Thon rouge : vers une hausse des quotas de pêche pour les senneurs sétois ?

Encouragés par le retour en masse du thon rouge en Méditerranée et dans l'Atlantique Est, les pays pêcheurs se réunissent jusqu'au 17 novembre en Italie pour fixer un nouveau quota de prise, sous le regard attentif des ONG qui prônent la prudence. Une conférence à huis clos.

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A Sète, capitale des thoniers français, on attend la décision de l'ICCAT qui fixera le prochain quota. La dernière campagne de pêche n'a duré que deux jours: 48 heures seulement ont suffi pour remplir les filets. Aux yeux des thoniers senneurs, le stock s’est largement reconstitué.

En 2013, la quantité de thon rouge sur cette zone est remontée à 585.000 tonnes pour ce qui est du stock reproducteur. Soit le double du niveau observé dans les années 50, selon le comité scientifique de la Cicta, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique, dont les membres (l'UE et 47 Etats) se réunissent du 10 au 17 novembre. 

Une conférence à huis clos qui doit durer semaine, destinée essentiellement à fixer de nouveaux quotas de prises de thon rouge en Méditerranée et dans l'Atlantique Est. 600 délégués, dont de nombreux scientifiques et représentants d'ONG et scientifiques qui prônent la prudencey participent.

Chaque Etat fera connaître en cours de semaine sa position sur le quota, actuellement fixé à 13.500 tonnes annuelles pour l'Atlantique et la Méditerranée. D'ores et déjà, en France, le comité national des pêches réclame un "relèvement progressif", à 18.500 pour 2015 et 23.500 pour 2016. Au grand dam des défenseurs des océans, qui demandent un maintien de la limite "autour" de son niveau actuel, arguant de la nécessité de consolider les acquis.

Au coeur d'un grand combat mené par les écologistes, le "thunnus thynnus" revient en effet de loin: son stock au milieu des années 2000 était tombé à 150.000 tonnes. Devant la menace d'une inscription sur la liste des espèces en voie de disparition de l'Onu, alors que les prises totales atteignaient 50.000 tonnes par an dans les années 90-2000, la Cicta finit par prendre des mesures drastiques, suivant les avis scientifiques: le quota a été ramené de 28.500 en 2008 à 22.000 en 2009, puis 12.900 en 2011, le tout accompagné de strictes mesures de contrôle.

Une hausse des quotas qui doit rester modérée 

Aujourd'hui, "on a énormément de signes positifs d'un rétablissement du stock, mais ce n'est pas sûr à 100%, ni que ce soit cette année, dans un an, deux, trois...", prévient Sylvain Bonhommeau, chercheur à l'Ifremer et membre du comité scientifique de la Cicta, évoquant notamment un manque de données.
Les scientifiques de la Cicta n'ont ainsi pu s'accorder sur une recommandation concernant une hausse des quotas, dont ils jugent en tout cas qu'elle doit rester "modérée" dans l'immédiat.

"Ca va être rude", anticipe Amanda Nickson, de l'ONG Pew Environment, observatrice à la conférence, qui se déroulera à huis-clos.
Cette remontée des stocks "est une bonne nouvelle, mais il va y avoir un énorme pression de l'industrie. Le test sera: est-ce que les gouvernements continueront à suivre la science ou risqueront-ils un retour aux mauvais jours?", souligne-t-elle. Passer à 23.000 tonnes en deux ans, "c'est +50% par an, ce n'est pas ce que j'appelle "modéré!"

"Ca va mieux car des choses ambitieuses ont été réalisées", note François Chartier, de Greenpeace: "réduction du quota, plans de contrôle, navires militaires - une activité de pêche surveillée par l'armée, ça montrait l'ampleur du problème!" "S'il doit y avoir une augmentation des quotas - ce qui est politiquement inévitable - elle doit être la plus progressive possible," ajoute-t-il, dénonçant aussi la persistance d'une pèche illégale. Ce qu'appuie son collègue du WWF: "Cette année, il faudra résoudre les problèmes de traçabilité. A cette condition, on pourra parler de relever les quotas", relève Sergi Tudela, évoquant les "lacunes" des documents de capture.

 "Il y a juste quelques années, la crédibilité du système de gouvernance était en danger. En sauvant le thon rouge, la Cicta s'est sauvée
elle-même", ajoute M. Tudela. "Le thon rouge est central aussi car les mesures prises pour lui pourraient être appliquées à d'autres pêcheries".

De fait, d'autres espèces préoccupent aujourd'hui les observateurs, notamment le "thon tropical", dont l'albacore. Le cas des requins, certains de plus en plus vulnérables à la pêche, devrait revenir aussi sur la table à Gênes. Tout comme la question de la prolifération des DCP, les "dispositifs de concentration de poissons", abris artificiels flottants où se réfugient toutes sortes d'espèces ainsi pêchées de manière indifférenciée.
Un problème soulevé aussi par les pêcheurs français, face à leurs concurrents espagnols.

Reportage O.Poncelet et L.Haedrich

 

Le thon tropical, le plus consommé en France
Les thons tropicaux fournissent l'écrasante majorité du thon consommé sous forme de conserves en France et dans le monde. Ils  sont au centre d'une industrie très mondialisée.
 
Près de 4,5 millions de tonnes de thon sont pêchées dans le monde chaque année, principalement des espèces tropicales, albacore et listao en tête. Les premiers producteur mondiaux sont l'Indonésie, le Japon et les Philippines. La France est au 15ème  rang.

Les captures ont été multipliées par neuf depuis les années 1950, avec une forte demande à la fois dans les pays développés et émergeants car le thon en boîte constitue l'une des sources de protéines de qualité les moins chères.

Le thon rouge, très médiatisé 

Le thon rouge (qui n'est pas tropical),en raison de sa surpêche au milieu des années 2000, est un produit haut de gamme qui n'est pas mis en conserve. On en trouve très peu dans l'Hexagone, où les restaurant  japonais utilisent du thon albacore, à la chair de couleur rouge, pour leur sushis.

Les thons destinés au marché français sont pêchés dans l'Océan Indien et dans les zones tropicales des océans Atlantique et Pacifique, par de grands thoniers qui sillonnent ces mers tout au long de l'année. Ces navires utilisent la senne, un immense filet qui permet d'encercler les bancs de thons.

Le poisson est débarqué dans les ports les plus proches des zones de pêche, notamment en Côte d'Ivoire, au Ghana, au Sénégal, à l'île Maurice, aux Seychelles et à Madagascar. De grandes conserveries y sont installées, qui mettent directement le thon en boîte avant de l'expédier en Europe.

Plus de 80% des boîtes de thon consommées en France sont importées.

En plus des pays déjà cités, la Thaïlande (1er), l'Espagne (2e) et l'Equateur font partie des grands producteurs mondiaux de ces conserves.
La France possède 22 bateaux senneurs dans l'Atlantique et l'océan Indien qui pêchent en moyenne 100.000 tonnes de poisson par an.
L'Espagne en compte 63 qui pêchent aussi dans le Pacifique.
Le thon albacore est le plus consommé en France car il se prête bien à la fabrication de thon entier au naturel, qui représente 60% du marché en volume. 

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