Le polémiste Dieudonné a été placé en garde à vue mercredi pour "apologie du terrorisme", après avoir écrit sur Facebook qu'il se sentait "Charlie Coulibaly", en référence à l'un des auteurs des attentats de Paris.
La justice semble déterminée à se montrer intransigeante. Des peines de prison ferme ont été prononcées et depuis l'attentat à Charlie Hebdo la semaine dernière, 54 procédures ont été ouvertes pour ce délit d'apologie du terrorisme ainsi que pour "menaces d'actions terroristes".
L'enquête avait été ouverte lundi au lendemain de la diffusion de ce message, ensuite supprimé. Mercredi matin, toujours sur sa page officielle Facebook, l'équipe du polémiste a publié quelques photos de policiers venant le chercher.
Dieudonné ne s'étant pas rendu à une convocation, les enquêteurs se sont déplacés, a expliqué une source judiciaire. Selon un de ses avocats, Sanjay Mirabeau, "ils ont été impatients, ils sont venus le chercher à sept heures du matin à son domicile."
"Nous sommes dans le pays de la liberté d'expression? Ce matin, le gouvernement vient d'en fournir la démonstration", a ironisé un autre avocat de Dieudonné, David de Stefano.
Le message de l'humoriste controversé avait été diffusé alors que des millions de Français rendaient hommage aux 17 victimes des attentats contre Charlie Hebdo, des policiers et des Juifs.
Dieudonné assurait avoir participé à la marche, mais la tournait en dérision en la qualifiant d'"instant magique égal au Big Bang qui créa l'Univers".
"Sachez que ce soir, en ce qui me concerne, je me sens Charlie Coulibaly", ajoutait-il, associant le slogan de soutien au journal satirique, "Je suis Charlie", au nom d'Amédy Coulibaly, auteur de la prise d'otages au cours de laquelle quatre hommes juifs ont été tués à Paris vendredi.
Dieudonné "a le sentiment qu'on le traite comme un terroriste et c'est pour ça qu'il a accolé les deux noms", a déclaré Me Mirabeau.
Ses fans ont dénoncé sur Facebook une "liberté d'expression sélective". Pour Margot, Dieudonné est attaqué comme s'il était "l'ennemi public n°1".
Déjà condamné pour propos antisémites, Dieudonné a rendez-vous jeudi au Palais de justice de Paris, poursuivi au civil par des associations. En cause, une vidéo de 2010 dans laquelle il mettait en cause "la puissance du lobby juif" et appelait à la libération de Youssouf Fofana, l'assassin d'Ilan Halimi, jeune Juif séquestré, torturé et tué en 2006. Il a été relaxé sur le plan pénal.
Vendredi, un jugement sera rendu dans le dossier où Dieudonné est soupçonné d'avoir fait un appel aux dons pour payer ses amendes.
En septembre, le parquet avait ouvert une autre enquête pour apologie du terrorisme pour une vidéo dans laquelle il ironisait sur la décapitation du journaliste James Foley par l'organisation État islamique (EI).
Le délit d'apologie du terrorisme peut être puni d'une peine allant jusqu'à cinq ans de prison et 75.000 euros d'amende. Elle peut être portée à sept ans et 100.000 euros si les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne.
Le polémiste voit les ennuis s'accumuler. Le gouvernement est parvenu à faire interdire plusieurs de ses spectacles fin 2013-début 2014. Il est sous la menace d'une demande d'expulsion du théâtre de la Main d'or à Paris, où il se produit depuis 15 ans.
Cette semaine, plusieurs villes ont demandé l'interdiction de son nouveau spectacle. Celui qui se veut un héraut de l'"antisystème" est par ailleurs mis en examen notamment pour fraude fiscale.
Selon la Chancellerie, depuis les attaques, quinze procédures ont également été ouvertes pour des tags et dix pour des dégradations "par arme, incendie ou explosion" sur des mosquées et des lieux de cultes musulmans.
Onze procédures ont été enfin ouvertes pour des tracts et des propos anti-musulmans, dix-neuf pour des infractions commises contre les forces de l'ordre et quatorze pour des cyber-attaques.