Alors que les opposants au pass vaccinal des "convois de la liberté" ont rejoint samedi les Champs-Elysées malgré l’interdiction de manifester, des tensions ont eu lieu avec les forces de l'ordre.
De nombreux véhicules contrôlés, et des centaines d'amendes. Alors que des milliers ont campé aux portes de Paris dans la nuit de vendredi à samedi, les voitures, camionnettes et camping-cars des "convois de la liberté" ont repris ce matin la direction de la capitale. Et ce malgré l’interdiction de manifester, maintenue par la justice.
Le mouvement rassemble des personnes opposées au gouvernement et au pass vaccinal, en vigueur depuis le 24 janvier. "On a beaucoup de revendications, affirme un manifestant, de passage à Fontainebleau (Seine-et-Marne) tôt ce matin, sur la route de Paris. Le pouvoir d’achat, un manque de représentativité démocratique… Il y a des élections dans pas longtemps, on va exprimer notre colère dans la rue et pas dans les urnes."
On est des gilets jaunes de la première heure
Un manifestant des "convois de la liberté"
"On est des gilets jaunes de la première heure, explique un autre manifestant, au volant de sa camionnette. On revendique un pouvoir de mieux vivre. Et aujourd’hui, avec ces restrictions sanitaires, on a perdu aussi nos libertés." Certains s’opposent à la vaccination.
Face à l'arrivée de ces "convois de la liberté", près de 7 200 policiers et gendarmes ont été mobilisés en Île-de-France.
"Entrave ou gêne à la circulation" : la préfecture de police a maintenu ce samedi le dispositif mis en place "pour faire respecter l'interdiction des convois de véhicules". Un dispositif de sécurité "renforcé" a été lancé à proximité des Champs-Elysées, avec la présence de blindés de la gendarmerie.
Contraventions, fumigènes et dépanneuses
La PP indique que des "consignes de fermeté" ont été données aux policiers et aux gendarmes pour "faire respecter l'interdiction de manifester".
Les forces de l’ordre ont mené plusieurs interventions hier soir et cette nuit à la porte de Vincennes (avec 21 verbalisations), à la porte de Bagnolet et de Pantin, dans le XVIe arrondissement (avec 15 véhicules verbalisés), à la porte d’Orléans avec 40 verbalisations. "Les forces de l'ordre ont mis fin rapidement au regroupement de manifestants qui tentaient d'enjamber le boulevard du périphérique", raconte la PP.
Les opérations de la police se sont poursuivies ce samedi matin, avec 20 véhicules interceptés à la porte de Champerret, et 20 autres à la porte Maillot. 450 véhicules ont également été interceptés au niveau de la porte de Saint-Cloud avec, encore une fois, des verbalisations.
Des manifestants ont tenté de bloquer la place de l'Etoile, provoquant l’intervention des forces de l’ordre afin de disperser les protestataires. Des véhicules se sont par ailleurs réunis sur la place de la Concorde pour bloquer les lieux, rapporte franceinfo.
"Aucun blocage ne sera toléré", a répété la préfecture de police sur Twitter. Les forces de l'ordre ont notamment utilisé de gaz lacrymogènes mais aussi de dépanneuses dans le secteur des Champs-Élysées pour "retirer les véhicules gênants". Des tensions ont eu lieu entre CRS et manifestants.
Jérôme Rodrigues interpellé
Jérôme Rodrigues, figure des gilets jaunes et soutien des "convois de la liberté", a été interpellé près de l'Elysée, selon l’AFP. Il s'est revendiqué sur les réseaux sociaux comme faisant partie des organisateurs des convois.
En fin d’après-midi, les forces de l’ordre ont annoncé "l’interception d'un convoi de 300 véhicules sur l'A4, avant l'échangeur de Bercy". Des manifestants avaient lancé une opération escargot, avec des tracteurs. Selon un bilan global communiqué dimanche par la PP, les forces de l'ordre ont procédé samedi à 97 interpellations et 513 verbalisations. Les tensions se sont poursuivies dans la soirée : les forces de l'ordre sont intervenues dans la nuit de samedi à dimanche dans le secteur des Champs-Elysées et du bois de Boulogne pour verbaliser et disperser des manifestants.
A noter que des manifestations anti-pass étaient par ailleurs autorisées : l’une rassemblant des gilets jaunes place d'Italie, l’autre organisée par le parti Les Patriotes de Florian Philippot, place du Palais Royal.
Face aux manifestations, Anne Hidalgo, maire PS de Paris et candidate à la présidentielle, a réagi en appelant à agir avec "fermeté" pour que "l'ordre règne" dans la capitale. En déplacement en Guadeloupe, l’élue a également appelé à éviter un cycle similaire à celui des gilets jaunes en 2018, qui était "extrêmement dur pour les Parisiens, et d'une façon générale dans le pays".
Pour quels motifs les manifestants sont-ils verbalisés ?
Dans un communiqué publié jeudi, la PP rappelle que les organisateurs d'une manifestation interdite peuvent être punis de six mois d’emprisonnement et d’une amende de 7 500 euros. Les participants, eux, sont susceptibles d'être verbalisés d'une contravention de 135 euros.
Que risque une personne qui bloque une route ? "Le fait d'entraver ou de gêner une voie ouverte à la circulation est passible de : deux ans d'emprisonnement ; 4 500 euros d'amende ; l'immobilisation et la mise à la fourrière du véhicule utilisé pour commettre le délit d'entrave ; la réduction de moitié du nombre maximal de points sur le permis de conduire ; une suspension du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus", souligne la PP, en se reportant au code de la route.
A noter également que les forces de l’ordre ont interpellé sur la place Denfert-Rochereau des personnes "munies de fronde et de matériel de protection", et deux autres manifestants "en possession de bidons d'essence, marteaux, couteaux".
Un mouvement inspiré du blocage d'Ottawa par des camionneurs canadiens
Le mouvement des "convois de la liberté" s’inspire du blocage du centre-ville d’Ottawa - la capitale fédérale du Canada - par des centaines de camions, pour protester contre les restrictions liées à la crise sanitaire. Des actions lancées fin janvier par des camionneurs dénonçant l'obligation vaccinale mise en place pour traverser la frontière avec les Etats-Unis.
Les manifestations se sont étendues à Toronto, Québec et d’autres grandes villes du pays, mais aussi à plusieurs axes frontaliers. En Europe, le mouvement concerne également la Belgique et l’Autriche.
Pour ce qui est de la France, la préfecture de police a indiqué "maintenir sa vigilance" dimanche, avec "des contrôles renforcés tout au long de la journée" notamment dans le secteur des Champs-Elysées.