Maîtres d’hôtel, cuisiniers, hôtes... 300 professionnels de la restauration événementielle et de l'accueil ont bloqué tôt ce matin le périphérique parisien. Avec la crise sanitaire, beaucoup n'ont plus de travail. Ils demandent à être reconnus comme intermittents de la restauration.
"Cela fait 8 mois qu’on essaie d’être entendus et que rien ne se passe malgré nos nombreuses actions. Ce matin on a décidé de taper fort avec cette action non déclarée. Pour montrer notre détresse. Beaucoup d’entre nous n’ont plus de revenus ou de droits. J’en fait partie". Nathalie a répondu à l’appel de l’OPRE, l'Organisation du personnel de la restauration dans l’événementiel. Avec 300 de ses collègues, elle a bloqué ce matin le périphérique parisien.
PARIS - Blocage du périphérique par les extras, les maîtres d’hôtels et cuisiniers de la restauration.
— Clément Lanot (@ClementLanot) October 13, 2020
Ils dénoncent leur situation financière extrême depuis le #COVID19 pic.twitter.com/XwDkEeOVIM
Nathalie, 35 ans, élève seule son fils. Dans les bons mois, avant la crise sanitaire, elle gagnait en moyenne 3000 euros mais aujourd'hui, difficile de joindre les deux bouts. Depuis le mois de septembre, en fin de droits, elle ne touche plus d’allocations chômage. "Depuis le confinement, l’événementiel a été stoppé. Il n’y a plus de travail. Pour vivre, je demande de l’aide à ma famille, je puise dans mon épargne, je fais attention. Je ne mets plus mon fils à la crèche. J’ai fait une demande au RSA", témoigne-t-elle.Il n’y a plus de travail. Pour vivre, je demande de l’aide à ma famille, je puise dans mon épargne, je fais attention.
"Monsieur, il va falloir vous habituer à vivre avec le salaire de votre femme. Vous n’aurez droit à rien. Vous êtes en fin de droits". Voilà comment Thierry Claudios, 56 ans, maître d’hôtel extra depuis 30 ans nous résume son dernier rendez-vous à Pôle Emploi. "Je servais pour des réceptions en entreprise, dans des mairies, des ministères, des entreprises publiques. J’ai beaucoup travaillé en janvier. Puis l’épidémie de la covid est arrivée. Tout s’est arrêté. J’arrive à l’épuisement de mes droits", explique t-il. Ce père de famille sait qu’il a de la chance. "Il y a un salaire qui rentre à la maison. Je ne suis pas dans la pire des situations car je suis en famille mais certains ont rendu leur logement, sont retournés vivre chez leurs parents", dit-il.
L'appel au secours de l'OPRE
Comme Nathalie ou Thierry, ils sont entre 15 et 20 000 en France, 7 000 en Île-de-France, à travailler dans la restauration événementielle et à se retrouver aujourd’hui en situation de précarité. Hôtesses et hôtes d'accueil, cuisiniers, maîtres d'hôtels, serveurs... Depuis le mois de mars 2020, à cause de l’épidémie de Covid-19, ils ne travaillent pratiquement plus. Plus de réceptions, de salons professionnels, de cocktails, de fêtes de mariages. Certains ont épuisés leurs droits au chômage. D’autres se retrouvent au RSA.L’OPRE qui regroupe les cuisiniers et les maîtres d’hôtels de la restauration événementielle souhaite alerter l’État. "On a fait plusieurs actions médiatiques depuis le mois de mars. On nous reçoit. On a eu des rendez-vous au ministère du Travail, on nous écoute, on reconnaît nos difficultés mais malheureusement rien n’est fait pour nous. Nous ne rentrons pas dans les cases d'aides aux entreprises. Nous sommes dans une impasse juridique. On n’appartient à aucun employeur. En 2014 notre statut a changé et aujourd’hui on est comme n’importe quel chômeur. Comme nous n’avons pas travaillé, nous n’avons pas pu recharger nos droits. Et ils s’épuisent jours après jours", détaille Nicolas, un des 3 fondateurs et porte-parole de l'OPRE. "Si la réforme de l’assurance chômage rentre en vigueur en janvier prochain ce sera l'hécatombe", prévient-il.
Proposition de loi : retrouver le statut d'intermittent de la restauration
Aujourd’hui, les professionnels de la restauration événementielle souhaitent revenir à leur statut d’intermittent perdu en 2014 et bénéficier, comme les intermittents du spectacle, d’une année blanche. Ils sont soutenus par Xavier Iacovelli, sénateur LREM des Hauts-de-Seine. Ancien traiteur de métier, il connaît bien ce domaine d'activités. Il est à l’origine d’une proposition de loi en cours de finalisation à ce jour et qui devrait être déposée devant les deux chambres très prochainement.Ancien de la restauration, il comprend la colère de ces professionnels, même si en temps que parlementaire, il ne cautionne pas l’opération escargot non déclarée de ce matin. "J’étais à leurs côtés lors des premières manifestations notamment à l’Hôtel de Ville de Paris et donc je peux comprendre cette action coup de poing. Il est nécessaire que l’on se mette autour d’une table avec la ministre du Travail pour étudier leur situation. Revenir à un statut d’intemittent de la restauration est l’une des hypothèses. En tous les cas, il faut les protéger et leur donner un statut particulier", soutient-il.
Selon le journal Le Monde dans un article publié aujourd'hui, "l'événementiel génère 34,5 milliards d’euros de retombées économiques directes et indirectes en France, en faisant travailler agences d’événementiel, d’hôtes, de maîtres d’hôtel, de sécurité, d’audiovisuel, entreprises de nettoyage, traiteurs, décorateurs".
En France avec l'annulation des salons professionnels, la chute du tourisme d'affaires et l'interdiction d'événements, plus de 3 milliards d'euros de chiffres d'affaires ont été perdus depuis la crise sanitaire.