Une trentaine de familles des Hautes-Pyrénées a rendu hommage, vendredi soir à Tarbes, aux victimes du génocide arménien de 1915. Une marche émouvante pour les petits-enfants des Améniens massacrés par les Turcs ottomans.
Une marche commémorative à la mémoire des victimes du génocide arménien a eu lieu vendredi en fin de journée à Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées. Une trentaine de familles du département, soutenues par des proches et quelques élus, a marché dans les rues du centre ville, 100 ans après l'extermination de leurs grands-parents par les Turcs ottomans.
Une cérémonie très émouvante qui s'est achevée devant le monument aux morts.
"Aujourd'hui nous avons parcouru quelques centaines de mètres, c'est très symbolique comparé aux milliers de kilomètres qu'ont fait nos ancêtres", a déclaré sur place un responsable de la manifestation, lui-même réfugié syrien.
Génocide arménien : l'Histoire, les faits, les versions
Après des siècles de domination persane et byzantine, le territoire de l'Arménie historique est partagé au milieu du XIXe siècle entre les empires russe et ottoman.Entre 1,7 et 2,3 millions d'Arméniens vivent dans l'Empire ottoman vers 1915, selon les estimations des historiens occidentaux.
Les autorités ottomanes soupçonnent les sujets arméniens de manquer de loyauté à l'égard de l'empire depuis la naissance, à la fin du XIXème siècle, d'un mouvement nationaliste réclamant l'autonomie des Arméniens.
Entre 100.000 et 300.000 Arméniens auraient ainsi été massacrés en 1895-1896, sous le règne du sultan Abdul Hamid II.
En octobre 1914, l'Empire ottoman entre dans la Première guerre mondiale, aux côtés de l'Allemagne et de l'Autriche-Hongrie. Lorsque l'Empire essuie de lourdes pertes dans les combats affectant les provinces arméniennes, les autorités en rejettent la responsabilité sur les Arméniens et lancent une campagne de propagande les qualifiant d'"ennemi intérieur".
Le 24 avril 1915, des milliers d'Arméniens, soupçonnés de sentiments nationaux hostiles au gouvernement central sont arrêtés. La plupart d'entre eux sont ensuite exécutés ou déportés et le 24 avril devient dès lors, pour tous les Arméniens du monde, la Journée commémorative du génocide arménien.
Chaîne des événements
Le 26 mai 1915, une loi spéciale autorise la déportation des Arméniens "pour des raisons de sécurité intérieure", suivie le 13 septembre d'une loi ordonnant la confiscation de leurs biens.
La population arménienne d'Anatolie et de Cilicie est alors contrainte à l'exode vers les déserts de Mésopotamie. Un grand nombre d'Arméniens sont tués en chemin ou dans des camps.
Beaucoup sont brûlés vifs, noyés, empoisonnés ou victimes du typhus, selon des rapports des diplomates étrangers et des agents de renseignement de l'époque.
L'ambassadeur américain dans l'Empire ottoman, Henry Morgenthau, décrit dans un câble diplomatique au Département d'État une "campagne d'extermination raciale sous couvert de répression de la rébellion".
Le 30 octobre 1918, l'Empire ottoman se rend aux forces de la Triple Entente (Grande-Bretagne, Russie et France). Un accord sur l'armistice permet alors aux Arméniens déportés de revenir dans leurs maisons.
En février 1919, un tribunal militaire à Constantinople reconnaît plusieurs hauts responsables ottomans coupables de crimes de guerre, y compris contre les Arméniens, et les condamne à mort.
Versions contradictoires
Les Arméniens estiment que 1,5 million des leurs ont été tués de manière systématique à la fin de l'empire ottoman.
La Turquie évoque pour sa part une guerre civile en Anatolie, doublée d'une famine, dans laquelle 300 à 500.000 Arméniens et autant de Turcs ont trouvé la mort.
En avril 2014, le président actuel Recep Tayyip Erdogan, alors Premier ministre, avait fait un pas en avant inédit en présentant des condoléances pour les victimes arméniennes de 1915, sans pour autant cesser de contester toute volonté d'extermination.