Oublis, vices de procédures... Des délinquants et des criminels, condamnés ou pas sortent de prison, pour une coquille dans leur dossier ou parce que des délais n'ont pas été respectés.
" Libérable". Combien de détenus, parfois même incarcérés pour des crimes, ont-ils vu entrer un gardien de prison dans leur cellule, venu leur annoncer de rassembler leurs affaires et sortir de prison malgré de lourdes condamnations ou bien avant un procès ?
Le 3 avril, un détenu particulièrement dangeureux, incarcéré à Carcassonne pour une prise d'otages à Béziers, et qui avait à son actif une vingtaine de condamnations, a été remis en liberté suite à une erreur de procédure.
Un jour de trop
La chambre de l'instruction de Montpellier qui avait 20 jours pour statuer sur une énième demande de remise en liberté a rendu sa décision un jour trop tard, donc hors délai.Un exemple parmi d'autres.
"On libère les gens car nous n'avons pas le droit de les garder en prison ou des problèmes d'escorte et les textes qui évoluent en permanence sont de plus en plus exigeants", souligne le magistrat.On est gardiens de la procédure.Vous ne pouvez pas maintenir quelqu'un en prison si vous dépassez d'un jour ou deux l'ordre d'écrou, précise Antonio Fulleda, du syndicat de la magistrature de L'Hérault.
En matière criminelle, on peut garder quelqu'un en détention pendant un an à compter de la date de sa première incarcération, et la justice, si elle veut prolonger la détention doit statuer sur toute nouvelle demande de libération avant la fin de cette année et à compter de son mandat de dépôt.
En correctionnelle, l'incarcération est valable pour quatre mois. Le JLD ( Juge des libertés et de la détention ) doit revoir un détenu quatre mois après sa mise sous écrou pour statuer sur son maintien en détention ou pas, au risque, dans le cas contraire d'être hors délai .
Détention arbitraire
Une détention devient arbitraire si elle est hors délai."Ce qui est préoccupant, ajoute Antonio Fulleda c'est qu'on a de plus en plus de difficultés à voir les prévenus "physiquement". Il n'y a pas assez de personnel pour amener les détenus chez les juges".
Trafiquants de drogue libérés
Dernièrement, deux trafiquants de drogue ont été libérés par les juges de Narbonne car, faute d'escorte, à cause du manque de personnel pénitentiaire, ils n'avaient pu être extraits de leur cellule. Ils sont sortis de prison car ils n'ont pas pu comparaître devant la justice dans les conditions requises par la loi.Justice Kafkaïenne
Alors on passe par la visioconférence, ce qui n'est satisfaisant ni pour les magistrats ni pour les justiciables.
C'est un problème au pénal mais aussi au civil, notamment pour les enfants placés, regrette Antonio Fulleda".Je crains une dérive de justice déshumanisée à la Orwell ou à la Kafka.
"Le problème de l'extraction des détenus est également récurrent à Montpellier", ajoute Joël Mocaer, président de la chambre correctionnelle à la Cour d'appel de Montpellier.
Justice sous pression
"Ici comme ailleurs, des détenus sont libérés suite à des erreurs humaines, ce qui est compréhensible car les personnels de justice sont en nombre insuffisant et sous pression", constate le magistrat.Traque procédurale
Traquer les vices de procédures dans le maquis des dernières jurisprudences de la Cour de Cassation, est la spécialité Me Jean-Denis Flori, avocat au barreau de Nice."Un travail de fourmi" pour l'avocat qui scrute les dernières décisions rendues par la plus haute juridiction française, toujours plus stricte en matière de délais et de respect des droits de la défense.
"Cela nécessite beaucoup de recherches car la jurisprudence en matière correctionnelle est très complexe", précise l'avocat.