Une découverte des plus inattendues. A Ur, village d'un peu plus de 300 âmes dans les Pyrénées-Orientales, une poutre de plus de 800 ans vient d'être retrouvée dans l'église du village, dissimulée derrière des panneaux de bois. Une restauration était en cours.
C'est un vestige exceptionnel qui vient d'être découvert sur la commune d'Ur en Cerdagne. Une poutre peinte médiévale. Celle-ci était dissimulée derrière le retable de l'église Saint-Martin. Alors que des travaux de restauration de l'édifice étaient en cours, le démontage du retable a laissé apparaître cette pièce rarissime. Une découverte majeure pour ce petit village de 300 habitants qui n'a jamais autant fait parlé de lui ces derniers jours.
C'est la première fois qu'on fait une découverte aussi importante. On ne s'y attendait pas du tout. C'est une découverte exceptionnelle pour la commune mais aussi pour tout le territoire de Cerdagne.
Francis Gantou, Maire d'Ur
Pour admirer ce trésor, il faut lever les yeux vers le ciel. Lovée juste sous le plafond, une poutre peinte représentant de petits personnages en buste. De part et d'autre Saint-Martin, Saint patron de l'église. À une extrémité de la poutre, ce dernier est illustré sur son cheval et à l'autre en tant qu'évêque. Au centre sont représentés le Christ et les douze apôtres. La pièce serait l'un des derniers vestiges existants à ce jour en Europe. Un moment d'intense émotion pour la conservatrice qui a vu se dévoiler la poutre.
C'est un élément majeur du patrimoine. Tout le monde s'est félicité de cette découverte, un élément rare dont on conserve assez peu d'éléments du même type. Une peinture romane, bien conservée qui fait partie de l'histoire d'Ur, de l'histoire de l'église. Il faut absolument la préserver et ensuite la mettre en valeur.
Léda Martines, Conservatrice du patrimoine des Pyrénées-Orientales
Une frise de 800 ans
Mais comment se fait-il que l'on n'ait pas découvert cette poutre auparavant ? Comme c'est souvent le cas dans les édifices religieux, on est venu au fur et à mesure du temps, changer les aménagements liturgiques, améliorer la décoration de l'église et donc rajouter des éléments.
"Cette poutre était complètement dissimulée sous une cloison de panneaux de bois, derrière un retable de l’époque moderne qui lui-même remployait des éléments plus anciens, du XVIe siècle et du XVIIIème siècle qui avaient été remis en couleur au XIXe siècle." C'est donc, comme le commente Léda Martines, conservatrice à la DRAC, toute une stratification qui les a amenés à cette poutre au moment du début du chantier et de la dépose du retable.
Stylistiquement, on peut dire que c'est une peinture romane qu'on date généralement entre le milieu du XIIème siècle et la fin du XIIIème siècle. Mais tous ces éléments seront soumis à l'étude et qui seront confirmés dans un second temps.
Léda Martines, conservatrice du patrimoine des Pyrénées-Orientales
Un patrimoine rare à préserver
Ce patrimoine "surprise" retient toute l'attention des services de restauration et de conservation du Département et de la Direction Régionale des Affaires Culturelles, la DRAC, tous arrivés en urgence pour découvrir l'artefact, l'analyser et procéder à des consolidations. Une opération délicate.
Avant de faire la dépose, il faut s'assurer de l'état de conservation de la couche picturale qui est sur la poutre. On l'a examinée et même si elle est en très bon état on a vu des endroits où il y avait des petites cloques et puis tout le bord inférieur qui a été découpé. Pour éviter de perdre des écailles de peinture, on pose du papier japon très fin avec une colle très légère qui va maintenir en place la peinture pendant les opérations.
Isabelle Jubal, Responsable du centre de conservation du patrimoine
Prochaine étape donc, procéder au descellement de la poutre. Et pour préserver minutieusement les dessins, elle sera conservée in situ, sur la tribune de l'église, de manière que le chantier puisse se poursuivre sans risquer d'altérer cet élément qui est une découverte majeure. "La poutre est très sensible aux conditions hydrométriques. C'est pour cela que nous allons la conserver sur place, dans son contexte climatique", confie la conservatrice de la DRAC.
Après sa restauration, on souhaite conserver la poutre sur la commune. Quand l'église sera entièrement rénovée, on pense la remettre en évidence à l'intérieur pour que tout le monde puisse la voir.
Francis Gantou, maire d'Ur
Mais avant de venir apprécier ces magnifiques peintures, il faudra être patient. Le travail de conservation ne fait que commencer. Il faudra également attendre la fin du chantier de restauration de l'église. Une embellie qui en est pour l'instant à la première tranche des travaux.