Les amis de la jeune femme de 25 ans foudroyée par une méningite, mardi 15 octobre, sont sous le choc. Un de ceux qui l'ont accompagnée aux urgences de Montpellier et tenté de la réanimer témoigne de l'agonie et des derniers instants de la victime.
15 jours après le décès brutal de son amie, Florent est sous le choc. Le trentenaire se repasse la scène en boucle. Il n'arrive pas à comprendre pourquoi et comment la jeune femme de 25 ans a pu mourir aussi violemment d'une méningite sans être prise en charge par les secours malgré des symptômes très inquiétants et des appels répétés au Samu.
Mépris
"J'ai été appelé après le refus du Samu de se déplacer. Dès le début, on a expliqué la situation mais on a ressenti un mépris le plus total de la part du Samu et de toutes les personnes qu'on a eues au téléphone. Nous n'avons pas été pris au sérieux. Notre amie non plus. Il a fallu répéter les choses à plusieurs reprises donc on a perdu énormément de temps. On s'est sentis abandonnés, négligés", confie le témoin à France 3 Occitanie.
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"Quand je suis arrivé, notre amie était au plus mal. Elle était dans la chambre et gémissait allongée dans son lit dans le noir. Elle ne savait pas dans quelle position se mettre pour être bien. Elle disait que son corps la brûlait de l'intérieur. Elle nous suppliait de l'aider. Nous avons fait tout ce que le Samu nous a dit de faire : lui donner de l'eau sucrée, mettre du chaud là où elle avait mal. Le souci c'est qu'elle avait mal partout. On lui mettait des bouillottes, mais il n'y avait rien à faire".
Temps perdu
Ils s'échinent pendant près d'une heure trente sans parvenir à la soulager, puis ils rappellent les secours et réexposent situation. "Le temps d'être redirigé, réexpliquer..; le deuxième appel au Samu dure encore au moins 15 minutes." Tout prend du temps car la jeune femme ne tient plus debout. Quand ils préconisent de lui faire prendre une douche, la patiente déploie un effort surhumain pour s'agripper à son ami qui l'emmène jusqu'à la salle de bains. "Tout semblait s'étirer dans le temps et en même temps très rapide. Sous la douche, ils s'aperçoivent qu'elle est couverte de taches brunes sur le visage et sur tout le corps.
Il faut que tu me ramènes dans mon lit. Je vais mourir.
La jeune femme, une heure avant sa mort
"Je lui ai demandé de se réagripper à mon cou. Elle a été très courageuse. Nous, à ce moment-là, on ne se dit pas que... On comprend que c'est grave mais le Samu nous dit que c'est une intoxication alimentaire ou une grosse crise d'asthme donc on leur fait confiance", poursuit le jeune homme.
Quand on voit les taches, on se dit 'là il faut absolument qu'on se tire'. On est livrés à nous-mêmes"
Florent
Florent et son amie arrivent à joindre une autre personne motorisée. Là tout s'accélère : les amis préparent ses affaires mais la jeune femme n'arrive plus à respirer. "Le GPS indique 15 minutes de parcours pour se rendre aux urgences de la clinique. On lui dit : "c'est bon allez, c'est ton moment là. Tout va bientôt se terminer. Tu vas t'en sortir !".
Dans la voiture, sur le trajet, ils vivent un instant d'euphorie. Malheureusement, le répit est de courte durée. À cinq minutes de l'arrivée, la jeune femme commence à gesticuler et elle suffoque.
Elle me disait : 'là l'air ne rentre plus. Je n'y arrive plus. Je vois tout blanc.'
VictimeFlorent, son ami
Morte cinq minutes avant d'arriver aux urgences
Ensuite, dans un dernier souffle, la jeune femme s'écroule sur le siège. Ses amis crient son nom. Florent tâte son pouls, comprend qu'il n'y en a plus. Il tente un massage cardiaque. La jeune femme ferme les yeux. Elle est morte.
Elle est décédée dans mes mains. On était à cinq minutes d'arriver.
Florent
Son ami continue quand même le massage cardiaque jusqu'à l'arrivée aux urgences. Il se rappelle avoir sauté de la voiture et hurlé dans le hall "mon amie fait un arrêt cardiaque". Ils l'ont emmenée. On était dans un état second.
Sous le choc
Entre le déni, la fatigue, l'euphorie et l'espoir de la revoir vivante, les amis sont sous le choc. "On était dans la quatrième dimension. Je ne savais pas faire de massage cardiaque."
Je savais qu'il fallait appuyer fort jusqu’à parfois casser des côtes et je me disais, dans une heure elle me dira 'je peux plus danser, j'ai les côtes cassées'.
Florent
"Je n'arrivais pas à croire qu'elle pouvait mourir. On a fait ce qu'on a pu avec les moyens du bord. On n'a pas été entendus. On a été ignorés. Elle a été ignorée. Nous, aujourd'hui, on est là. Elle, elle n'est plus là. Elle est partie dans l'ignorance la plus totale".
Très ému, le trentenaire confie n'avoir jamais vu quelqu'un souffrir autant. "C'est intenable", ajoute-t-il dans un sanglot.
Deux semaines après le drame, les amis de la jeune femme oscillent entre déni, colère, tristesse et culpabilité. Des amis unis dans la souffrance qui témoignent pour comprendre.
Si les secours s'étaient déplacés tout de suite, notre amie ne serait pas morte.
Florent
"Pourquoi une telle absence de considération, cette ignorance totale, ce ton méprisant. Le manque d'effectifs n'explique pas tout. Comme l'erreur de diagnostic. Personne ne mérite de partir ainsi", conclut le jeune homme traumatisé. Depuis le drame, il souffre d'acouphènes et ne peut plus fermer les yeux sans revoir la scène.