Après 10 mois de débat et 148 journées d'audience, la cour d'assise spéciale de Paris s'est retirée pour délibérer. Pour ce dernier jour, comme le veut la procédure, la parole était aux accusés. Le verdict est attendu mercredi soir.
"Les débats sont terminés", a déclaré le président Jean-Louis Périès à l'issue de cette 148e et ultime journée d'audience. "L'audience est suspendue, elle reprendra normalement le mercredi 29 juin 2022", a-t-il ajouté.
Comme le prévoit la procédure, il a auparavant donné la parole aux 14 accusés présents devant la cour. Six autres, dont cinq présumés morts, sont jugés en leur absence.
"Mes premiers mots seront pour les victimes"
Salah Abdeslam, le seul membre encore en vie des commandos ayant causé la mort de 130 personnes à Paris et à Saint-Denis le 13 novembre 2015 a présenté ses excuses aux victimes : "Je vous ai présenté mes excuses. Certains vous diront qu'elles sont insincères, que c'est une stratégie (...) comme si des excuses pouvaient être insincères à l'égard de tant de souffrance." (...) "La perpétuité est sans doute à la hauteur des faits, mais pas à la hauteur des hommes qui sont dans le box", a-t-il affirmé.
Et de poursuivre : "L'opinion publique pense que j'étais sur les terrasses occupé à tirer sur des gens, que j'étais au Bataclan. Vous savez que la vérité est à l'opposé", (...) "J'ai fait des erreurs, c'est vrai, mais je ne suis pas un assassin, je ne suis pas un tueur. Si vous me condamniez pour assassinat vous commettriez une injustice."
L'accusation a requis contre lui la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, la plus lourde sanction prévue par le code pénal qui rend infime la possibilité d'une libération.
14 co-accusés présents
Ses coaccusés s'étaient levés tour à tour avant lui pour redire leurs "regrets" ou "excuses" et "condoléances" aux victimes pour certains, et remercier leurs avocats. "Je fais confiance à la justice", "j'attends beaucoup de votre verdict", ont aussi dit plusieurs d'entre eux."
Sofien Ayari est sorti de son silence pour ce dernier jour du procès. "Pour ma défense, franchement je ne sais pas quoi dire car, depuis le début du procès, si on se défend on a une défense de 'vendeur de shit', si on se tait c'est faire preuve de mépris envers les parties civiles, si on ne comparaît pas c'est irrespectueux, si on comparaît c'est un manque de respect aussi", commence le Tunisien.
Et d'ajouter : "Je ne sais pas comment me défendre car, quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, ça manque toujours de sincérité", fait valoir le Tunisien de 28 ans, tee-shirt noir et longue barbe brune.
S'il sort de son silence au dernier jour du procès c'est, dit-il, pour regretter que le "contexte" de la révolution tunisienne et des printemps arabes n'ait pas été pris en compte lors des débats, et pour répondre à l'accusation qui a assimilé son silence à du "mépris".
"Dans ma vie, j'ai aimé, j'ai détesté, parfois très, parfois trop, mais j'ai jamais ressenti du mépris pour qui que ce soit. Je ne vois pas où on a vu du mépris dans mes propos, dans mon attitude", affirme Sofien Ayari."
Le ministère public a requis la perpétuité assortie d'une période de sûreté de trente ans à l'encontre de Sofien Ayari, qui a opposé son droit au silence aux questions sur un projet d'attentat à l'aéroport d'Amsterdam le 13 novembre 2015 dont il est accusé.
Au total, des peines allant de cinq ans d'emprisonnement à la perpétuité ont été requises contre les 20 accusés.
La cour s'est retirée dans un lieu tenu secret. Le verdict sera rendu mercredi en fin d'après-midi.