Deux cagettes de cerises de Céret dans les Pyrennées-Orientales ont été envoyées au Président et pour la première fois, au Premier Ministre, Edouard Philippe. La tradition est respectée, malgré une recolte 2020 qui s'annonce désastreuse : les producteurs annoncent 70% de perte.
Tôt ce mercredi matin, Etienne Arnaudiès, responsable de la coopérative de Céret, dans le Vallespir, était sur le pont. Objectif : préparer la cagette "présidentielle".
Cette année, c'est la variété Folfer qui a été choisie. "Oui, car pour la Burlat - la cerise emblématique du Vallespir- c'est déjà fini" précise-t-il.C'est une tradition qui remonte à 1932, raconte-t-il.
C'est en début d'après-midi, ce 13 mai, que le camion a quitté le marché Saint Charles pour rejoindre celui de Rungis. Ce jeudi matin, au petit déjeuner, Emmanuel Macron pourra ainsi goûter la saveur de la cerise catalane....Tout comme Edouard Philippe.
Une première en guise d'alerte
Car pour la toute première fois, le Premier Ministre aura aussi sa cagette, explique la préfecture des Pyrénées-Orientales. Pas d'explication sur cette innovation. Peut-être un moyen pour les acteurs locaux d'alerter l'Exécutif sur la situation plus que difficile vécue par producteurs de cerises. Dans chacune des cagettes, une lettre. L'une émane d'Alain Torrent, le maire de la ville catalane, l'autre de l'ensemble des producteurs de cerises du Vallespir.
Une récolte désastreuse
Des producteurs- ils sont une petite vingtaine pour le Vallespir- désemparés face à une campagne 2020 "désastreuse", à l'instar de Pascal Traïter : "En 35 ans, je n'ai jamais vu ça ! Cette quantité de pluie phénoménale de ces dernières semaines, ça a dévasté le fruit. A ce jour, ce sont 80% de la production qui sont perdus... et ce n'est pas fini" explique-t-il. Habituellement, sa récolte atteint environ 500 kilos" et là , à mi-parcours, j'arrive à peine à 50 kilos".Un constat approuvé par Eric Hostalnou de la chambre d'agriculture.
Pour l'ensemble des variétés, c'est l'équivalent de 20 jours de perte sur cette campagne 2020 qui va se terminer d'ici une quinzaine de jours.
Une pluie intense, fréquente et une tramontane totalement absente
La saison qui avait débuté quelques jours avant le 1er mai s'annonçait pourtant bonne et précoce et c'est la Burlat qui a ouvert le bal. "Ce produit phare qui habituellement est la première à se placer sur le marché. Mais avec une perte de 50 à 80% sur cette variété, économiquement, c'est une catastrophe" poursuit Eric Hostalnou.Certains producteurs, selon lui, ont d'ailleurs choisi d'abandonner cette saison.
Des précipitations printanières exceptionnelles tant par leur intensité que par leur fréquence, environ 250 000 mm sur 3 semaines.
Pour les autres variétés, comme la Bigalise ou la Folfer, le constat risque d'être tout aussi amer: " Les fruits sont à peine arrivés à maturité. Et beaucoup sont déjà éclatés par la pluie. On peut estimer une perte entre 40 et 50% pour ces variétés" ajoute Eric Hostalnou.Et la tramontane a joué à la grande absente ! Un fait rarissime en cette période, alors qu'elle participe pleinement à la maturité du fruit, ajoute Pascal Traïter.
Demande de classement en calamité agricole
Des dossiers sont en cours d'instruction par la Chambre d'Agriculture et la Direction Départementale du Territoire et de la Mer pour demander le classement en calamité agricole.Autre lueur d'espoir : le retour du soleil , même timide. Dans une dizaine de jours, la 3ème et dernière vague de cueillette avec la starking ou la sweetheart devrait démarrer. "Même si la récolte est bonne, elle ne pourra pas sauver les pertes de la saison" conclut Etienne Arnaudiès de la Coopérative de Céret. Car ce qui est perdu ne se rattrape plus.Une petite lueur d'espoir, lâche Pascal Traïter, cela pourra me permettre de payer au moins les frais d'exploitation. Ce qui aujourd'hui est impossible.