Techniquement et médicalement, l'intervention programmée ce mardi 1er décembre à Perpignan est exceptionnelle. Alain, 52 ans et obèse de près de 300 kilos, sera extrait de son appartement à l'aide d'une grue. L'opération qui va mobiliser plus de 50 personnes doit durer plusieurs heures.
Le dispositif arrêté par la préfecture des Pyrénées-Orientales est hors normes. Tout concourt à rendre l'opération de sauvetage périlleuse.
L'homme à prendre en charge pèse entre 250 et 300 kilos, son état de santé s'est détérioré ces derniers mois à cause de son obésité morbide. D'autant qu'il est bloqué chez lui, assis au sol, sans bouger depuis un an.
Son appartement vétuste est situé au 1er étage d'une maison, dans le quartier Saint-Jacques, dans une rue très étroite et donc peu accessible. Les pompiers craignent par ailleurs un risque d'effondrement du plancher voire de l'immeuble.
Enfin, il faut le sortir par une fenêtre en façade qui devra auparavant être agrandie afin qu'Alain puisse passer sur un brancard, trop grand et trop large pour emprunter l'escalier de la maison.Après des mois de tractations entre Alain, sa famille, son avocat et les autorités, puis des dizaines de démarches administratives, une solution est trouvée. Alain quittera donc son appartement par les airs.
Une grue de 100 tonnes avec une flèche de 60 mètres
L'opération débutera vers 5h du matin, ce mardi, par la mise en place d'un périmètre de sécurité et l'évacuation des habitants des immeubles voisins.
Vers 6h, tous les intervenants, plus de 50 personnes doivent être sur zone.
Les ingénieurs structures commenceront par étayer la bâtiment et le plancher de l'appartement. Puis la fenêtre du 1er étage sera agrandie en découpant une partie de la façade.
Dans le même temps, la grue de 100 tonnes, l'ambulance et les pompiers seront positionnés sur une place voisine.
La grue lèvera un container avec une équipe médicale à bord, en passant par dessus les immeubles voisins, pour venir se coller face à l'ouverture sur la façade.
Alain sera alors transféré assis grâce à l'équipe médicale et 10 pompiers, dont 5 hommes du GRIMP, dans le container. La grue fera repasser son chargement au dessus des toits pour venir le poser près des secours, Place fontaine neuve.
Un poste de commandement et 50 personnes mobilisées
Pour coordonner les équipes et le matériel, mais aussi assurer la sécurité, 50 hommes seront présents.
10 personnels de la mairie de Perpignan et d'entreprises privées pour les travaux techniques et logistiques. 7 agents de la police municipale et 7 policiers nationaux sécuriseront le périmètre.
Côté médical, il y a aura 15 pompiers du SDIS des Pyrénées-Orientales avec une équipe du CHU de Montpellier et une du SMUR de Perpignan, soit au total, 25 médecins, infirmiers, urgentistes , ambulanciers et représentant de l'ARS Occitanie.
Le patient sera également accompagné par 3 personnes du conseil départemental des Pyrénées-Orientales.
Des travaux préparatoires lundi
Ce lundi, des travaux préparatoires techniques et logistiques sur le bâtiment occupé par Alain ont été réalisés afin d’assurer la sécurité de tous durant l’opération.
Des équipes techniques de la mairie de Perpignan ainsi que des professionnels du bâtiment ont donc été mobilisés pour mener à bien ces travaux :
- travaux de serrurerie
- mise en place d’un conteneur
- évacuation des encombrants
- mise en place d’un butonnage des murs mitoyens
- mise en place de l’étaiement afin de soutenir le plancher
- dépose de l’éclairage public
- enlèvement de 2 bornes de stationnement
Un transfert au CHU de Montpellier puis un séjour dans un centre spécialisé au nord de Toulouse
Un fois extrait de son logement par les airs, Alain sera transféré vers le CHU de Montpellier. Il sera pris en charge et fera l'objet d'examens divers à cause de plusieurs pathologies comorbides.Après un temps de rééducation minimum, il sera accueilli dans un centre spécialisé dans le traitement de l'obésité sévère en Haute-Garonne, au nord de Toulouse.
Un an de démarches et d'appels à l'aide
Alain est quasi reclus chez lui depuis 4 ans et il ne sort plus de son appartement depuis décembre 2019. Jusqu'en juillet 2020, Alain refusait de se faire soigner et d'intégrer un établissement spécialisé car ses parents et sa soeur étaient décédés à l'hôpital, 5 ans plus tôt. Mais à force de persuasion, son frère qui s'occupe de lui, son avocat et les médecins ont réussi à le faire changer d'avis.Installé à même le sol, assis, calé avec des coussins, il attend depuis des mois une solution. En juillet dernier, une de nos équipes l'a rencontré.
Je ne peux plus bouger d'un millimètre. Rester ici, c'est la mort. Mais tous les jours, je prie Dieu pour qu'il me prête vie.