Éducation : devant la réforme des lycées professionnels, les syndicats vent debout

Ils dénoncent notamment la réduction des heures d’enseignement général au profit de l'augmentation des heures de stage en entreprise. Une nouvelle manifestation est prévue ce jeudi 17 novembre après-midi à Paris.

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C’est l’un des grands chantiers évoqués par Emmanuel Macron lors de la dernière campagne présidentielle : la réforme du lycée professionnel. "Je crois dans le lycée professionnel sinon je n’aurais pas décidé d’en faire une des réformes phares", déclarait le candidat devenu président dans une vidéo diffusée sur sa chaine YouTube.

Seulement, les syndicats d’enseignants ne l’entendent pas de cette oreille. Beaucoup s’opposent à cette réforme. Mardi18 octobre, une première manifestation a eu lieu. Plusieurs milliers de personnes, principalement des professeurs, ont défilé à Paris et dans d'autres villes de France pour exiger le retrait du projet de réforme, à l'appel d'une large intersyndicale.

Plus d'heures en entreprises

Principal grief contre la réforme : l'augmentation des heures de stages dans les entreprises d'au moins 50%, qui réduirait les heures d'enseignement théorique.

Actuellement, selon le site Eduscol, la durée des stages de formation professionnelle est de 12 à 14 semaines pour un CAP (5 semaines minimum pour un CAP en un an), et de 18 à 22 semaines réparties sur trois ans de formation pour les baccalauréats professionnels. Ces stages peuvent également être réalisées à l'étranger. Les programmes offrent des enseignements généraux (français, mathématiques, physique-chimie, histoire-géographie, langues vivantes...) et des enseignements professionnels théoriques et pratiques qui permettent l’acquisition de connaissances, de techniques, de méthodes, de savoir-faire et de postures professionnelles.

"Si un élève va plus longtemps en stage, c’est moins de temps qu’il passera au lycée pour suivre l’enseignement général", réagit Didier Georges, élu au SNPDEN-Unsa (Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale). "On ne peut pas avoir des priorités telles qu’affichées par l’État sur l’enseignement professionnel avec des élèves cultivés, éveillés sur un certain nombre de choses, et en même temps prendre de telles décisions." 

Il indique par ailleurs que "dans ce projet, la concertation a trouvé ses limites", et explique : "quand nous avons rencontré la ministre, elle nous a fait comprendre que les éventuelles marges de discussions ou de négociations syndicales ne portaient pas sur le fond du projet présenté, mais sur les annexes. Le fond avait été décidé par le président de la République". "La méthode peut nous interroger", s'exclame-t-il.

"Les élèves en lycée professionnel sont majoritairement issus des quartiers populaires, et les lycées professionnels ont été malmenés ces dernières années. Et là, c’est la cerise sur le gâteau", explique Éric Cavaterra, secrétaire du syndicat SNUEP-FSU Paris. "Cette réforme aligne le lycée professionnel sur l’apprentissage. Elle donne plus de place à l’entreprise au mépris du lycée professionnel et de l’enseignement général", explique-t-il. M. Cavaterra met en avant qu'"il y a une indignation au sein de la profession et une crainte vis-à-vis des élèves".

Besoins de savoirs fondamentaux

Les syndicats disent aussi refuser la diminution des heures d'enseignement général et les suppressions de postes induites, la perte du cadre national des grilles horaires et une révision des cartes de formation "au seul prisme des intérêts économiques particuliers des entreprises sur les secteurs d'activité en pénurie de main-d'oeuvre."

"Les élèves ont besoin de plus d'école. Les élèves qui sont en lycée professionnel manquent essentiellement de savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter, argumenter, réfléchir", explique Pascal Vivier, secrétaire général du SNETAA-FO, premier syndicat des professeurs de lycées professionnels. Il estime que cette réforme équivaut à "sortir les lycées professionnels de l'école de la République".

"Pour nous, l'enseignement professionnel permet de former l'Homme, le Citoyen, le Travailleur, alors que là, on ne propose de ne former plus que des travailleurs. Nos élèves ont besoin de savoirs fondamentaux, d'un minimum culturel, d'un minimum commun afin d'avoir les codes de la société et de l'entreprise. Et cela, l'entreprise ne peut pas le leur donner, car il s'agit d'enfants", explique-t-il.

"Si vous permettez aux élèves d'avoir plus de stages, vous permettez de résoudre une difficulté des entreprises. Mais actuellement, les entreprises ne veulent pas nos élèves, car ils n'ont pas les codes nécessaires pour y être", indique Pascal Vivier. Pour lui, "l'apprentissage fonctionne pour l'enseignement supérieur, BTS, Licence Pro, dernière année d'école d'ingénieur. Il ne fonctionne pas au niveau CAP et Bac Pro, parce que les entreprises ne veulent pas ces jeunes qui ne sont pas assez formés. Et le rôle du lycée professionnel, c'est de leur faire acquérir les savoirs fondamentaux et les techniques des métiers et des compétences dont les entreprises ont besoin".

Quatre groupes de travail

Depuis un mois, la ministre déléguée chargée de l'Enseignement et de la Formation professionnels, Carole Grandjean, a lancé "quatre groupes de travail" sur cette réforme impliquant des représentants syndicaux, des régions, des parents d'élèves, des établissements, des entreprises ou encore des collectivités. Ils doivent se réunir jusqu'aux vacances de Noël, avant des conclusions fin février et une deuxième phase de construction de la réforme ensuite.

Mais dès le premier rendez-vous, malgré un souci d'apaisement du ministère, les principaux syndicats, Snetaa-FO, la CGT et le Snuep-FSU (qui représentent près de 70% des personnels enseignants), n'ont pas souhaité y prendre part, dénonçant "une réforme imposée de manière autoritaire et pyramidale".

"Ce sont des temps de verbiages et de bavardages (...) qui ne correspondent pas aux besoins des entreprises, ni des élèves, ni des professeurs", indique Pascal Vivier.
"Face à la forte opposition des personnels, la ministre, malgré quelques infimes concessions, ne renonce pas en réalité à son projet. Elle persiste à vouloir imposer plus de stages aux élèves", regrette l'intersyndicale dans un communiqué. 

Aujourd'hui de nombreux établissements professionnels sont fermés. A Paris, les manifestants se sont données rendez-vous place de la Sorbonne à 14 heures pour rejoindre le ministère de l'Education nationale.

Avec AFP

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