, très sectaire. Je ne suis pas féministe car je ne suis pas contre les hommes.

Johanna Dorso, artiste du duo toulousain Anadjoh

Le nouvel EP de 5 titres sortira en septembre prochain.  Malgré ceci -ou peut-être aussi grâce à cette censure- le clip frôle actuellement les 10 000 vues, presque un record pour Anadjoh. Le duo toulousain vient aussi de franchir le cap des 1 000 abonnés sur Facebook. 

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information