L’exposition aux pesticides est suspectée d’être un facteur de risque de cancers chez l'enfant, en particulier des leucémies. L' étude de l'Inserm s'intéresse au lien entre le risque de développer cette maladie et l’usage de pesticides près des habitations. L'épidémiologiste Stéphanie Goujon, donnent un éclairage en trois points sur les conclusions des scientifiques.
Une étude publiée par l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) en octobre 2023 se penche sur le lien possible entre le développement de la leucémie chez l'enfant de moins de 15 ans et la densité de vignes à proximité de son lieu d'habitation. Plus les surfaces viticoles sont importantes, plus le nombre de cas de la maladie augmente.
L'épidémiologiste Stéphanie Goujon, qui a contribué à la réalisation de ces travaux de recherche, explique ces résultats, en particulier en Occitanie.
Plus récemment, l'INSERM s'est aussi penché sur le lien entre le fait de vivre près de vignes (fortement traitées aux #pesticides) et le risque de #leucémie pédiatrique.
— Sabine Grataloup (@sabine_38) May 17, 2024
L'étude est toujours en cours pour l'étendre aux autres cultures.#cancer
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Plus de vignes : plus de leucémies
Stéphanie Goujon : Nous savions qu'il y avait un lien entre les leucémies pédiatriques et le fait qu'une femme enceinte avait des vignes à proximité de son habitation ou dans son cadre professionnel. Nous avons donc voulu savoir ce qu'il en était pour les enfants qui grandissaient à proximité des vignes.
Pour cette étude, le premier type de mesure est la présence de cultures agricoles dans la commune d'habitation de l'enfant. Le deuxième type de mesure recense les terres viticoles à moins d'un kilomètre du lieu d'habitation. L'étude s'appuie sur 3 711 cas d'enfants de moins de 15 ans diagnostiqués d'une leucémie et de plus de 40 000 enfants témoins.
Les résultats montrent qu'il n'y a pas d'incidence entre la présence de vignes à proximité du domicile et le développement de leucémies.
En revanche, on constate une augmentation de près de 10 % des leucémies lymphoblastiques aiguës tous les 10 % de surface de vignes supplémentaires.
L'Occitanie en première ligne
S.G : Pour notre étude, l'Occitanie fait partie des régions où il y a le plus d'enfants qui habitent à proximité des vignes. Cela représente 38 % d'entre eux. C'est aussi une région avec beaucoup de variété dans les lieux d'habitation.
Nous avons utilisé deux sources cartographiques différentes pour établir ces données. Il y a quelques différences régionales dans les résultats. L'Occitanie fait partie des lieux où les chiffres montrent une différence.
Un signal pour d'autres études
S.G. : Les conclusions vont dans le sens de notre hypothèse. Le risque de leucémie n’augmente pas avec la simple présence de vignes à moins de 1 000 m de l’adresse de résidence. Cependant, elle met en évidence une légère augmentation de ce risque en fonction de la surface totale des vignes présentes dans ce périmètre. L’ensemble des résultats est décrit en anglais dans le journal Environmental Health Perspectives.
Par contre, ces résultats sont un signal qui appelle à faire d'autres études. Nous avons commencé par la viticulture qui est une culture pérenne plus clairement identifiable que des cultures soumises à des rotations, par exemple, et qui fait l’objet de nombreux traitements phytosanitaires. Les analyses concernant les autres cultures sont en cours de même que les analyses d’autres types de cancers. En parallèle, nous travaillons sur l’évaluation des expositions aux différents pesticides utilisés sur ces cultures. C’est un travail long, complexe qui repose sur plusieurs collaborations.