Les sages-femmes travaillant à l'hôpital recevront à partir de janvier une prime de 100 euros net et une hausse de salaire d'environ 100 euros brut par mois. Mais ces annonces du ministre de la Santé ne satisfont pas la profession. Réaction d'une sage-femme de la maternité du CHU de Toulouse.
Le 16 septembre 2021, Olivier Véran a dévoilé plusieurs mesures en faveur des sages-femmes à l'occasion d'une réunion avec les organisations syndicales. Les sages-femmes travaillant à l'hôpital recevront à partir de janvier une prime de 100 euros net et une hausse de salaire d'environ 100 euros brut par mois.
Ses revalorisations, qui seront incluses dans le budget de la Sécu pour 2022, représenteront une dépense supplémentaire de 40 millions d'euros par an. Le ministre de la Santé a voulu faire preuve de générosité avec ce rattrapage mais ces mesures sont loin de satisfaire la profession.
"On se moque de nous"
Johanne Reynaud est sage-femme depuis 21 ans, elle exerce à la maternité Paule de Viguier du CHU Purpan de Toulouse. Comme beaucoup de ses consoeurs, elle attendait l'annonce de ces mesures avec impatience. Mais, jeudi soir, elle a déchanté.
C'est la claque ! On se moque de nous. Les organisations syndicales demandaient une revalorisation salariale de 500 à 600 euros net. On en est loin. C'est insultant.
"A Toulouse, on réalise 5000 accouchements/an. Sans nous, la maternité ne tournerait pas"
La déception est d'autant plus grande que ces soignantes se battent depuis des années pour une revalorisation de leur métier. Le malaise est important depuis les dernières mesures qui remontent à 2013.
On voit toutes les professions de santé évoluer et la notre stagne. C'est à croire que notre métier est trop "féminin" et que l'on ne se fait pas suffisamment entendre.
La maternité Paule de Viguier est la troisième de France en terme d'activité obstétricale et pourtant elles ne sont que 140 sages-femmes dans le service. Johanne Reynaud estime qu'il en faudrait le double pour un fonctionnement normal.
A Toulouse, on réalise 5000 accouchements par an. Sans nous, la maternité ne tournerait pas.
Car selon cette professionnelle de santé, le vrai problème reste le manque d'effectif. Un constat qui entraîne un épuisement professionnel important. La sage-femme explique que beaucoup de jeunes diplômées refusent d'exercer à l'hôpital et que des collègues fuient la Fonction publique pour revenir en libéral.
Le seul axe de la revalorisation salariale ne pourra suffire à répondre au malaise de la profession. Les problèmes de fond doivent être traités car l’histoire a montré que les demi-mesures trop souvent proposées aux sages-femmes n’ont pour effet que de reporter les problèmes
— Ordre sages-femmes (@CNOSF) September 16, 2021
Un constat partagé par le Conseil national de l'Ordre des sages-femmes, qui estime dans un communiqué que ces mesures ne répondent pas "aux enjeux de la profession".
"En ne traitant pas en profondeur les causes du malaise des sage-femmes, l'attractivité de la profession semble durablement compromise. En ignorant les problématiques croissantes d'effectifs dans les maternités, la question essentielle de la sécurité et de la qualité de la prise en charge des patientes et des nouveau-nés reste en suspens", fait valoir l'instance.
Un statut"sur mesure" écarté
Leur demande d'un statut "sur-mesure"de praticien hospitalier a, par ailleurs, été écartée, Olivier Véran préférant "conforter leur statut médical au sein de la fonction publique hospitalière", notamment à travers cette revalorisation qu'il qualifie de "significative".
Les compétences des sages-femmes seront néanmoins étendues à de nouveaux domaines, comme l'endométriose. Le ministère entend faciliter la création des "maisons de naissance" gérées par des sages-femmes.
Vers un nouveau mouvement de grogne ?
Depuis le début de l'année, les soignantes sont déjà descendues cinq fois dans la rue pour réclamer reconnaissance et effectifs. Les annonces d'Olivier Véran ne semblent pas calmer leur colère. Elles seraient prêtes à refaire grève dans les prochains jours.