Un redresseur d'entreprises au chevet du Sanctuaire de Lourdes

En difficulté financière après plusieurs années de baisse fréquentation, les sanctuaires de Lourdes ont recruté cet été un directeur des opérations pour redresser la barre.

Si étonnant que cela puisse paraître, le plus grand centre de pèlerinage catholique français n'avait jusqu'alors pas de directeur centralisant la gestion de ses opérations. Mais la situation a été jugée suffisamment critique pour que soit créé, ex nihilo, un poste de "directeur des opérations". Il a été confié à la mi-août à un spécialiste du redressement des entreprises en difficulté : Thierry Lucereau.

Agé de 63 ans, ce fervent catholique père de sept enfants est bardé de diplômes (Institut supérieur d'électronique de Paris, Institut d'administration des entreprises, MBA de l'Insead). Il a occupé de multiples postes à responsabilité en Europe et aux Etats-Unis, notamment chez Giat Industries, MeadWestvaco à New York, ADI Ressources... Il doit aujourd'hui rééquilibrer les comptes du site, grevés par la baisse de la fréquentation et la hausse des coûtsLa situation est sérieuse mais pas dramatique", dit-il.

Des pertes franches

"La situation financière du Sanctuaire s'est dégradée progressivement et est passée en franches pertes en 2015", déclare-t-il, confirmant un déficit courant de 2,3 millions d'euros pour "25-26 millions de volume de flux" (l'équivalent du chiffre d'affaires). Le responsable accuse cependant des facteurs "exceptionnels", comme les conséquences comptables des violentes inondations de 2013. Toutefois, Thierry Lucereau concède qu'il existe aussi des difficultés de fond : "structurellement, il y a une tendance qu'on va infléchir : la baisse des pèlerinages et la hausse des coûts."

Une fréquentation en baisse contrairement à d'autres sanctuaires

Le directeur ne tient pas à être plus précis mais, selon un audit publié le 18 juillet dont l'AFP a obtenu copie, la fréquentation accuse une baisse inquiétante
dans la grotte où la Vierge est apparue à 18 reprises en 1858 à Bernadette Soubirous, selon l'enseignement de l'Eglise catholique. "Le Sanctuaire de Lourdes est l'un des rares sanctuaires en France et à l'étranger dont le flux de pèlerins est en baisse (environ -25% en cinq ans)", est-il écrit dans le "diagnostic économique et financier".
Tandis que 800.000 pèlerins ont été accueillis de 1999 à 2007, avec un pic à près d'1,2 million en 2008, année de la visite du pape Benoît XVI, ceux-ci n'étaient plus que 605.000 en 2014. Alors que Saint-Jacques de Compostelle (Espagne) et Fatima (Portugal) "affichent des croissances de l'ordre de 50%" depuis la même année, à près de 250.000, souligne l'audit.

Adapter l'accueil

Ces chiffres ne représentent toutefois que les groupes, tandis que le nombre des pèlerins en famille ou seuls "augmente", assure M. Lucereau, sans pouvoir donner de chiffres. Tout le défi est donc de "s'adapter" à cette nouvelle donne en offrant une "flexibilité" dans les types d'accueil proposés. Pour ce faire, le directeur sait pouvoir compter sur les "forces" du Sanctuaire, un site de 50 hectares et d'une centaine de bâtiments. "Notre rôle est de procurer un cadre qui permette aux pèlerins d'avoir un espace de recueillement et après, l'offrande viendra naturellement", ajoute-t-il. Restera alors à "assurer que les dons soient utilisés de façon tout à fait adéquate".
Car, selon l'audit publié en juillet, les dépenses ont augmenté de 1% en 2015 par rapport à 2011 tandis que les recettes ont baissé de 3% par rapport à 2012. "Il faut freiner les dépenses", reconnaît M. Lucereau, qui dit vouloir geler la masse salariale mais sans licencier certains des 300 salariés.

Pas de marchandisation du culte

Le nouveau directeur rejette de plus toute marchandisation du culte. Tandis que les vierges en plastique emplies d'eau "bénite" et autres souvenirs s'alignent sur les rues commerçantes menant au Sanctuaire, les services monnayables une fois ses grilles franchies se limitent quasi exclusivement à l'achat de cierges. Modernisation oblige, le site internet du Sanctuaire propose maintenant de "faire déposer et brûler des cierges à la grotte", contre non pas un prix mais une "offrande conseillée" d'au moins trois euros. "On ne souhaite pas nécessairement développer cela", tranche le directeur. "Notre
vocation n'est pas de faire de l'argent mais d'accueillir
."
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