Lorsqu'un traitement antibiotique est inefficace, on appelle ça "l'antibiorésistance". Un phénomène dangereux, de plus en plus fréquent, qui préoccupe les médecins. Déjà la cause de plusieurs milliers de morts en France, il constitue une réelle menace. L'infectiologue Camille Fourcade, de l'alliance Clinavenir, participe à la prévention, mercredi 15 novembre, à l'occasion de la journée de la sensibilisation à l'antibiorésistance.
Avoir ses vaccins à jour, se laver les mains correctement, ou encore faire un bon usage des antibiotiques lorsqu'on est malade. Des éléments essentiels, mis en avant à l'occasion de la journée de la sensibilisation à l'antibiorésistance. Comment ? Grâce à des stands et ateliers, installés sur le parvis du métro Jean-Jaurès, en plein centre-ville de Toulouse (Haute-Garonne), mercredi 15 novembre 2023.
Le but de l'initiative, organisée par Clinavenir (alliance des cliniques indépendantes d'Occitanie) : informer le public sur ce phénomène, à l'origine de plus de 5.000 décès par an en France et qui pourrait devenir, en 2050, la première cause de mortalité dans le monde. Le Docteur Camille Fourcade, infectiologue de l'alliance Clinavenir, alerte sur cette problématique.
- Qu'est-ce que c'est l'antibiorésistance ?
Camille Fourcade : "C'est lorsque les bactéries deviennent résistantes aux antibiotiques qu'on utilise pour traiter des infections. C’est-à-dire que si l'on contracte une infection, due à une bactérie résistante aux antibiotiques, il devient alors impossible de traiter la personne pour la soigner."
- Comment devient-on antibiorésistant ?
"Il y a trois cas de figure :
D'abord, la transmission par le contact physique des bactéries résistantes. On appelle cela la transmission "manuportée", c'est à dire par les mains. Elle représente 80% des transmissions.
Ensuite, la trop forte présence d'antibiotiques dans notre nourriture et dans l'eau que l'on boit. La viande notamment est pointée du doigt, à cause des antibiotiques utilisés pour la croissance des bêtes. Une tendance qu'il faut limiter, tout comme le fait de jeter les antibiotiques dans la nature. Dans beaucoup de pays du monde, l'eau est contaminée par les bactéries résistantes.
Enfin, si une personne prend beaucoup d'antibiotiques, elle peut être colonisée par des bactéries résistantes. Et si elle s'infecte avec une de ces bactéries, elle ne pourra plus être traitée. Une personne hospitalisée par exemple, qui fait beaucoup d'infections urinaires, risque de contracter des bactéries résistantes."
- Quels sont les dangers de l'antibiorésistance et comment lutter contre ?
"À cause de cette résistance, les soignants ne pourront plus, petit à petit, traiter les infections "banales", faute de moyens. Cela constitue un gros risque, puisque s'il n'y a plus d'antibiotiques possibles pour le patient, celui-ci peut décéder de son infection.
Le but n'est pas d'arrêter les antibiotiques, car ils sont nécessaires et sauvent des vies. Il faut les utiliser de la façon la plus juste possible. C’est-à-dire en diminuant la durée de prescription : avant, on traitait trop longtemps certaines infections. Il faut également réduire les doses et en les adaptant pour chaque personne. En enfin, arrêter de traiter certaines infections virales qui ne nécessitent pas d'antibiotiques.
Notre travail, en tant qu'infectiologue, c'est faire cette prévention auprès de tous les professionnels de santé, mais aujourd'hui, on le fait auprès du grand public. La France fait partie des cinq pays européens qui consomment le plus d'antibiotique. C’est un enjeu de santé publique.