Trente étudiants franciliens bénéficient d'un programme d'insertion professionnelle inédit : une formation tous frais payés pour devenir testeur de jeux vidéo. Un métier très demandé mais plus exigent qu'il n'y paraît.
Dans la zone dédiée au Made in France de la Paris Games Week, les quelques jeunes d'Avenir en jeu, la nouvelle formation qui prépare au métier de testeur de jeux vidéo, se distinguent dans la foule avec leurs T-shirts éponymes.
Si parmi eux certains désespéraient de trouver leur voie ou de se trouver au chômage faute de diplôme, ils peuvent désormais souffler. "J'ai toujours eu pour projet de créer mon jeu, mais je ne pensais pas que c'était possible. J'ai eu cette opportunité en or, ça me plaît, je veux continuer", raconte Ryan, 25 ans.
Les trente étudiants ont été recrutés sur des critères géographiques (uniquement à Paris et en Seine-Saint-Denis), mais également sur des critères sociaux puisqu'ils appartiennent à la catégorie des NEET, comprenez sans emploi, ni formation, ni diplôme. En 2019, 12,9% des 15-29 ans étaient dans cette situation, selon l'Insee.
Un projet original initié par la région Ile-de-France, dans le cadre de son plan d'investissement dans les compétences, et porté par les associations de professionnels du jeu Capital Games et Horizon Jeu Vidéo Ile-de-France.
Le paradis du geek
"Cette formation est une première expérimentation qui a pour but de promouvoir la mixité et la diversité dans le jeu vidéo et de permettre à des jeunes qui n'ont pas forcément les moyens financiers nécessaires de pouvoir intégrer une école de jeu vidéo", explique Camille Rivière, la chef du projet.
Une façon d'accompagner ces jeunes vers l'emploi, avec une formation qui ne leur coûte rien, et pour laquelle ils sont rémunérés par la région à hauteur de 500 euros par mois. Loin des 4 à 9 000 euros par an que demandent les écoles privées de gaming.
Je savais que ces formations existaient, mais je pensais que c'était un milieu très fermé dont je ne pouvais pas faire partie
Samuel, étudiant
Un véritable tremplin pour favoriser l'égalité des chances, comme le confie Samuel qui vient d'intégrer le programme: "Je savais que ces formations existaient, mais je pensais que c'était un milieu très fermé dont je ne pouvais pas faire partie".
Depuis un mois, ils sont encadrés par des professeurs et des intervenants dans les locaux de l'Ecole de la 2e chance de Paris, où ils suivent une remise à niveau sur des matières telles que le français, les mathématiques ou l'anglais.
Un parcours spécifique aux jeux vidéo a également été créé pour eux. "Ils ont deux mois de découverte dans la culture du jeu vidéo avant de commencer véritablement cette formation de sept mois. Ce qui leur laisse le temps de voir si ce n'est qu'un passe-temps ou s'ils veulent en faire leur métier", précise Camille Rivière.
Pas de diplôme, mais de l'emploi
"Pour l'instant il n'existe pas de diplôme ou de certificats de testeur", explique la chef de projet, sans que cela soit un frein à leur insertion professionnelle. "Ce métier est très demandé par les entreprises. Ils sont assureurs de qualité, c'est à eux de détecter les moindres failles d'un jeu", poursuit-elle.
"Il faut fouiller dans tous les recoins, dans tous les paramètres comme le son par exemple. Vérifier que la manipulation de la manette est bonne, qu'un coffre s'ouvre bien ou que notre personnage parvient à traverser le mur par exemple", détaille la jeune femme.
Mais ce n'est pas tout, puisque les testeurs ont également pour rôle de sécuriser le jeu et de s'assurer du bon respect des normes commerciales. "Ils doivent garantir la sécurité des joueurs, pour voir si le jeu ne fait pas crasher* l'ordinateur ou si certaines scènes ne représentent pas un danger pour des personnes épileptiques". Des compétences exigeantes et nécessaires dans ce milieu porteur, qui employait, en 2021, 1 400 personnes, uniquement en Ile-de-France.
Une véritable opportunité pour ces futurs professionnels, qui leur permet d'allier passion et travail. "J'étais en BTS comptabilité mais ça ne me plaisait pas. Cette formation c'est le rêve, ça me permet de faire ce que j'ai toujours aimé, les jeux vidéo", raconte Iliès, 22 ans.
Mais également de promouvoir la mixité dans le secteur, avec une sous-représentation des femmes. Selon le syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs, un joueur de jeu vidéo sur deux est une femme alors qu'elles ne sont que 22% dans le secteur professionnel.
Un bon moyen, donc, de tendre vers plus d'égalité des chances avec l'espoir que cette formation pilote soit renouvelée en 2023.