Il avait été surnommé le "mur de la honte" dès sa construction en 2021. Située dans le square Forceval, ancien lieu de consommation de crack, l’édification en parpaings qui sépare Paris de Pantin pourrait être prochainement détruite.

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C’était un lieu majeur de la consommation de crack à Paris. Un no man’s land squatté jour et nuit par près de 400 toxicomanes, l’un des visages de la misère dans la capitale. Cinq mois après le démantèlement du campement situé square Forceval, la vie semble avoir repris son cours dans ce quartier du nord de Paris. Les abris de fortune et les détritus qui jonchaient le sol ont disparu du paysage. Nettoyé en profondeur, le parc a entrepris sa métamorphose avec la plantation d'arbustes et la mise en place prochaine d'équipements sportifs. De l'époque du camp, ne reste que quelques patrouilles de policiers pour empêcher toute réinstallation. Et deux murs de parpaings érigés à la va vite, sous un tunnel, par la préfecture de police en septembre 2021. C'était à l'époque, la solution pour empêcher le passage des fumeurs de crack vers Pantin. C'est aujourd'hui, un stigmate que les habitants aimeraient voir disparaitre pour de nouveau pouvoir circuler librement. "Le symbole est bien évidement désastreux. On ne peut pas gérer l’espace urbain en édifiant des murs. Nous avons besoin de créer du lien dans nos villes, pas de construire des murs," reconnaît François Dagnaud, le maire PS du 19e arrondissement.

Lors du conseil municipal du 8 mars, les élus du 19e arrondissement ont voté pour la réouverture et la réhabilitation du tunnel Forceval. "Le mur n’avait pas vocation à durer. Tout le monde souhaite aujourd’hui voir le passage ouvert, poursuit François Dagnaud qui tempère toutefois : "les usagers de crack ne sont plus là mais cela reste un lieu où sont présentes toutes les formes de précarité : on a des ventes à la sauvette, des gens qui errent. Il faut que les conditions de sécurité et de salubrité soient réunies." 

Un vœu relayé par les écologistes au conseil de Paris. Les élus parisiens ont voté ce mercredi en faveur de la destruction du mur de séparation du square Forceval. 

"À la suite de l’installation d’une scène de crack à ciel ouvert square Forceval à la porte de La Villette, la Préfecture de police avait décidé de murer le tunnel qui permet de relier Paris à Pantin, de relier ces deux communes limitrophes, pour la modique somme d’environ 35 000 euros. Ce mur est toujours là. Il est vécu par les riverains comme une humiliation. Il est d’ailleurs communément appelé le mur de la honte (…)", a ainsi relayé la conseillère Alice Timsit : "nous proposons de lancer un appel à manifestation d’intérêt pour occuper le terrain et proposer quelque chose aux habitantes et aux habitants de manière à ce qu’ils puissent se réapproprier le site."

"Redonner vie" à la porte de la Villette 

D'une largeur de 11,80 mètres, le tunnel Forceval pourrait accueillir un "tiers lieu" tout en garantissant un passage pour les cyclistes et les piétons selon les élus. Ils demandent que le coût de cette remise en état soit supporté par la préfecture de police. "Sur le principe, nous ne sommes pas opposés à la réouverture du tunnel de Forceval", a répondu la sous-préfète présente hier dans l'hémicycle. Inquiète que le site ne soit de nouveau squatté, Elise Lavielle a suggéré d'accompagner cette démolition d’aménagements tels que des éclairages ou des caméras de vidéosurveillance pour "renforcer la sécurité passive""Sur les coûts de destruction des murs et de remise en état du tunnel, l’État ne peut être mobilisé que pour les dépenses liées à l’exercice de la police active. En dehors de cette hypothèse, les dépenses des services de la Préfecture de police relèvent du budget spécial (...) La déconstruction se ferait sur ce budget."

Un parc funéraire en projet

Aucune date n’a été communiquée sur cette prochaine réouverture du tunnel mais à Pantin, certains habitants s'en réjouissent déjà. "Ce mur, c'est un symbole sinistre. On veut qu'ils deviennent un lieu de vie, de joie, de beau, un lieu de fête qui reflète nos quartiers multiculturels et multiethniques. Pourquoi ne pas en faire un lieu de rencontre de toutes les cultures du monde à l'occasion des Jeux Olympiques ?" suggère Dominique Gamard, membre du collectif SOS Quatre-Chemins qui avait milité pour l'évacuation du campement de Forceval. Un collectif qui entend bien être associé aux futurs projets pour le site. "Pendant un an, ce mur a été un symbole de mort. Nous voulons la destruction de ce mur mais pour un projet de vie. Or, la seule chose qu'on nous a proposé pour le moment, c'est un crématorium qui implique l'abattage de 50 arbres. La mort encore alors que nous avons à Pantin le plus grand cimetière d'Europe, " fustige Dominique Gamard.

Voté en Conseil de Paris en 2018 et largement contesté, ce projet de crématorium a été mis en pause. Mais pas abandonné. A Pantin comme dans le 19e arrondissement de Paris, les riverains se disent attentifs au devenir du square Forceval. Et prêts à se battre encore une fois s'il le faut.

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