"Réflexions", un échafaudage en verre de 15 mètres de haut dans le jardin du Palais-Royal

8 tonnes de verre, 1 400 barres assemblées, 6 000 mètres de prismes mêlés les uns aux autres… Pendant deux mois, une œuvre monumentale trône au centre du jardin du Palais-Royal, à Paris. Une installation qui projette des reflets d’arcs-en-ciel aux alentours.

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"Les reflets, la transparence, toutes ces couleurs… C'est magnifique", réagit Jack, un touriste australien qui découvre l’œuvre en se baladant dans les allées du Jardin du Palais-Royal. Jusqu’au 15 novembre prochain, Réflexions, un échafaudage en verre haut de 15 mètres, est visible au cœur du square parisien.

Bleu, vert, jaune, violet, rouge… Installé sur une base métallique au centre du bassin du jardin, l’objet monumental scintille et reflète des couleurs autour de lui, sur le sol mais aussi parfois jusqu’aux murs des galeries. Le tout évolue selon la luminosité naturelle et, le soir, des éclairages sont prévus pour faire briller le verre.

Deux semaines ont été nécessaires pour assembler la structure sur place, les barres de verre étant reliées par des étoiles en inox. "J'ai vu le montage, c'était assez extraordinaire, raconte Yvette, qui habite dans le quartier. Ça semble très fragile, le travail a dû demander beaucoup de minutie. C’est fabuleux. J'ai vu un enfant de 10 ans qui criait 'Papa, viens voir, il y a un arc-en-ciel !'. Il parlait des reflets de lumières partout. Évidemment, quand il n'y a pas de soleil, c'est moins joli."

"C'est la première fois qu'on fabrique un objet en verre de cette taille-là"

"C’est le jeu de la diffraction, il y a toujours ce côté magique", explique Emmanuel Barrois, le maître verrier qui a imaginé Réflexions. "Je n'ai pas conçu cette œuvre pour qu'elle soit unique, mais de fait, elle l'est. C'est la première fois qu'on fabrique un objet en verre de cette taille-là. Normalement, le verre est utilisé pour faire du parement, en venant se greffer à d’autres éléments. Là, la structure, la charpente, c'est le verre", souligne-t-il.

La conception de l’œuvre a demandé 30 mois de travail d’ingénierie, et 12 000 heures de travail manuel au sein de l’Atelier Barrois, situé à Brioude en Auvergne. "Les gens qui regardent l'objet peuvent douter que c'est du verre. Dans l'imaginaire collectif, le verre est cassant, fragile. C'est vrai, mais il a une résistance mécanique très importante, et on peut bâtir avec. Mais il ne faut pas faire n'importe comment", détaille Emmanuel Barrois.

"On a travaillé avec l'un des plus gros bureaux d'ingénierie au monde. Il y a eu pratiquement 3 000 pages de calculs sur la résistance du verre à la torsion, à la flexion, à la compression... Il a même fallu créer des bancs d'essais. On a dû casser 400 barres de verre pour faire des mesures. Pour assembler et coller le verre, il a fallu avoir recours à des technologies très nouvelles, avec des tests en laboratoire et des prototypes en atelier", poursuit-il.

"Sans la technologie, sans les puissances de calcul, sans l'ingénierie d'aujourd'hui, on ne peut pas faire un tel objet. Mais sans le travail manuel, sans la précision et l'intelligence de la main, on ne peut pas le faire non plus", résume-t-il. Il précise qu’environ 10% du verre utilisé est issu de chutes réemployées.

Une œuvre vouée à voyager dans le monde, en changeant de géométrie

Mais quelle réflexion derrière Réflexions ? Au-delà de l’aspect contemplatif, Emmanuel Barrois, qui travaille le verre depuis 35 ans, explique avoir voulu "se questionner sur l’acte de bâtir".

"Est-ce que tout ça a du sens, au regard du monde dans lequel on vit et du futur qui est à reconstruire, notamment quand on pense aux problématiques environnementales ? Au final, je pense que oui. Les projets architecturaux doivent toujours mettre l'humain au centre. Sinon on perd le sens des réalités et on fabrique un monde qui nous envoie droit dans le mur", déclare le maître verrier.

Le projet étant "auto-financé en grosse partie", mais aussi "permis par des mécènes", Emmanuel Barrois estime le budget à "probablement autour d’un million d’euros". Après Paris, l’objet doit voyager à l’étranger, notamment en Italie et au Japon. L’échafaudage changera alors de géométrie, en prenant par exemple la forme d’un cube.

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