Gare du Triangle de Gonesse : le maire de Gonesse demande à Emmanuel Macron de trancher

Près d'un an après l'abandon par l'Etat d'Europacity, méga-complexe touristique prévu sur 80 hectares, les habitants de l'Est du Val-d'Oise attendent toujours un projet alternatif. Et s'inquiètent de perdre en plus la gare du Triangle de Gonesse. Le gouvernement, lui, reste muet. 

Le maire de Gonesse fulmine. Presque 10 ans d'espoir, "rayés d'un trait de plume". Jean-Pierre Blazy ne voit toujours rien venir, et redoute une poursuite de la "traversée du désert" de son territoire. Depuis 2011, il misait tout sur Europacity. Mais le 7 novembre 2019, Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique a dit "stop" à ce projet qui devait, d'ici à 2027, engendrer "l'artificialisation de 80 hectares de terres agricoles". Depuis, rien. Malgré les promesses, le gouvernement ne propose aucune alternative. Ce qui rend également incertaine la réalisation de la gare du Triangle de Gonesse sur la ligne 17 du Grand Paris Express.
 


Gonesse voulait concurrencer Paris en termes de destination touristique. Europacity, c'est un projet que l'on imaginait à Dubaï. 80 hectares dédiés aux loisirs, à la culture et aux commerces : parc aquatique, salles de spectacle, ferme urbaine, musées, magasins, des dizaines de restaurants et 2 000 chambres d'hôtel. Un nouveau quartier, qui devait se construire au milieu des champs du Triangle de Gonesse, à 20 km de Paris. Mais neuf ans après la naissance du projet dans les bureaux parisiens d'Immochan, l'Etat n'en a plus voulu. "Abandonnant notre territoire à un taux de chômage qui ne cesse de gonfler", dénonce Jean-Pierre Blazy, le maire PS de Gonesse dans un nouveau courrier envoyé à l'Elysée fin septembre.

L'avenir de la ligne 17 en question

Sa grosse inquiétude, comme celle de nombreux élus et acteurs économiques du Val-d'Oise, c'est la remise en cause de la seule gare du Grand Paris Express du département : la station "Triangle de Gonesse" de la ligne 17. D'après des acteurs proches du dossier, cette gare avait été négociée il y a 10 ans entre Immochan, filiale immobilière du groupe Auchan à l'origine d'Europacity, et l'Elysée qui lançait alors son Grand Paris Express. Immochan aurait accepté d'investir 3 milliards d'euros à quelques pas de Villiers-le-Bel et des autres quartiers qui avaient flambé pendant les émeutes de 2007 pour y apporter du développement économique... à condition qu'une gare rapporte des milliers de visiteurs chaque jour. 
 

Mais 9 ans plus tard, Europacity a disparu. Alors pourquoi faire une gare au milieu des champs? 

Les opposants historiques à Europacity estiment que le combat n'est pas terminé. Tant que la gare du Grand Paris Express n'est pas supprimée, le risque d'urbanisation perdure. Les militants écologistes se sont battus pendant des années contre Europacity parce qu'il représentait un nouveau temple de la consommation, mais surtout pour préserver les terres agricoles. Et avec les besoins en circuits courts plébiscités pendant le confinement, ils ont le vent en poupe. Même si les champs de blé, maïs et betteraves sont survolés par les avions de Roissy. 

Le Triangle de Gonesse représente 680 hectares. 400 hectares resteront agricoles et ne peuvent pas être urbanisés. Le débat porte donc sur les 280 hectares restants.  

Un projet économique mais pas écologique

Fruit de la mobilisation anti-Europacity, le projet Carma (coopération pour une ambition agricole, rurale et métropolitaine d'avenir) propose de faire de cette zone le point de départ d'une ceinture maraîchère et agro-forestière de l'Ile-de-France : des champs, des maraîchers employeurs de main d'œuvre, des centres de transformation pour alimenter des cantines scolaires, des fermes expérimentales. Un projet qui n'a aucun intérêt à voir une gare de métro automatique. Et reciproquement. Comment rentabiliser une station de métro avec une activité agricole ? 

L'inquiétude des partisans de cette gare, c'est que le projet Carma a trouvé une oreille très attentive chez Francis Rol-Tanguy. Ce haut fonctionnaire à la retraite a été chargé par Emmanuel Macron de proposer des alternatives. ll a rencontré des dizaines d'acteurs locaux entre décembre et juin 2020.
 

Le 15 juillet, il a remis un dossier à la nouvelle ministre de la transition écologique Barbara Pompili avec trois scénarios possibles - deux avec la gare et un sans gare :
1/ La poursuite du projet de Zone d'activité économique sur les 280 hectares. Mais il trouve cela beaucoup trop "gros" en cette période de marasme économique.
2/ Un scenario avec une ZAC sur les 110 hectares qui appartiennent à l'EPA (étalissement public d'aménagement) Plaine de France et sont donc constructibles rapidement.
3/ Un scénario sans la gare du triangle de Gonesse qui laisse les terres agricoles.

Pour le chargé de mission nommé par le Gouvernemnet, ce troisième scénario est le plus valable. "L'annulation d'Europacity était un symbole. Si on artificialise les terres avec d'autres projets économiques, alors ce symbole se perd. Le Triangle de Gonesse peut être le point de départ d'une mutation agricole de notre région. Ce serait un symbole fort". 
 

"Dans certains quartiers, le chômage des jeunes dépasse les 40%! Europacity nous garantissait des milliers d'emplois directs et indirects."

Pierre Kuchly, président de la Chambre de commerce et d'industrie du Val-d'Oise.



Pour de nombreux valdoisiens, l'abandon de la Gare du Triangle de Gonesse symboliserait au contraire l'abandon d'un territoire déjà très fragile. "Dans certains quartiers, le chômage des jeunes dépasse les 40%!", s'affole Pierre Kuchly, président de la Chambre de commerce et d'industrie du Val-d'Oise. Europacity nous garantissait des milliers d'emplois directs et indirects. On ne s'oppose pas à l'écologie mais le maraîchage ne créera jamais autant d'emplois!".

Des discussions organisées par la CCI

La CCI a organisé plusieurs rencontres entre le monde économique et les parlementaires valdoisiens pour proposer au gouvernement des alternatives. Mais la question de la gare du Triangle de Gonesse reste une inconnue du taille. Les entrepreneurs ont évidemment du mal à se projeter dans une zone dont on ne connaît pas la desserte en transports en commun. 

Même la Societé du Grand Paris est suspendue aux lèvres de l'Elysée et du gouvernement. Car au milieu des champs, cette gare n'aurait aucun sens. Mais personne ne sait ce que Paris imagine pour Gonesse. Car depuis l'abandon d'Europacity, les ministres et leurs cabinets ont changé. Et la Covid et son urgence sanitaire sont passés par là. Jean-Pierre Blazy essaie de rebondir en proposant à Emmanuel Macron de relocaliser l'industrie pharmaceutique dans l'Est du Val-d'Oise, d'en faire une zone d'innovation technologique et médicale. Mais il n'a pas de réponse. L'Elysée reste muet. Tout comme le cabinet de Barbara Pompili, qui malgré nos multiples relances, n'a aucun agenda à nous communiquer sur l'avenir du Triangle de Gonesse. 

 
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