Alors que le Conseil de Paris vote mardi l’attribution de la citoyenneté d’honneur à Kiev, certaines municipalités franciliennes ont décidé de leur côté de suspendre leur jumelage avec des villes russes. Mais qu’impliquent ces décisions symboliques ?
La distinction est censée "témoigner de la solidarité de Paris envers la capitale ukrainienne, aujourd'hui assiégée par les forces armées russes". Alors que que le Conseil de Paris s’apprête à voter l’attribution de la citoyenneté d'honneur à Kiev, la Ville de Paris explique avoir "conjointement décidé" avec la capitale ukrainienne que cette mesure symbolisait "le geste le plus fort pour incarner leur amitié". "Résistants à une attaque d'une violence inouïe, les habitants de Kyiv (NDLR : le nom ukrainien de la capitale, Kiev correspondant à son appellation russe) tout comme son Maire, Vitali Klitschko, font preuve d'un courage et d'un sang-froid exceptionnels", souligne la mairie.
La décision a une portée honorifique, explique Arnaud Ngatcha, l’adjoint d’Anne Hidalgo (PS) en charge des relations internationales : "L’attribution de la citoyenneté d'honneur est une décision qui est mise en œuvre depuis une vingtaine d’années. L’objectif est d’apporter une aide symbolique, les moyens d’action d’une ville ne pouvant évidemment pas être d’ordre militaire."
"C’est à Paris qu’ont été signées la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen en 1789 et la Déclaration universelle des droits de l’Homme en 1948, poursuit Arnaud Ngatcha. La ville symbolise le respect des droits de l’homme. L’image de la capitale véhicule ces valeurs. Attribuer la citoyenneté d’honneur permet de les mettre en avant. L’objectif est aussi d’apporter une protection, de venir en défense de ces libertés. Il s’agit également d’envoyer un signal dans le cas de Kiev, pour que Paris devienne une ville-refuge pour tous les Ukrainiens et les Ukrainiennes."
Kiev, première ville qui se voit attribuer la citoyenneté d’honneur de Paris
Arnaud Ngatcha indique que si l’attribution est validée par un vote du Conseil de Paris, la mesure fait "la plupart du temps" l’objet d’un consensus : "Mon travail est de proposer à la maire des profils de choix. La maire de Paris décide ensuite de soumettre son choix au vote. Ce n’est pas une décision qui tombe comme un couperet, on en discute avant avec les groupes politiques de la majorité et de l’opposition. Mais il peut arriver que la maire fasse un choix politique plus personnel, comme avec l’ancien président brésilien Lula en 2019."
Il arrive également que la Ville de Paris décide de faire marche arrière. C’est le cas pour la Birmane Aung San Suu Kyi : sa citoyenneté d’honneur, reçue en 2004 pour son engagement envers la démocratie dans son pays, a en effet été retirée en 2018, en raison de son silence face aux violences infligées à la minorité Rohingya.
Parmi les plus récentes attributions, qui datent de 2020, on peut citer le Dr Denis Mukwege, gynécologue congolais et militant des droits humains, et les Egyptiens Alaa Abdel Fattah, Esraa Abdel Fattah, Patrick George Zaki et Solafa Magdy. Nelson Mandela en 2013, Íngrid Betancourt en 2002… Si la distinction concerne principalement des personnalités, elle a aussi été remise à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris en 2019, à la cause de la biodiversité en 2016 ou encore à Charlie Hebdo en 2015. Kiev est, elle, la première ville qui se voit attribuer la citoyenneté d’honneur.
Orly et Pantin suspendent leur jumelage avec des villes russes
Pour soutenir l’Ukraine face à l’invasion décidée par Vladimir Poutine, d’autres municipalités franciliennes ont, elles, récemment décidé de suspendre leur jumelage avec des villes russes. C’est le cas d’Orly (Val-de-Marne) avec Kline, une ville située à une centaine de kilomètres de la capitale russe. "Le jumelage est suspendu le temps du conflit", confirme la mairie d’Orly. L’association avec la ville russe date de 1979, sous l’impulsion du maire PCF d'alors, Gaston Viens. Outre Kline, Orly - dont la maire est aujourd’hui Christine Janodet (DVG) - est également jumelée avec Pointe à Pitre en Guadeloupe, Campi-Bisenzio en Italie, et Turnu-Severi en Roumanie.
Au-delà d’un panneau installé à l’entrée de la commune, le comité de jumelage d'Orly explique sur son site que l’association implique une série de coopérations dans des domaines variés : "sorties culturelles en rapport avec les quatre villes", "apprentissage des langues" et autres "échanges culturels, sociaux, économiques, et sportifs". Avec, comme objectifs affichés, "l'amitié entre les peuples", "le renforcement de la paix dans le monde", "l'acceptation de l'autre en tant qu'être humain" et "le développement durable et solidaire".
"Tout était stoppé depuis le Covid, il n’y avait déjà plus d’échanges culturels et sportifs", précise-t-on toutefois du côté de la mairie d’Orly, qui souligne que le jumelage est un dispositif "symbolique avant tout". La Ville de Pantin (Seine-Saint-Denis), associée à Moscou depuis 1966, a aussi suspendu officiellement son jumelage.