Un élu CGT a écopé d'une mise à pied de deux mois ce mercredi. La direction de la Ratp l’accuse d’avoir participé au blocage d'un dépôt de bus lors des grèves contre la réforme des retraites. Un autre élu risque le licenciement pour le même motif.
Un autocollant CGT collé à la veste, Ahmed Berrahal affiche fièrement son appartenance syndicale. Elu CGT et chauffeur de bus à la Ratp depuis 16 ans, il se revendique comme un "syndicaliste combatif". Un esprit pugnace à l’origine, selon lui, de sa convocation en conseil de discipline ce mercredi. "Je dénonce beaucoup, même pendant le confinement sur l'absence de masques, les bus pas aux normes... Ils veulent en finir avec moi, une fois pour toutes !", déplore ce représentant syndical, habitué des différents avec sa direction. Il risquait aujourd’hui le licenciement, il écope finalement de deux mois de mise à pied.
Accusé d'avoir bloqué un centre de bus
Chauffeur de bus au dépôt de Flandres à Pantin, il a tenu le piquet de grève tout l’hiver contre la réforme des retraites. "Je suis un meneur de grève oui mais je ne suis pas le meneur des personnes qui sont venues bloquer les dépôts", plaide-t-il. Pendant la mobilisation, en plus des salariés Ratp grévistes, des étudiants, des professeurs avaient rejoint le piquet de grève et empêché les bus de sortir. La direction de la Ratp le tient pour responsable. "La direction dit que j’ai ramené ces gens-là pour bloquer les dépôts mais moi je ne les connaissais pas avant cette grève historique. Ils sont venus d’eux-mêmes manifester pendant deux mois avec nous sur un piquet de grève. Ils me reprochent de ne pas leur avoir dit de ne pas bloquer le dépôt. Mais moi je ne suis pas de la police, ce n’est pas à moi de leur dire ça !", se défend-il.
Plus de 200 personnes étaient venues le soutenir ce mercredi, des militants CGT de différentes branches professionnelles, des enseignants et des étudiants présents aux piquets de grève en décembre. "On a lutté ensemble au moment du mouvement contre la réforme des retraites. Et en fait les enseignants comme moi, on a très vite voulu lutter de façon interprofessionnelle, donc on a été soutenir aussi les agents RATP devant les dépôts de bus", explique une enseignante présente au rassemblement ce mercredi. "Ça me choque et je viendrai à chaque fois le dire et soutenir ceux qui sont attaqués pour des faits de grève.", poursuit-elle.
Dans la foule, cette après-midi, il y avait aussi Alexandre El Gamal, machiniste receveur au dépôt de Vitry, élu Cgt et secrétaire CSE. Lui aussi aurait du être convoqué à un conseil de discipline cette après-midi mais l’audience a été reportée. "On nous reproche des faits de blocage de bus mais ce n’est pas fondé ", affirme-t-il.
"Une remise en cause du droit de grève" selon le syndicat
"C’est une remise en cause du droit de grève. Ils essayent de nous imposer une certaine terreur pour ne plus qu’on rentre en mouvement et ne plus qu’on puisse porter nos revendications", dénonce Alexandre El Gamal. Convoqué pour la première fois de sa carrière en conseil de discipline, il ne sait pas encore quand l'audience se tiendra.
En janvier, trois autres salariés syndiqués CGT avaient été convoqués pour un "entretien préalable à sanction". La direction les accusait d'avoir insulté un collègue de travail non-gréviste et tenu des propos homophobes lors de la mobilisation contre la réforme des retraites à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). Deux avaient été mis à pied quelques mois. Le troisième avait écopé d’une mutation disciplinaire et avait tenté de se suicider quelques jours plus tard.
La direction de la Ratp a bien confirmé "la tenue d'un conseil de discipline relatif à des faits de blocage d'un centre Bus pendant le mouvement social de décembre et de menaces et injures vis-à-vis du personnel travaillant" mais n’a pas souhaité répondre à nos questions.
Ahmed Berrahal, soulagé d'avoir évité le licenciement prévoit tout de même de contester sa mise à pied aux Prudhommes.