Alors que la fréquentation des trains de nuit ne cesse d'augmenter depuis 2019 et que de nouvelles lignes vont ouvrir à l'année, d'autres pourraient subir les conséquences des travaux que s'apprête à mener la SNCF dans le quart Sud-Ouest de la France. Face à l'absence d'itinéraire bis, les lignes desservant l'Occitanie pourraient être stoppées. Le collectif "Oui au train de nuit" alerte.
Certaines lignes trains de nuit "menacées" ? C'est en tout cas ce que craint le collectif "Oui au train de nuit", qui milite pour le retour d'un moyen de transport écologique. Depuis quelques années, le train de nuit retrouve son succès. Entre 2019 et 2022, la fréquentation des lits-couchettes a augmenté de 41 %, selon les chiffres du ministère chargé des Transports. À tel point que de nouvelles lignes ont été annoncées. Pourtant, du fait des travaux à venir sur le réseau SNCF et notamment la Ligne Grande Vitesse entre Toulouse et Bordeaux, certaines lignes risquent d'en payer le prix fort. Face à l'absence d'alternatives annoncées par la SNCF, le collectif met en garde contre une remise en cause de la pérennité de certaines lignes comme le Paris-Latour de Carol.
Des travaux de 2024 à 2032
"Quand je travaille à Paris, je peux prendre le train à 21 h 30 et me réveiller dans les montagnes, c'est parfait. Je n'ai pas à perdre une nuit d'hôtel ou à prendre l'avion", se réjouie Marie Garnier, membre de "Oui au train de nuit". Usagère de la ligne depuis une cinquantaine d'années, elle craint que celle-ci soit mise en péril durant les grands travaux de la SNCF sur le Sud-Ouest à partir de 2024.
La SNCF est engagée dans un grand plan de rénovation et d'amélioration de son réseau. Depuis quelques mois, l'axe POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse) doit faire face à des travaux de modernisation. Ces derniers devraient durer au moins jusqu'à 2025. En attendant, les trains doivent contourner en passant par Bordeaux. Problème : les travaux pour la ligne LGV Bordeaux-Toulouse devraient paralyser l'axe à partir de 2024. "Avant la SNCF, faisait les travaux sur un sens et ne coupait pas la circulation, mais maintenant tout est coupé la nuit pour des raisons de sécurité", précise Marie Garnier.
Mais jusqu'à présent, alors que de nouvelles lignes vont s'ouvrir à l'année comme celle vers le Pays Basque ou le Roussillon et que l'ambition affichée du gouvernement est de redévelopper le train nocturne, aucune alternative n'a pour l'heure été annoncée pour les trains de nuits "Occitan" et "Pyrénéen". "C'est le seul train qui relie directement l'Ariège à Paris, rappelle Marie Garnier. L'enjeu, c'est aussi le désenclavement de certains territoires."
Aujourd'hui, il y a quatre lignes de train de nuit en France. Il y a quelques années, il y en avait une vingtaine.
Marie Garnier, membre du collectif "Oui au train de nuit"
En 2022, la ligne Paris - Latour-de-Carol a affiché un taux de remplissage de 73 % et a augmenté de 20 % par rapport à 2019. Une preuve de plus, pour la membre de "Oui au train de nuit", que la ligne est cruciale pour l'Ariège. Le collectif propose notamment d'utiliser un itinéraire bis passant par l'axe Coutras-Brive. "On a fait plusieurs propositions et maintenant, on souhaiterait que ce soit étudié. Pour le moment, il n'y a pas de solution transitoire annoncée alors que les travaux peuvent aller jusqu'à 2032", alerte Marie Garnier.
"Le moyen de locomotion du futur"
Plus globalement, le collectif pointe le retard de la France sur les trains de nuit par rapport à ses voisins européens. "Pour nous, le train de nuit est le moyen de locomotion du futur, assure Marie Garnier. Mais avec des trains de nuits dignes de ce nom ! Aujourd'hui, les trains de nuit ont la même configuration qu'il y a 40 ans, même s'ils ont fait quelques efforts, ce n'est pas forcément sexy." Elle en veut pour preuve l'absence de clientèle "professionnelle" dans les trains de nuit, du fait d'une offre de confort "pas du tout à la hauteur".
Plus encore, selon la membre du collectif "Oui au train de nuit", rien que la réservation d'un train de nuit est une épreuve, les différentes options étant mal indiquées. "Malgré toutes les difficultés, l'affluence est en croissance forte. Pourtant, ce sont un peu les parents oubliés de la SNCF, ce sont souvent ceux qu'on annule ou qu'on limite, pointe Marie Garnier. Il faut sortir de cette logique et se battre contre l'idée que ce sont des trains non remplis et pas rentables." En 2021, un rapport du gouvernement établissait un besoin de 600 voitures couchettes neuves. "La volonté est là, mais pas le budget", déplore la membre du collectif.
Malgré tout, "Oui au train de nuit" ne perd pas espoir et travail avec certains élus locaux. Le collectif annonce que l'absence d'alternatives pendant les travaux des lignes SNCF devrait être évoqué au Parlement prochainement, lors de Questions au gouvernement.