Au Seaquarium du Grau-du-Roi (Hérault), le centre d'études et de sauvegarde des tortues marines de Méditerranée (CESTMed) soigne les tortues, souvent victimes des activités humaines et de la pollution en mer. Cette année, une trentaine ont été recueillies.
Au CESTMed, la matinée des tortues commence comme la nôtre, par un petit déjeuner. Au menu aujourd’hui pour Fantine et Crush, du merlan. Les deux reptiles doivent reprendre du poil de la bête après avoir été récupérés accidentellement dans les filets de pêcheur.
Dans cette vidéo, Fantine déguste avec gourmandise quelques poissons servis par Susan, bénévole au centre :
Lorsqu’elles sont capturées, les tortues passent du temps à se débattre pour s’extraire du filet. Si c’est un chalutier, elles sont un peu malmenées quelques minutes voire quelques heures donc elles sont très affaiblies. Il n’y a pas de grosses blessures mais le centre de soins est là pour qu’elles récupèrent des forces et les relâcher rapidement
Jean-Baptiste Sénégas, directeur du CESTMed
Une fois récupérées sur les bateaux, un bilan médical est établi. « Un vétérinaire s’occupe de ces animaux. Quand une tortue arrive, comme nous lorsque l’on va chez le docteur, un diagnostic est fait » explique Jean-Baptiste Sénégas. Une fois les radios et les bilans sanguins réalisés, c’est au tour des médicaments de prendre le relais et de remettre sur pattes les reptiles. Mais ils ne sont pas les seuls à faire effet. Des bénévoles répondent présent pour veiller sur ces petites bêtes à carapace.
Des tortues entre de bonnes mains
Susan est bénévole depuis plus d'un an au CESTMed. Ancienne biologiste, pour elle, « il y avait beaucoup de choses à faire dans la protection et la sensibilisation de la nature et des océans. » Cela fait maintenant un an et demi qu’elle arpente les bassins une fois par semaine.
Crocs jaunes aux pieds, sceau, chiffon ou stylo en main, elle nettoie, pèse et nourrit les tortues. Venir au centre lui fait du bien, elle est heureuse de se rendre utile et « de les garder quelque temps pour être sûre qu’elles vont bien avant de les relâcher. »
Une tortue est restée deux ans ici, elle était aveugle. On était tous attaché à elle. C’est un moment intense et de pur bonheur quand elles partent.
Susan, bénévole au CESTMed
Un bonheur qui se transforme en inquiétude lorsqu’elle vide les bassins pour les savonner. Susan ramasse régulièrement des formes grises, rouges, ou noires au fond de l’eau. Des fois, « c’est des petits morceaux, ou des gros. » C’est du plastique, et il met aujourd’hui en danger les tortues qui peuplent les océans depuis plus de 150 millions d'années selon WWF.
Du plastique dans les intestins
En plus de la pêche accidentelle et les risques de collisions, « des tortues ont des difficultés pour nager à cause d’une ingestion de plastique » explique le responsable du CESTMed. Une tortue sur deux évacuerait des bouts de plastique. Certains bénévoles ont retrouvé des sacs plastiques entiers dans leur intestin, des aérateurs de robinet et des emballages de gâteaux.
Encore hier, on a trouvé trois bouts de plastique. Crush est là depuis deux mois. Il lui a fallu tout ce temps pour les évacuer. Heureusement, les morceaux n’étaient pas trop gros, ça aurait pu provoquer une occlusion intestinale. Et face à une occlusion, on ne peut rien faire, on ne peut pas les opérer. Elles sont donc condamnées.
Susan, bénévole au CESTMed
Les tortues marines sont des indicatrices de pollution en mer. « Il y a un programme européen, INDICIT, qui établit une année de référence, et les tortues deviennent des indicateurs de la santé de la Méditerranée » explique le directeur du CESTMed. « C’est-à-dire que si l’une d’elles arrive au centre et a ingéré deux grammes de plastique, si l’année d’après, elle en a absorbé plus, alors ça signifie que la mer s’est dégradée. » Mais au centre, ce ne sont pas deux grammes de plastique qui sont retrouvés chez une tortue, mais quatorze en moyenne.
Une fois soignées, les tortues marines sont emmenées dans un bassin de réhabilitation, au Ponant à la Grande-Motte. « Le seul qui existe en France Métropolitaine » indique Cindy Capdet, responsable des animations au CESTMed. Là-bas, il est possible de les observer gratuitement.
Pour Jean-Baptiste Sénégas, tous les animaux ont un rôle, mais les tortues peut-être plus spécifiquement. Elles sont en bout de chaîne alimentaire et leur rôle est de réguler l’écosystème.
Les gens peuvent s’engager dans des programmes éco-volontaire que ce soit pour une tortue marine ou pour un autre animal, ou une cause qui nous plaît, on peut profiter de nos vacances pour s’engager
Jean-Baptiste Sénégas, directeur du CESTMed
Il est aussi possible de participer à l’un des programmes scientifiques en mer, en relation avec l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER) et le Muséum national d'Histoire naturelle de Paris. Pour le président du CESTMED, ces missions sont importantes, “elles permettent de faire découvrir des animaux au public et ce qu’est la science.”