500 personnes, élus de tous bords politiques et citoyens, se sont réunies lundi 14 octobre place de la Catalogne à Perpignan pour protester contre les peines de 9 à 13 ans de prison infligées en Espagne aux élus indépendantistes catalans après la tentative de sécession de la Catalogne en 2017.
Des centaines de citoyens sont venus dénoncer le verdict de la cour suprême espagnole.
Parmi eux, des élus de droite et de gauche : la plupart connaissent les politiques catalans emprisonnés.
On ne doit pas être en prison pour ses idées politiques en Europe aujourd'hui. Jean-Paul Billès, maire sans étiquette de Pézilla-la-Rivière.
Dans la foule rassemblée place de la Catalogne à Perpignan, l'indignation et l'incompréhension dominent, face aux années de prison ferme infligées aux leaders indépendantistes pour la tentative de sécession de la Catalogne en 2017.
Nombreux sont ceux qui craignent désormais que cette crise catalane ne bascule dans la violence.
Manifestations monstres à Barcelone et Gérone
De l'autre côté de la frontière, à peine connues les peines infligées, des milliers d'indépendantistes catalans en colère sont descendus dans les rues lundi 14 octobre.
Dès l'annonce des peines allant de 9 à 13 ans de prison, des rassemblements spontanés ont eu lieu à Barcelone avant que les militants ne rejoignent, à l'appel d'un mouvement anonyme baptisé "Tsunami démocratique", l'aéroport pour le bloquer.
La police anti-émeutes a chargé à plusieurs reprises des centaines de militants tentant de pénétrer dans le terminal et jetant pierres et poubelles, a constaté l'AFP.
"C'est une honte", a réagi une manifestante, venue tout spécialement de Mirepoix dans l'Aude à Perpignan pour le rassemblement de soutien aux indépendantistes catalans.
Dans les démocraties, un peuple a le droit de demander un référendum, on ne peut pas être condamné pour ça.
La police a arrêté un manifestant, et 75 personnes ont été blessées, selon les services d'urgence de l'aéroport, qui n'ont pas précisé la gravité de ces blessures.
110 vols ont été annulés, selon le gestionnaire aéroportuaire Aena, tandis que des voyageurs ont été contraints de quitter leurs véhicules sur l'autoroute pour rejoindre le terminal à pied avec leurs valises.
A travers la région, dont le gouvernement est toujours contrôlé par les indépendantistes, des militants ont coupé des routes et des voies de chemin de fer.
Dans la soirée, des milliers de militants se sont rassemblés dans le centre de Barcelone pour une manifestation prévue depuis plusieurs jours, criant "les rues seront toujours à nous".
S'ils ne veulent pas nous entendre lorsque nous faisons de la politique, qu'ils nous entendent dans la rue, a déclaré Mireia Sintes, une étudiante de 26 ans.
Sur twitter, le "Tsunami démocratique", a annoncé de nouvelles actions pour mardi 15 octobre.
Des marches sont prévues à travers la région à partir du mercredi 16 octobre avant une grève générale convoquée pour vendredi 18 octobre.
Dans une région que le séparatisme maintient en ébullition depuis près de dix ans, ces condamnations relancent des tensions qui vont dominer les élections législatives du 10 novembre, les quatrièmes en quatre ans.
Des peines de 9 à 13 ans de prison prononcées contre les élus indépendantistes catalans :
L'ancien vice-président régional catalan Oriol Junqueras s'est vu infliger la plus lourde peine avec 13 ans de prison pour sédition et détournement de fonds publics.
Des peines de neuf à 12 de prison pour sédition, et détournements dans certains cas, ont frappé par ailleurs l'ancienne présidente du parlement catalan Carme Forcadell, condamnée à 11 ans et demi, les dirigeants des puissantes associations indépendantistes ANC et Omnium Cultural, Jordi Sanchez et Jordi Cuixart condamnés à 9 ans et cinq anciens ministres régionaux condamnés à des peines entre 10 ans et demi et 12 ans.
Les juges ont écarté le chef d'accusation plus grave de rébellion invoqué par le parquet qui avait requis jusqu'à 25 ans de prison pour Oriol Junqueras.
Trois autres anciens membres du gouvernement catalan, qui étaient en liberté conditionnelle,
ont eux été condamnés à des amendes de quelque 60.000 euros chacun pour désobéissance.
"Je ressens de la rage, de l'impuissance. Ils sont condamnés pour une idéologie qui est la mienne", a lancé Joan Guich, un étudiant de 19 ans manifestant à Barcelone.
Ces douze indépendantistes étaient jugés pour avoir organisé le 1er octobre 2017, en dépit de l'interdiction de la justice, un référendum d'autodétermination, émaillé de violences policières, suivi de la proclamation le 27 du même mois d'une vaine déclaration d'indépendance par le parlement catalan.
Cette tentative de sécession avait été la pire crise politique qu'ait connue le pays depuis la fin de la dictature franquiste en 1975.
"Ce n'est pas la justice, c'est une vengeance", ont dénoncé, dans un communiqué commun, les neuf indépendantistes condamnés.
"Nous reviendrons encore plus forts (...) et nous gagnerons", avait réagi plus tôt Oriol Junqueras, principal accusé du procès, en l'absence de l'ex-président catalan Carles Puigdemont qui a fui en 2017 en Belgique pour échapper aux poursuites et à l'encontre duquel la justice espagnole a lancé lundi 14 octobre un nouveau mandat d'arrêt international.
Dans une allocution solennelle, en espagnol et en anglais, Pedro Sanchez, chef socialiste du gouvernement espagnol, a appelé pour sa part à une "nouvelle étape" en Catalogne basée sur le "dialogue", tout en rappelant que "personne n'est au-dessus de la loi".