Accusée par son concubin d'avoir frappé sa fille, Cécile Bourgeon, la mère de la petite Fiona, dont le corps reste introuvable, doit s'expliquer, mardi, devant les juges d'instruction à Clermont-Ferrand. Ses chefs d'accusations pourraient être requalifiés en "coups mortels aggravés".
La jeune femme de 25 ans, en détention provisoire à Lyon-Corbas, pourrait voir sa mise en examen pour quatre chefs, dont "recel de cadavre" et "non assistance à personne en danger", requalifiée en "coups mortels aggravés", la même que son compagnon, indiquent des sources judiciaires.
Il s'agirait d'une "mesure de justice", pour l'avocat du concubin Berkane Makhlouf, Me Mohamed Khanifar car, selon lui, les deux pourraient être impliqués au même titre.
Une confrontation entre Makhlouf et Bourgeon est nécessaire, selon les mêmes sources, mais elle n'est, pour l'instant, pas programmée et ne devrait pas intervenir avant le mois de novembre.
Cette nouvelle phase d'instruction doit être précédée d'une audience devant le juge des affaires familiales sur la garde des enfants, lequel se déclarera incompétent ou confirmera la décision du juge des enfants de Perpignan, a indiqué l'avocat de Cécile Bourgeon, Me Gilles-Jean Portejoie.
Vendredi, le magistrat perpignannais a confié Bilal, l'enfant du couple, né en août, ainsi qu'Éva, 3 ans, la fille de Cécile, à l'aide sociale.
Surenchère
Jusqu'aux déclarations de son compagnon, Cécile Bourgeon était a priori tenue hors de cause dans le décès de Fiona que le couple a finalement reconnu après son interpellation le 24 septembre.
Après quatre mois de mensonges, ils ont avoué avoir enterré l'enfant dans une forêt près de Clermont-Ferrand, en présence d'Éva.
Makhlouf et Bourgeon avaient initialement affirmé que Fiona avait disparu le 12 mai dans un parc de Clermont-Ferrand, alors que la mère, enceinte, s'était assoupie sur un banc, orientant alors les enquêteurs sur la piste de l'enlèvement.
Lors des premiers interrogatoires, la mère a chargé son compagnon, affirmant que, la nuit du drame, son concubin avait donné un coup à la tête de Fiona, occasionnant un hématome à l'oeil.
Plus tard, après un interrogatoire de première comparution pendant lequel elle avait, comme la loi le lui permet, gardé le silence, la jeune femme avait, face aux magistrats instructeurs, accablé davantage son compagnon. Cécile Bourgeon avait alors parlé d'un tyran domestique, d'un homme qui la martyrisait, elle, Fiona et Éva et surtout de plusieurs coups, explique à l'AFP Me Khanifar.
C'est cette surenchère qui a amené Makhlouf à évoluer dans sa version des événements.
S'il a continué à nier avec force avoir frappé Fiona, il a accusé sa compagne d'avoir donné ce soir-là "deux coups de pied au ventre" et "deux coups à la tête" de sa fille, selon Me Khanifar.
Et Makhlouf de raconter aux magistrats que Cécile a corrigé Fiona parce que la petite s'était fait vomir comme elle le faisait depuis quelque temps imitant sa mère enceinte.
"Je ne vais plus la protéger"
Berkane Makhlouf m'a dit: + Elle (Cécile) me présente comme un monstre. Je ne vais plus la protéger. Moi je ne l'ai (Fiona) pas tapée. Mais elle, elle l'a corrigée.
Elle a pété un câble+", ajoute Me Khanifa.
Pour Makhlouf, les coups de Cécile ne sont cependant "pas la cause de la mort" de Fiona. Il assure à son avocat: "C'est pas possible". "Il reste sur son hypothèse du début, celui de l'accident domestique: l'étouffement dans le vomi ou la prise de stupéfiants, de produits de substitution", ajoute le défenseur.
Il affirme encore à son avocat: "Fiona imitait sa mère. Elle savait parfaitement où se trouvaient tous les produits".
"Entre 2H00 et 4H00, il a entendu le lit grincer et des gémissements. Mais ni l'un ni l'autre ne s'est levé car Fiona ne s'était pas levée pour vomir comme elle le faisait", poursuit l'avocat.
Pour Makhlouf, plusieurs fois condamné pour violences et usage de stupéfiants, l'autopsie du corps de Fiona démontrera qu'il dit la vérité. Mais trois opérations de fouilles se sont révélées jusque-là infructueuses. Et, sauf rebondissements, il n'y a pas de nouvelles recherches prévues tant que le couple est incapable de retrouver l'endroit où il a procédé à l'enterrement, dans une forêt autour de Clermont-Ferrand.
"Après avoir trouvé Fiona morte, ils ont décidé ensemble de l'enterrer car ils ne voulaient pas être séparés. Ils le craignaient car ils sont toxicomanes et lui déjà condamné. Ils l'ont mise dans un sac en cuir à l'arrière de la voiture à côté d'Éva et ils sont partis au hasard. Ils ont pris la route du Puy-de-Dôme, vers l'ouest, avant de bifurquer vers le nord". Mais ni l'un et l'autre ne se souvient où ils se sont arrêtés", souligne Me Khanifar, rappelant que son client "veut aider" mais n'a pas le permis et n'a donc pas regardé la route. Il se souvient juste d'un panneau.