Entre janvier et avril 2020, de fortes pluies ont gonflé le fleuve la Têt à Perpignan. Conséquence: le paysage autour du cours d'eau a été modifié de façon spectaculaire. Au moins 900 000 euros de travaux sont nécessaires pour réparer les dégâts.
Arbres couchés, embâcles, bancs de sable, le visage du fleuve a changé. La tempête Gloria, en janvier de cette année, avait déjà considérablement modifié le paysage le long de la Têt à Perpignan.
Les fortes pluies qui se sont abattues durant 3 jours, les 20, 21 et 22 avril derniers, n’ont pas arrangé la situation.
« Effectivement, les dernières intempéries en ont remis une couche », selon Guilhem Hugounenc, directeur du cadre de vie à la mairie de Perpignan. « La tempête Gloria avait déjà créé de gros embâcles ». Ces amoncellements de bois morts créent des barrages et représentent un risque réel en cas de nouvelle crue.
On dirait un Mikado !
Ce petit fleuve, si l’on en juge par son débit moyen habituel de 11m3/s (selon Vigicrues), serpente les Pyrénées-Orientales sur 115 kilomètres depuis les Bouillouses, où le cours d’eau prend sa source au pied du Carlit, jusqu’à Canet-en-Roussillon où se trouve son embouchure.La Têt traverse également la ville de Perpignan où depuis plusieurs semaines, les dégâts sont bien visibles, confirme Guilhem Hugounenc, ingénieur paysagiste de formation :
En effet, ces derniers jours, des travaux d’ampleur sont en cours pour dégager les bancs de sable qui ont été déposés sur la route et le long de cette voie de circulation empruntée chaque jour par de nombreux automobilistes perpignanais.On dirait un « Mikado » au pied d’une pile du pont Joffre ! Je n’avais pas vu une telle crue depuis 1993. Le débit du cours d’eau était de 1300 m3/s lors de la Tempête Gloria. On a dû enlever un mètre de sable sur la voie sur berge.
La Têt n'est plus un long fleuve tranquille
Conséquence, le paysage n’est plus du tout le même. L’hydromorphologie a été bouleversée. « Mais que s’est-il passé ici ? » s’exclame un cycliste qui circule le long du fleuve le dimanche après les dernières pluies diluviennes d’avril. Il ne reconnait plus les berges de la Têt.
Vu l’ampleur des dégâts, le Syndicat Mixte du Bassin Versant de la Têt, chargé de l’entretien et de la bonne santé de ce cours d’eau, n’a pas encore eu le temps de procéder au nettoyage.
La Têt souffre d’un manque d’entretien
D’autant plus que cela fait des dizaines d’années que la Têt souffre d’un manque d’entretien. Auparavant, les propriétaires riverains s’en occupaient plus ou moins, souvent moins que plus d’ailleurs. Mais les choses sont en train de changer, car ce jeune syndicat est désormais compétent en matière de travaux depuis le 1er janvier 2019, dans le cadre de la loi GEMAPI (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations).
Suite à la tempête Gloria, Fabrice Carol, directeur du Syndicat Mixte du Bassin Versant de la Têt, a fait une estimation du coût des travaux :
On estime à 900 000 euros hors taxe les travaux à entreprendre. On va lancer un marché public et on compte agir le plus rapidement possible, car il faut veiller à la protection des ouvrages d’art, à la traversée des zones urbaines, aux exploitations agricoles et aux hameaux.
Lors des dernières intempéries, les niveaux d’eau sont montés plus progressivement que lors de la tempête Gloria, mais au final les relevés sont assez proches , poursuit celui qui veille sur la bonne capacité d’écoulement du fleuve.
Le signe d’un changement climatique inquiétant
« Cette année, ajoute Fabrice Carol, je constate que nous avons eu 2 crues très rapprochées. Au printemps, c’est encore plus rare. C’est le signe d’un changement climatique inquiétant. Il y a donc urgence à nettoyer la rivière avant l’automne. Les embâcles du Pont Joffre, où les flots ont atteint jusqu’à 970 m3/s le 22 avril, vont être enlevés sous quinzaine. Idem pour certains passages à gué. ».
Des amas de bois de la taille d’un semi-remorque
Fabrice Carol poursuit : «Certaines de ces accumulations naturelles sont de la taille d’un semi-remorque avec parfois du bois très enchevêtré avec du sable. J’espère que d’ici septembre nous aurons pu enlever un maximum de choses tout en préservant ce milieu naturel. »
Que les riverains ne s’inquiètent pas trop, conclut l’expert chargé de prendre soin de ce patrimoine commun : « s’il reste quelques arbres couchés ou quelques embâcles, c’est le cycle de la vie. Nous laisserons tranquilles ceux qui se désagrègeront seuls, afin qu’ils participent à leur manière à la bonne santé de l’écosystème. »
La Têt est belle, mais c’est un milieu naturel qui peut se réveiller. Le risque de crue existe. Une réalité que les habitants des Pyrénées-Orientales doivent garder à l’esprit.