Alors qu’Anne Hidalgo dénonce la fermeture "de 178 classes dans les écoles primaires", des parents d’élèves et des enseignants du XVIIe arrondissement alertent sur le transfert d’une "UPE2A" : un dispositif dédié aux élèves allophones pour apprendre le français.
Certains enfants sont ukrainiens, d’autres viennent de Gambie ou encore de Colombie. Dans le XVIIe arrondissement de la capitale, des parents et des enseignants dénoncent la décision du rectorat de transférer l’unité pédagogique pour élèves allophones arrivants (UPE2A) de l’école élémentaire Bessières. Une pétition publiée par l’association des parents d'élèves de cet établissement situé au 92 boulevard Bessières réunit à ce stade près de 1300 signatures.
"C’est un dispositif d’accompagnement qui permet d’accueillir des enfants venus d’autres pays, explique une enseignante de l’école, qui témoigne de façon anonyme. Ces enfants sont intégrés aux classes avec les autres élèves du CP au CM2, et bénéficient d’heures spécifiques pour apprendre le français, à l’écrit et à l’oral. Parmi les enfants, il y a toutes les catégories sociales, même si beaucoup viennent de familles défavorisées et vivent en hébergement d’urgence."
"Ce transfert est demandé pour la deuxième année de suite, raconte-t-elle. L’an dernier, on avait réussi à faire annuler la décision avec le soutien du maire, l’établissement censé accueillir l’UPE2A faisait l’objet de travaux de désamiantage."
"Ça serait un vrai désastre"
17 enfants âgés de 6 à 11 ans sont concernés. "Cette année, le transfert imposerait aux élèves un trajet aller-retour d’une heure par jour, vers une autre école située au 16 rue du Colonel Moll, poursuit l’enseignante. Le tout en prenant le RER, puis le tram ou le bus, puis 10 minutes à pied… Ce n’est pas la porte à côté, c’est à l’opposé de l’arrondissement", indique l’enseignante.
"Il s’agit en majorité d’élèves qui n’étaient pas scolarisés antérieurement, ça demande un attention particulière pour favoriser l’apprentissage, ajoute-t-elle. Nous sommes en REP (réseau d’éducation prioritaire), donc les élèves sont actuellement dans des classes dédoublées de 15 élèves maximum du CP au CE1, et de 25 élèves maximum jusqu'en CM2. Avec le transfert, ils seraient noyés dans la masse avec des classes de 30 élèves potentiellement. Ça serait un vrai désastre. Les élèves sont motivés, ils ont envie d’apprendre. Les parents nous disent que le dispositif est une chance pour leurs enfants."
"Le rectorat justifie cette décision en évoquant une surcharge de travail, alors que les élèves concernés sont répartis entre les classes", précise-t-elle. Les enseignants accompagnés de parents d’élèves et de syndicats sont passés en commission deux fois - le 14 février puis ce lundi 6 mars - pour défendre le maintien de l’UPE2A.
Anne Hidalgo appelle à "sortir de la logique purement statistique du Gouvernement"
Dans une lettre adressée aux parents d’élèves et publiée ce mardi sur Twitter, Anne Hidalgo dénonce "la fermeture dès la prochaine rentrée scolaire de 178 classes dans les écoles primaires et la suppression de 182 postes d'enseignants dans les collèges et lycées", soit l’équivalent de "19 écoles et 3 collèges". La maire de Paris, qui pointe du doigt une "atteinte majeure au service public", annonce son soutien "aux mobilisations de la communauté éducative pour obtenir l'annulation de ces décisions" du rectorat.
"Selon l'Académie de Paris, ces fermetures de classes seraient motivées par la baisse de démographie qui se constate partout en France, et notamment dans les grandes villes. C'est au contraire une chance à saisir puisque, tous les experts le disent, des effectifs réduits sont la garantie de meilleures conditions pour apprendre, en particulier dans les écoles, en réseau d'éducation prioritaire et dans les quartiers populaires. C'est la meilleure aide que l'on puisse apporter aux élèves les plus fragiles, souvent confrontés à des difficultés sociales et scolaires", écrit Anne Hidalgo.
L’élue appelle aussi à "repenser l'école dans son ensemble pour y laisser plus de place à des pédagogies ouvertes, collectives, innovantes, et favoriser ainsi l'épanouissement de nos enfants", mais aussi à "prendre en compte la diversité des élèves et leur mixité sociale et scolaire". Pour l’édile, il s’agit de "défendre l'école publique, permettre à chaque enfant parisien d'avoir accès à la réussite scolaire, et faire vivre ainsi concrètement la promesse républicaine".
Contacté à propos de l’école Bessières, le rectorat de l’académie de Paris n’a pas répondu à ce stade à nos questions.
Après publication de l'article, nous avons appris lundi soir l'annulation du transfert de l'UPE2A de l'école Bessières, de source syndicale.