Rixes en Essonne : un concours d'éloquence pour guérir les maux par les mots

Une quinzaine de jeunes étaient réunis lundi soir à Evry-Courcouronnes pour participer à un concours d'éloquence organisé par l'association Expressions de France et le département de l'Essonne.

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L’Essonne est depuis plusieurs mois confrontée à un phénomène de rixes entre bandes rivales. Ayant pour origine des différends territoriaux ou un simple regard de travers, elles ont déjà causé la mort de plusieurs adolescents. Des violences qui ont à la fois ému et choqué les Franciliens.

Pour tenter d’éviter de nouvelles tragédies et apaiser les tensions, le Département et l’association Expressions de France ont organisé un concours d’éloquence lundi soir avec une quinzaine de jeunes essonniens venus de différents quartiers. L’objectif est ainsi de guérir les maux par les mots. Le président du Conseil départemental de l’Essonne François Durovray a indiqué sur Twitter que cette initiative faisait la promotion "du concret mais surtout du dialogue". Le thème de ce concours d’éloquence était "Et si c’était à refaire?". Autrement dit, si vous aviez la possibilité de revenir en arrière, que feriez-vous ?

"Pacifier la confrontation"

Par la musique, le rap, ou une simple lecture de texte, l’objectif de ces jeunes est d’exprimer leur sentiment, leur vécu, leur douleur. D’éviter que les armes ne parlent à la place de la bouche. Les jeunes participants ont ainsi profité de l'occasion pour faire entendre leur voix. Ce concours d’éloquence s’inscrit dans le cadre des initiatives prises par le Département durant "l’Eté jeunes" — des activités culturelles, sportives, citoyennes, scientifiques et d’éducation à la santé destinées aux Essonniens âgés de 9 à 16 ans. "Nous avons voulu aborder la question de l’inter-quartier et demander à ce qu’on travaille sur la question de la violence", précise François Durovray. "On a voulu montrer aux jeunes la capacité de s’élever au-delà de leur propre condition, et qu’on peut passer des messages à d’autres personnes sans s’invectiver de façon brutale. Le but est de pacifier la confrontation qui peut arriver", ajoute-t-il.

Ces jeunes se reconnaissent plus dans leur quartier que dans leur propre identité.

Ismaël M’Baye, Président-fondateur de Expressions de France

"Ce concours vise à recréer du lien et rétablir du dialogue entre ces jeunes qui vont dans les mêmes lycées et les mêmes centres commerciaux et qui sont pourtant prêts à en découdre, parfois jusqu’à la mort (…) Ces jeunes se reconnaissent plus dans leur quartier que dans leur propre identité", nous confie Ismaël M’Baye, président-fondateur d'Expressions de France et enseignant-chercheur en droit public. "Ce concours nous a permis de faire des constats. Il faut trouver des solutions. Et en responsabilisant ces jeunes-là, on leur donne la possibilité de s’investir dans la vie de la cité. La première étape était qu’ils puissent travailler tous ensemble et ils se sont rendus compte que c’était faisable", ajoute-t-il.

La gagnante du premier prix du concours a été la jeune Sinem. Elle vient du quartier des Tarterêts, à Corbeil-Essonnes. "Elle est partie du premier drame qu’il y a eu en 1998 entre les Tarterêts et les Pyramides. Elle relate la méritocratie. Et que, quelles que soient nos origines, on peut y arriver", explique Ismaël M’Baye.

"Première saison"

Ce concours semble également apparaître comme un bon moyen de pallier le manque d’efficacité de la part des pouvoirs publics dans les problèmes sécuritaires auxquelles fait face le département. "C'est une certitude (...) Ce qui interesse ces jeunes, c'est d'être associés à des projets, d'être considérés", estime l'association. "Il faut apaiser les tensions entre la police et la population. Ce genre d’initiative peut y participer", explique François Durovray. "Nous n’excluons d’ailleurs pas de faire participer des policiers et des jeunes des quartiers à des concours d’éloquence pour avoir des joutes entre eux, à fleuret mouchetés, et basés sur la richesse et la subtilité de la langue française", ajoute l'élu essonnien.

Ce concours d’éloquence n’est que la conclusion d’une "première saison" des ateliers évoqués plus haut. "Dans la saison 2, on va aborder les sujets qui leur tiennent à cœur  : l'homophobie dans les quartiers, le racisme ordinaire qu'ils subissent au quotidien ou encore le rapport tendu avec la police", poursuit-il.

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