Salles d'isolement, mesures d'hygiène draconiennes destinées à éviter toute contagion, consignes strictes données au personnel hospitalier : à l'hôpital Bichat à Paris, tout est prêt pour recevoir d'éventuels malades porteurs du virus Ebola.
Une porte spécifique est même prévue pour permettre à ces malades de pénétrer dans le bâtiment abritant le service des maladies infectieuses et tropicales (SMIT) sans côtoyer les autres patients.
Alors que des travaux de rénovation étaient en cours, trois chambres d'isolement sur les sept existantes situées au 2e étage, ont été rouvertes ces dernières semaines. D'autres pourraient l'être si le besoin s'en faisait sentir. "Nous sommes devant une situation inédite car il n'y a jamais eu de cas d'Ebola humain en Europe", explique le Pr Elisabeth Bouvet, adjointe au chef de service du SMIT lors d'une visite des lieux.
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L'hôpital Bichat est avec l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière l'un des deux établissements de référence parisiens habilités à prendre en charge un patient atteint de cette fièvre hémorragique très contagieuse qui a fait plus de 900 morts en Afrique de l'ouest depuis mars dernier.
La mobilisation s'est accélérée ces derniers jours, parallèlement au développement de l'épidémie qui accroît chaque jour le risque d'avoir un cas importé de la maladie en France. Les Etats-Unis viennent pour leur part de rapatrier un médecin et une missionnaire infectés.
Une transmission "facile" par contact
Bien que la probabilité pour la France ne soit "pas très élevée", le Pr Bouvet souligne que la transmission est "facile" par contact avec les liquides biologiques du malade et plus particulièrement le sang, l'urine et les vomissements. Elle ne "nécessite pas un contact prolongé", ajoute-t-elle. La peau, les cheveux, les ongles et les muqueuses sont les organes risquant le plus d'être contaminés et des affiches résument les mesures de protection : charlotte sur les cheveux, masque sur la bouche, lunettes de protection, double paire de gants à usage unique, casaque couvrant tout le corps et sur-chaussures.
Les consignes prévoient également que l'habillage et le déshabillage soient faits à deux dans des sas situés de chaque côté de la chambre. Le matériel utilisé est placé dans des sacs destinés à être incinérés et les prélèvements récupérés directement dans de petits monte-charges pour réduire les manipulations.
Les portes s'ouvrent sans contact : il suffit d'approcher la main d'un capteur optique.Les chambres d'isolement sont de surcroît à pression négative (la pression est inférieure à celle existant dans le sas ou dans le couloir), une caractéristique très utile dans les maladies à transmission respiratoire comme la grippe, le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) ou la tuberculose multirésistante.
Bien qu'il y ait très peu de transmission respiratoire du virus Ebola, la pression négative peut s'avérer utile. "Si un patient vomit, rien ne va voler à l'extérieur de la pièce", souligne le Pr Bouvet.
Mais pour l'instant, le SMIT n'a pas encore eu à traiter de cas avéré ou fortement suspect d'Ebola. "Il y a deux ou trois mois, nous avons vu trois ou quatre cas suspects dans le service mais Ebola a rapidement été exclu", précise le médecin. La définition d'un cas suspect est actuellement très large : il suffit, selon l'Institut de veille sanitaire (InVS), qu'une personne présente une fièvre supérieure ou égale à 38°5 dans un délai de 21 jours après son retour d'une zone à risque.
La gestion des cas suspects a été confiée au Centre 15, qui en accord avec d'autres structures sanitaires, décide ou non de les confier à l'un des établissements de référence existant à Paris mais aussi en régions. Si le patient a été exposé à un risque avéré ou s'il présente une forme clinique
grave compatible avec la fièvre Ebola, il devient un cas "possible". Un prélèvement sanguin est alors réalisé par l'hôpital et envoyé à un laboratoire de référence à Lyon, avec un résultat "en principe disponible dans les 12 heures", selon le Pr Bouvet.