Concentré sur cinq jours, l'événement a été maintenu malgré la crise sanitaire, avec une série de précautions. Aurore boréale projetée en pleine capitale, pluie artificielle au son de "Purple Rain" de Prince, lectures… Reportage au lycée Jacques Decour, vendredi soir.
L’illusion, projetée dans le ciel à quelques mètres au-dessus du public, est assez saisissante. Présentée en plein Paris, dans une cour du lycée Jacques Decour (IXe arrondissement), l’installation Borealis – qui imite une aurore boréale, en pleine capitale – fait partie des œuvres à expérimenter au cours de cette 20e édition du festival Paris l’été. Une édition particulière, réduite à cinq jours, au lieu des trois semaines habituelles.
Lancé mercredi, l’événement (gratuit) se déroule en extérieur et en petit comité, avec une jauge proche des 500 spectateurs – tous masqués, malgré une température dépassant les 30 degrés ce vendredi soir. Mais après le confinement et de longs mois de crise sanitaire, Borealis semble être une bonne occasion pour rêver un instant, affalé sur un transat.
Créée en 2016, l’œuvre a été imaginée par le Suisse Dan Acher. "Sans vouloir dévoiler toute la magie, on crée des strates de lumière dans le ciel, sauf que ces strates sont invisibles à l’œil, explique l’artiste. On insère dans l’air des petites particules qui voyagent dans l’air et dans le vent. Et donc ça dépend entièrement de la chaleur, de l’humidité et du vent, et l’effet se transforme continuellement."
"Je travaille dans le spectacle, et ça me manque"
L’installation, qui a déjà voyagé en Australie, au Japon ou encore en Angleterre, vise entre autres à poser question vis-à-vis de la géo-ingénierie, autrement dit le contrôle humain de l’environnement et du climat. Même si sa création devait à l’origine s’installer au Louvre, autour de la pyramide, Dan Acher est satisfait d’avoir pu – malgré le contexte compliqué – la faire découvrir à Paris dès cet été : "On a tellement été contraint à vivre dans des petits espaces et là on parle d’immensité, en plein air".Du côté du public, on trouve surtout des Parisiens. Xavier, régisseur lumière et régisseur général dans les théâtres, vient pour la première fois au festival, accompagné par sa fille Suzanne. "On n’est pas à Paris à cette période-là d’habitude, raconte-t-il. Je travaille dans le spectacle, et ça me manque. Il y a eu le chômage partiel et heureusement l’année blanche maintenant, mais quand Avignon a été annulé, ça été un peu compliqué. Et la visibilité sur l’année prochaine est très inquiétante."
Si Xavier trouve le festival "un peu léger dans l’ensemble, en termes de propositions, même si la lecture tout à l’heure était super", Joëlle, une habituée, juge que "c’est très restreint, mais par la force des choses". "C’est quand même bien que ça perdure, explique la spectatrice, âgée de 66 ans. J’ai recroisé des visages que je connais depuis longtemps. C’est bien que les spectacles recommencent, ça fait partie de la vie."
"Quand on a senti une petite accalmie, on s’est dit qu’il fallait réagir tout de suite"
Même sentiment du côté de Laurence De Magalhaes, la codirectrice du festival, maintenu après avoir été annulé dans un premier temps en avril, en plein cœur de la crise. "Quand on a senti une petite accalmie, on s’est dit qu’il fallait réagir tout de suite, qu’on allait vivre comme ça pendant longtemps, défend-elle. On a saisi l’opportunité. Et on est super contents d’avoir sauvé l’édition. On sent que le climat est dur en ce moment, les gens sont inquiets, angoissés… On a tous souffert de cet enfermement."Danse, théâtre participatif… Cette édition 2020 est aussi l’occasion de (re)découvrir Purple Rain, une installation créée pour la Nuit Blanche 2011, en hommage au morceau de Prince, et au film éponyme d’Albert Magnoli ; tous deux sortis en 1984. Armé d’un parapluie (après s’être désinfecté les mains au gel hydroalcoolique), le spectateur se balade dans une cour inondée par une pluie artificielle et une couleur violette. Le tout, bien entendu, avec la fameuse chanson en bande-son.