L'arrivée à Paris du leader britannique des guides de sorties pourrait mettre à mal les historiques du secteur.
Time Out, le célèbre éditeur britannique qui liste sorties et bons plans des capitales du monde, arrive à Paris en version numérique, son avantage sur les sites bien établis comme Evene ou Allociné : la possibilité de réserver en ligne ciné ou théâtre. Les guides papiers ont, eux, vu leur vente fortement chuter ces dernières années.
Pour son lancement à Paris, le groupe d'édition créé en 1968 et déjà présent dans 37 villes et 25 pays, se tourne pour la première fois sur le seul web. Aucune version papier n'est donc envisagée pour l'instant, sauf éventuellement dans un format hors série.
"Nous nous tournons vers le web pour des raisons économiques. Le web est un modèle beaucoup plus rentable, il permet un lancement plus modeste, plus flexible, une mise à jour instantanée des sorties à faire", explique Anane Ahmed-Chaouch, responsable marketing de Time Out Paris.
Cette stratégie devrait également offrir au groupe de nouvelles sources de revenus avec le développement d'une plate-forme de vente de billets en ligne, prévue pour la fin 2012.
"Pour l'instant, nos revenus proviennent principalement des espaces publicitaires et des commissions de booking. Notre nouvelle plateforme interne sera plus ambitieuse car elle évitera de passer par du tiketing local, comme la Fnac par exemple", souligne Anane Ahmed-Chaouch.
Un secteur très concurrentiel
La vente des billets en ligne pourrait offrir à Time Out un avantage par rapport à ses nombreux concurrents sur le marché français comme Evene, qui fonctionne en partenariat avec la Fnac, ou AlloCiné, Télérama, les Inrocks et My Little Paris qui ne proposent pas ce service.
En terme d'audience, Time Out Paris vise les 800.000 visiteurs uniques par mois d'ici à l'année prochaine. Pour l'instant, ils disent en être à près de 250.000 visiteurs, après six semaines de lancement.
Ce lancement axé sur le web n'étonne pas Jean-Marie Charon, chercheur au CNRS et historien des médias, pour qui le secteur de la presse de sortie et de loisirs finira par passer "entièrement" au numérique. "Le coeur de l'activité du secteur, c'est désormais le web. Il est plus facile à consulter, intègre l'économie de la recommandation, propose une aide au choix et offre un contenu interactif, comme des vidéos incitatives pour des spectacles", analyse-t-il.
Tous les sites spécialisés dans l'annonce d'événements culturels donnent désormais la parole aux internautes par des systèmes de notation, de commentaires et de boutons de partage sur les réseaux sociaux.
Le déclin du papier
Face à eux, de 2006 à 2011, L'Officiel des spectacles, guide hebdomadaire parisien en papier, est passé de 101.647 à 60.397 exemplaires, une chute de plus de 40%, selon l'OJD. Pour réagir, le titre s'est doté d'un site internet qui reprend le même contenu et propose un service de billetterie en partenariat avec la Fnac.
Même chute du tirage de son concurrent Pariscope, tombant de 85.911 exemplaires à 55.017 (-36%) sur la même période. Sa stratégie web se cantonne pour l'instant à un simple partenariat avec le site de Première.fr, qui appartient comme lui au groupe Lagardère.
Face à cette mutation, les acteurs historiques doivent repenser leur offre. Mais même Time Out, qui a fait le choix d'un lancement tout numérique à Paris avec un site, une application mobile et une présence sur les réseaux sociaux, a du mal à se défaire du papier.
"Le papier, c'est notre identité. Si aujourd'hui on prend un tournant digital à Paris, c'est aussi pour pouvoir faire vivre le papier qui est le produit initial de Tony Eliot, le fondateur du groupe. Donc le magazine et les guides perdureront chez Time Out", insiste Anane Ahmed-Chaouch.