Vous êtes Francilien et âgé de plus de 16 ans ? Vous êtes alors concerné par une consultation publique sur les nuisances aériennes du 11 au 24 mars prochain. Élus franciliens et associations de riverains souhaitent ainsi améliorer leur cadre de vie et répondre à l’urgence climatique.
Plus d’un million et demi. C’est le nombre d’habitants potentiellement concerné par les nuisances aériennes en Île-de-France selon l’étude "Survol" de Bruitparif, l’observatoire régional du bruit. Le 2e système aéroportuaire européen – après Londres – est Francilien, avec deux aéroports internationaux, Orly et Roissy - Charles-de-Gaulle.
"Insupportable", "le couvre feu n'est pas respecté", "une horreur", "impossible de manger l'été dehors" : nombreux sont les habitants de Villeneuve-le-Roi, dans le Val-de-Marne, à nous témoigner leur agacement face aux nuisances aériennes, liées à la proximité immédiate avec l'aéroport d'Orly. "Certains disent qu'on s'y habitue, mais c'est faux", souffle Hanane Aries, habitante de cette commune depuis huit ans. "C’est tout simplement un enfer. [...] Nous sommes constamment dérangés par le bruit."
C’est tout simplement un enfer. Nous sommes constamment dérangés par le bruit
Hanane Aries, habitante de Villeneuve-le-Roi, à proximité de l'aéroport d'Orlyauprès de France 3 Paris Île-de-France
"Pour votre santé et face à l’urgence climatique", une consultation publique aura lieu du 11 au 24 mars 2024 autour d’une question : "souhaitez-vous la réduction des vols et leur interdiction entre 22h et 6h sur les aéroports de Roissy-CDG, Orly, Le Bourget et Beauvais-Tillé ?".
Le réseau DRAPO – pour Défense Riverains Aéroport Paris-Orly – regroupant communes et associations de riverains, ainsi que le collectif d'élus pour le climat contre le Terminal 4 de l’aéroport Roissy-CDG (CECC T4) sont à l’origine de cette consultation.
Gonnesse, dans le Val-d'Oise, Longjumeau ou Yerres, dans l'Essonne, ou encore plus étonnant, Courbevoie dans les Hauts-de-Seine... Nombreuses sont les communes franciliennes à soutenir l'initiative, dont certaines vont proposer un vote "manuel et traditionnel" avec une urne à disposition en mairie selon le réseau DRAPO.
Je n’entends plus les oiseaux depuis bien longtemps [...] Je ne me suis jamais habitué à ces horribles nuisances
Patrick Pontes, habitant de Villeneuve-le-Roi, à proximité de l'aéroport d'Orlyauprès de France 3 Paris Île-de-France
"Je n’entends plus les oiseaux depuis bien longtemps", témoigne Patrick Pontes, habitant de Villeneuve-le-Roi (Val-de-Marne) qui ne s’est "jamais habitué" aux nuisances "horribles" du trafic aérien sur sa commune, l’une des plus touchées d’Île-de-France. "Je le vis très mal au quotidien".
En 2021, Bruitparif évalue le coût social du bruit aérien en Île-de-France à près de 4,1 milliards d’euros par an. En revanche, le coût social associé au bruit routier reste le plus important, s’élevant à 18,1 milliards d'euros par an. "Bien évidemment, dans un environnement urbain il y a d’autres bruits, mais l’avion est majoritaire à proximité des aéroports", relève Gérard Bouthier, président du réseau DRAPO et habitant de Yerres (Essonne), une commune également sous le ballet incessant des avions.
L'année précédente, Santé publique France relevait que les résultats de l’étude DEBATS – pour Discussion sur les Effets du Bruit des Aéronefs Touchant la Santé – suggéraient "des effets délétères" de l’exposition au bruit aérien sur la qualité du sommeil, les systèmes cardiovasculaire et endocrinien, les troubles psychologiques ou encore "l’état de santé perçu".
Vers un allongement du couvre-feu à Orly ?
"Nous considérons qu’il faut, premièrement, allonger le couvre-feu", demande Gérard Bouthier. Vingt-deux ans qu’il milite pour une meilleure prise en compte de la qualité de vie des riverains de l’aéroport d'Orly.
Un couvre-feu instauré en 1968 interdit décollages et atterrissages, respectivement après 23h15 et 23h30, et ce, jusqu'au lendemain matin 6h. "Paris-Orly est la seule plateforme aéroportuaire dotée d'un couvre-feu car elle s'est développée dans un tissu urbain existant. L'aéroport est au milieu des villes", note Gérard Bouthier.
L'État réfléchirait à un allongement de 30 minutes du dispositif selon des informations du Parisien. "Nos efforts commencent à porter leurs fruits", avait réagit Grégoire de Lasteyrie sur Facebook, président de la communauté d'agglomération Paris-Saclay et maire de Palaiseau, dont la ville "militera" aux côtés de la DRAPO pour la mise en place "du meilleur scénario" pour les riverains.
Paris-Orly est la seule plateforme aéroportuaire dotée d'un couvre-feu car elle s'est développée dans un tissu urbain existant
Gérard Bouthier, président du réseau DRAPO, et habitant de Yerresauprès de France 3 Paris Île-de-France
Le président du réseau DRAPO n'hésite pas à préciser qu'il signale "depuis vingt ans" qu'il faut "diminuer le nombre d’avions au moment où ce bruit est le plus ressenti". Il assure qu'il est plus important de "jouer" sur la durée d'exposition plutôt que sur une simple réduction du trafic entre 23h et 23h30. Gérard Bouthier propose de suivre les recommandations de l'OMS, soit un sommeil d'une durée de huit heures, et ainsi un couvre-feu "entre 22h et 6h".
Le collectif d'élus pour le climat contre le Terminal 4 de l’aéroport Roissy-CDG (CECC T4) avait également appelé le gouvernement en mai dernier à "prendre des mesures fortes en faveur de la réduction des nuisances aériennes", en vain.
Des riverains ont été appareillés autour des aéroports pour voir comment ils réagissent à ces bruits répétitifs
Gérard Bouthier, président du réseau DRAPO, et habitant de Yerresauprès de France 3 Paris Île-de-France
Le réseau DRAPO demande à ce que des mesures soient prises afin que le trafic aérien autour d’Orly "n’entraîne pas autant de problèmes de santé". À l’origine insuffisamment évaluées, les conséquences du bruit aérien sont mieux étudiées depuis le lancement en 2009 de l’étude épidémiologique DEBATS – pour Discussion sur les Effets du Bruit des Aéronefs Touchant la Santé – par des chercheurs de l’université Gustave Eiffel (Seine-et-Marne) et pilotée par l’autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA).
"Des riverains ont été appareillés autour des plateformes aéroportuaires avec des capteurs chez des personnes avec ou sans pathologies connues, pour voir comment ils réagissent à ces bruits répétitifs", détaille Gérard Bouthier.
En septembre dernier, l'ACNUSA avait signalé "une augmentation du nombre de manquements délibérés" sur le couvre-feu de l'aéroport d'Orly, soit des retards et des vols déroutés sur Roissy-CDG. "Après, l'avion revenait le lendemain matin à vide à Orly, c'était scandaleux", juge le président de la DRAPO.
Aujourd’hui, le Yerrois demande au secteur aérien un retour "à une situation normale" pour ces personnes "qui perdent des années de vie en bonne santé". Il espère pouvoir "poser sur le bureau du nouveau ministre" des Transports Patrice Vergriete les résultats de la consultation.