Systématiquement, méticuleusement, dès 1941 et jusqu'à 1945, les Soviétiques ont mis en images la barbarie nazie, la Shoah. Un patrimoine historique unique très peu montré dans son ensemble, qui fait l'objet de l'exposition "Filmer la guerre" au Mémorial de la Shoah à Paris jusqu'au 27 septembre
Dès 1941, à mesure des mouvements et des avancées de l'Armée Rouge, les autorités soviétiques ont envoyé des centaines d'opérateurs de prises de vues, photographes et cinéastes connus ou inconnus, pour filmer et mettre en images à la fois la guerre, le front, mais aussi, et systématiquement, méticuleusement, les horreurs, les atrocités, les massacres et le génocide que l'armée soviétique découvrait peu à peu sur les territoires occupés par les nazis. Cette politique délibérée de mettre en images, de montrer à tous a eu plusieurs objectifs, de mobilisation, de renforcement du sentiment national mais aussi, bien sûr et très souvent, de propagande politique.
Arrivés à Moscou, les milliers de bobines tournées ont fait l'objet de tris, de montage, d'exploitations multiples, en fonction du public auquel les images s'adressaient. Beaucoup ont servi, et beaucoup d'autres n'ont jamais été montrées. Dans un premier temps, par exemple, le message que ces images ont véhiculé ne faisait pas apparaître la dimension génocidaire systématique à l'encontre des juifs. La nécessité de propagande aux yeux des autorités soviétiques était alors ailleurs.
Mais avec le temps et l'histoire, ces archives filmées, dont la quantité et la nature sont uniques, prennent une autre ou plutôt d'autres dimensions. Elles constituent désormais la plus importante trace de ce qui s'est produit au coeur du 20ème siècle. Elle constituent l'un des plus importants livres d'histoire de cette période. Et font aujourd'hui l'objet d'une grande exposition au Mémorial de la Shoah, à un moment où ressurgit trop souvent et avec insistance la tentation de l'oubli