Témoignage d' Hélène Cristofol, victime de harcèlement moral à l'hôpital d'Albi, "cinq longues années d'humiliation"

Hélène Cristofol exerce au sein du service de médecine nucléaire à l’hôpital d’Albi (Tarn). Elle  avait porté plainte en 2017 contre le docteur Fabrice Rezungles qui vient d’être condamné à 10 mois de prison avec sursis pour harcèlement moral. Ce dernier a fait appel. Témoignage.
 

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Le docteur Hélène Cristofol est aujourd’hui sortie de l’impasse, même si son chef de service, le docteur Fabrice Rezungles condamné pour harcèlement moral a fait appel du jugement du tribunal correctionnel d’Albi. "Comme une délivrance" pour Hélène Cristofol, après des années de souffrance et de combat au sein du service de médecine nucléaire. Récit.

Cinq longues années "d’humiliation"

J’avais la boule au ventre en allant travailler, je ne savais pas comment il allait se comporter, de quelle manière il allait m’agresser verbalement. Je ne dormais plus, j’ai beaucoup perdu de poids, j’étais complètement éteinte, je n’arrivais plus à m’occuper de mes enfants, j’ai eu des idées suicidaires.

Hélène Cristofol, médecin



Hélène Cristofol est entrée à l’hôpital d’Albi en 2010 comme médecin nucléaire, elle a été titularisée comme praticien hospitalier en 2013.
Les relations avec son chef de service le docteur Fabrice Rezungles ont commencé à se dégrader en 2015, lorsque la jeune femme décide de consacrer une partie de son temps professionnel à une activité libérale.
"Il a commencé à ne plus m’adresser la parole, ni me dire bonjour ou au revoir, il y a eu une rupture totale de communication. J’ai essayé de lui parler, d’échanger par mail, rien à faire."

"Exclusion et dénigrement professionnel".  

Hélène Cristofol explique qu’elle est écartée de toutes les réunions et que le médecin n’hésite pas à la rabaisser devant des confrères. Souvent, concernant ses diplômes en cancérologie, allant même jusqu’à déplacer ses rendez-vous professionnels avec ses patients. Elle vit un stress permanent :

Il a demandé à mon secrétariat de déplacer mes rendez-vous pour ne plus que j’ai de patients sur mes vacations, à m’interdire certains types d’examens, notamment ceux en rapport avec la cancérologie, c’était très dur à vivre.

Hélène Cristofol sollicite alors la direction de l’hôpital d’Albi qui engage une médiation sans que les relations s'améliorent. Entre temps, son chef de service est promu chef de pôle. Un statut qui rend encore plus difficile la situation d' Hélène Cristofol.
"Pour mes demandes de congés par exemple il ne répondait jamais, il ne validait pas. Il fallait que j’attende une semaine avant la date butoir et solliciter en vain la direction pour faire valider ces congés."                


Visionnez l'entretien d'Hélène Cristofol avec Miryam Brisse de France 3 Tarn :

La goutte qui a fait déborder le vase

 

J’ai eu une deuxième grossesse compliquée, il m’interdisait même de porter des tabliers de plomb en médecine nucléaire

Hélène Cristofol

Hélène Cristofol poussée à bout n’a pas voulu rendre les armes. Elle aurait pu demander un arrêt maladie ou comme l’ont fait d’autres confrères, quitter ce poste. Mais la jeune femme résiste tant bien que mal jusqu’au jour où elle décide de lui tenir tête, après une violente altercation verbale. Elle portera plainte au commissariat de police d’Albi, le 28 juillet 2017.

J’étais en train de rédiger un courrier après une consultation et ce jour-là alors que le patient allait partir, Fabrice Rezungles énervé dit vouloir prendre ce dossier. C'est une situation que j'ai vécu à plusieurs reprises, je me suis souvent écrasé... mais là j’ai eu un regain de force et je lui ai tenu tête. Il s’est mis en hurler. J’étais tétanisée. Après mes consultations, je suis allée déposer plainte. Et quand le commissariat m'a annoncé queques semaines plus tard, qu'une enquête était ouverte, j'ai vraiment eu l'impression d'être enfin entendue.

Le médecin a entamé une psychothérapie au sein de l'hôpital depuis 2017. Des séances avec un psychologue spécialisé en victimologie.

Protection fonctionnelle à l’amiable refusée par l’hôpital


Après avoir déposé plainte, Hélène Cristofol demande à l’hôpital "une protection fonctionnelle à l’amiable". Il s’agit d’un protocole qui permet de protéger une personne lorsqu’il y a harcèlement moral et d’éloigner le harceleur.

"Cette demande m’a été refusée, j’ai donc engagé une procédure au tribunal administratif que j’ai gagné en juin 2019. L’hôpital avait fait appel de cette décision et avait été débouté en juin 2020. L’hôpital s’est même pourvu en cassation devant le Conseil d’Etat pour lequel il a été débouté en juillet 2020."

Malgré cela, le médecin confie que "l’hôpital n’applique toujours pas cette protection fonctionnelle". Hélène Cristofol ne se sent absolument pas soutenue par sa direction, d’autant plus, dit-elle, que l’hôpital était informé

de ma décision de porter plainte et du caractère récidiviste de mon harceleur. L’enquête le prouve, je ne suis pas la seule dans ce dossier, il y a eu une instruction judiciaire où plusieurs personnes ont témoigné des mêmes agissements. Des médecins, des secrétaires, des manipulatrices en radiologie, il a été mis en évidence que cela était vrai et que je n’étais pas la seule.


"J’ai eu la chance d’être soutenue par ma famille et mes amis. Je devais sortir de cette impasse. Depuis que je suis toute petite je rêve d'être médecin. 10 ans d’étude pour se dire à 35 ans j’arrête... J’ai tenu tête. J’ai vécu des moments très difficiles. Pendant cinq ans, j’ai regroupé des éléments pour prouver que j'étais victime de  harcèlement moral."

Le tribunal correctionnel d’Albi vient de condamner le docteur Fabrice Rezungles à 10 mois de prison avec sursis pour harcèlement moral. Le médecin a fait appel de cette décision.
 
Voici le reportage de M.Brisse et Véronique Galy
 
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