La Journée mondiale de la fibromyalgie a lieu le 12 mai. Troubles du sommeil, troubles de la concentration, fatigue intense... Difficile à diagnostiquer, cette maladie douloureuse chronique touche 2% de la population française. Rencontre avec deux patientes à Montpellier (Hérault).
"Les scanners et IRM ne détectent rien. On me disait que c’était psychologique", raconte Virginie Manero. Atteinte de fibromyalgie, elle a connu une longue période d'errance médicale. Reconnue par l'OMS en 1992, cette maladie douloureuse chronique reste peu diagnostiquée. Près de 2% de la population française souffre de fibromyalgie. 8 malades sur 10 sont des femmes. Au centre anti-douleur du CHU de Montpellier (Hérault), les patientes viennent chercher l'écoute et l'accompagnement dont elles ont longtemps manqué.
Des douleurs sans lésion
Une douleur diffuse, une sensation de brûlure de la tête aux pieds, une fatigue profonde... Les symptômes de la fibromyalgie sont variés et difficilement identifiables. Le diagnostic est d'autant plus laborieux à formuler que cette maladie chronique se caractérise par l'absence de lésion. De ce fait, elle n'est pas reconnue par la Sécurité sociale. Pourtant, cette pathologie peut devenir particulièrement invalidante pour les patients.
"Je peux facilement dormir jusqu’à 12 à 14h par jour, mais mon sommeil n'est pas réparateur. Au réveil, la sensation de fatigue est toujours là", explique Virginie Manero, 45 ans.
Je ne peux plus porter un sac, me laver, étendre une machine, passer les vitesses en voiture... Tout le haut de mon corps est bloqué, comme si j'avais toujours du poids dans les bras.
Errance médicale, absence de reconnaissance et incompréhension
En effet, la fibromyalgie est encore mal définie et mal expliquée.
"C'est une maladie difficile à comprendre, aussi bien pour les patients que pour les médecins", admet le Dr. Patrick Ginies, chef du service douleur au CHU de Montpellier. "Les patients subissent parfois des opérations inutiles !"
On va voir l’ophtalmo... et l’œil est normal. On va voir l’ORL... et l’oreille est normale. On va voir le neurologue, et on vous dit : “vous n'êtes pas folle et vous n’avez pas Alzheimer”. Mais les symptômes sont là !
"On me disait que c'était dans ma tête... C'est comme si on me disait que j'étais folle", se souvient Gaëlle Radde. "Quand on est désespéré, on frappe à toutes les portes... Les bonnes et les mauvaises. J'ai été amenée à consulter plusieurs charlatans", regrette-t-elle.
Des parcours heurtés
Les causes exactes de la maladie sont encore floues. Il est fréquent que les fibromyalgiques aient connu des événements traumatiques, des chocs émotionnels, des épisodes dépressifs, qui deviennent le point de départ de leur douleur.
Pour Virginie, tout a commencé en 2015 par un burn-out. "Au travail, on m'a enlevé des responsabilités. J'étais très investie, alors je l’ai ressenti comme si j’avais fait quelque chose de mal, comme une trahison, un démembrement".
J'ai eu des symptômes qui auraient pu m'alerter, mais j'avais tellement la tête dans le guidon que je ne leur ai pas prêté attention. Mais un jour, j'ai eu comme un coup de poignard dans le dos. Les pompiers ont dû venir me chercher. J'avais la respiration coupée et je ne pouvais plus marcher.
Les symptômes de Gaëlle ont commencé juste après le suicide de sa mère. "La dépression, les différents chocs de la vie, tout ça est très lié aux douleurs", observe-t-elle. Virginie constate le même lien. "Le moindre choc émotionnel, la moindre contrariété va avoir des répercussions. Un problème au travail, avec les enfants, un problème financier, fait réagir le corps violemment."
La maladie, par ses effets invalidants, peut aggraver l'état psychique des patients. "Quand je suis immobilisée par la douleur, je me sens dégradée, et comme un poids pour ma famille", confie Virginie. "J'ai peur d'être perçue comme fainéante, alors que j'ai toujours été très dynamique !"
Le soulagement du diagnostic et du suivi
"Mettre un nom sur le problème, trouver des gens à l’écoute, qui nous prennent au sérieux, ça change tout", sourit Virginie. Au CHU de Montpellier, Virginie et Gaëlle trouvent un accompagnement diversifié : réflexothérapie, massage, suivi psychologique...
"On apprend à vivre avec la maladie, à mieux gérer nos émotions, à mieux réagir face à l'incompréhension des autres", explique Gaëlle.
"Il faut d'abord écarter les autres maladies que peut cacher la fibromyalgie : thyroïde, cancer, hépatite... Ensuite, avec une reprise d'activité physique modérée, une diététique normale, un moral conforté, les douleurs peuvent décliner", explique le Dr. Patrick Ginies.
Pour les malades, rencontrer des groupes de patients est aussi un soulagement. "Ca fait du bien de parler à d’autres personnes qui ont les mêmes symptômes. On se dit qu’on est pas tout seul. On n'est ni fou, ni fainéant."