C’est ce mercredi 17 janvier que siège pour la première fois à Barcelone le Parlement issu des élections du 21 décembre. Carles Puigdemont, candidat à la présidence de la région, est absent : il est toujours en Belgique, car il ne peut rentrer en Espagne sous peine d’être arrêté.
Le parlement de Catalogne dominé par les indépendantistes siège mercredi pour la première fois depuis sa tentative de rupture avec l'Espagne, en l'absence de Carles Puigdemont qui, depuis Bruxelles, veut être investi à la présidence, ce que Madrid refuse.
Deux mois après la crise politique sans précédent déclenchée par leur tentative de sécession, les séparatistes catalans ont réussi à conserver la confiance des électeurs lors des élections régionales du 21 décembre. Ils ont obtenu 47,5% des suffrages et 70 députés sur 135.
Cette majorité absolue des sièges doit désormais leur permettre en principe de désigner un président séparatiste.
Le candidat naturel est Carles Puigdemont, destitué par le chef du gouvernement Mariano Rajoy avec l'ensemble de son exécutif le 27 octobre après la déclaration d'indépendance du parlement catalan.
Mardi soir, les deux principales listes séparatistes, celle du président destitué "Ensemble pour la Catalogne" et celle de la "Gauche républicaine de Catalogne" ont annoncé avoir trouvé un accord pour investir Puigdemont.
La première a 34 sièges et la deuxième 32. Avec les quatre voix encore à confirmer de la Candidature d'unité populaire (extrême gauche indépendantiste), l'arithmétique leur donne donc l'avantage.
Parcours semé d’obstacles
Mercredi, le nouveau parlement siégera à partir de 11h00 et les séparatistes chercheront au cours de cette séance à poser les jalons de l'investiture de M. Puigdemont prévue en principe à la fin du mois, un parcours semé d'obstacles.
Leur majorité reste en effet théorique puisque huit des 70 députés séparatistes sont en prison ou à l'étranger et ne peuvent en principe voter: trois sont en détention provisoire, inculpés pour "rébellion", "sédition" et "détournement de fonds"; les cinq autres, dont Carles Puigdemont, également visés par la justice, sont en fuite en Belgique.
Leur premier objectif sera de contrôler le parlement et l'organe qui veille au respect du règlement de la chambre et à l'ordre du jour.
C'est ce "bureau" qui acceptera ou non, le vote à distance des uns ou des autres. Pour les députés en prison, cela semble possible, même si le règlement parlementaire ne le prévoit pas, expliquait mardi une source gouvernementale à Madrid.
"Ils n'ont pas choisi d'aller en prison et ils ont été placés en détention par un juge". Mais cela est exclu pour les élus partis à Bruxelles de leur propre chef, ajoutait-il.
Le gouvernement a d'ailleurs annoncé qu'il bloquerait en justice toute tentative de Carles Puigdemont et des quatre autres députés qui se sont exilés volontairement à Bruxelles de tenter d'agir à distance, soit en votant lors de la séance de mercredi pour choisir le bureau et le président du parlement, soit plus tard en s'opposant devant la Cour constitutionnelle à la prise de fonction du président destitué.
Présidence par visioconférence ?
Mardi, lors d'une réception offerte à la presse au palais de la Moncloa, siège du gouvernement à Madrid, les calculs allaient bon train sur les voix dont disposaient - ou non – les indépendantistes.
Ils pourraient garder le contrôle du Parlement avec 62 députés présents dans l'hémicycle et les trois élus emprisonnés, l'opposition (parti libéral Ciudadanos, Parti socialiste et Parti populaire de Mariano Rajoy) ne comptant que 57 députés. Les huit élus du groupe Catalunya en Comun, proche de Podemos, ont décidé de s'abstenir, rendant impossible une majorité favorable au maintien en Espagne.
Reste que Mariano Rajoy n'acceptera en aucun cas une présidence depuis Bruxelles, via internet et vidéoconférence, d'une région de 7,5 millions d'habitants où vivent 16% des Espagnols...
"Je contesterai le premier acte administratif", qui ira dans ce sens, a-t-il dit à des journalistes à la Moncloa mardi.
Un nouveau blocage possible
Un tel recours entraînera la saisine de la Cour constitutionnelle, qui gèlera l'investiture et débouchera sur un nouveau scénario de blocage de la région, pendant lequel le gouvernement continuera à diriger en direct la Catalogne privée de l'autonomie à laquelle ses habitants, très partagés sur l'indépendance, tiennent tant.
Une crise qui coûte cher
Selon le ministre de l'Economie Luis de Guindos cette crise politique a déjà coûté un milliard d'euros en ralentissant la croissance de la région, qui fournit 19% du PIB. Plus de 3.000 entreprises inquiètes ont préféré déménager leur siège social hors de Catalogne depuis le référendum d'autodéterminationinterdit du 1er octobre.