Dans une note interne, le préfet de police de Paris Laurent Nunez et le directeur de la police nationale Frédéric Veaux ont annoncé que les arrêts maladies injustifiés seraient refusés aux fonctionnaires de police. En région parisienne, ils sont nombreux à avoir fait la grève du zèle, suite à l'incarcération de leur collègue marseillais, accusé de violences policières.
Dans des notes séparées, le directeur de la police nationale (DGPN), Frédéric Veaux, et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont demandé à leurs services de refuser des arrêts maladies qui pourraient être injustifiés et de procéder à des retenues sur salaires.
La colère au sein de la police a éclaté après le placement en détention provisoire le 21 juillet d'un policier de la Bac de Marseille. Ce dernier, qui avait blessé grièvement au crâne un jeune homme de 22 ans, Hedi, en marge des émeutes début juillet, a été maintenu en détention jeudi la justice. Peu après l'incarcération du policier, certains fonctionnaires se sont mis en arrêt maladie. D'autres ont répondu à l'appel du syndicat Unité SGP Police et se sont mis en "code 562", un jargon policier qui signifie qu'ils n'assument plus que les missions d'urgence et essentielles.
La région parisienne particulièrement concernée
La préfecture de police de Paris (la capitale et la petite couronne) a été particulièrement impactée. Le mouvement de colère, parti de la base à Marseille, a pris de court la hiérarchie policière, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin ainsi que les syndicats de police.
Face au risque de propagation de cette colère, Frédéric Veaux a souhaité le 24 juillet la libération du policier incarcéré, estimant de manière générale qu'un agent de police, "avant un éventuel procès, n'a pas sa place en prison même s'il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail". Cette interview au Parisien du DGPN, qui avait reçu l'aval de Gérald Darmanin, a provoqué une levée de boucliers à gauche et au sein de la magistrature.
Quelques jours après, le ministre de l'Intérieur avait publiquement apporté son soutien aux policiers et dit "comprendre" leur "colère". Mais une semaine plus tard, il a décidé de frapper fort pour endiguer la multiplication des arrêts maladie, même si ceux-ci ont décru. Lundi dernier, ils avaient baissé de 5% sur l'ensemble du territoire, par rapport au pic de la semaine précédente, selon une source policière. Cette baisse a été de 13% dans la zone Sud et "jusqu'à 40%" dans celle de la préfecture de police de Paris, selon la même source.
Des retenues de salaire
Il a été rappelé aux policiers qu'ils ne disposaient pas du droit de grève et que toute "cessation concertée du service ou tout acte collectif d'indiscipline caractérisé peut être sanctionnée". Face à une avalanche d'arrêts maladie sur une courte période, il n'a pas été possible de faire procéder à des contrôles médicaux, a-t-on expliqué de source policière.
C'est pourquoi le ministère a décidé de recourir à cette procédure de refus de certains arrêts, assortie d'une retenue sur salaire pour "absence de service fait". Ce dispositif avait été utilisé en 2018 lors d'un mouvement similaire du personnel pénitentiaire, a rappelé une source policière.
Les policiers concernés par ces refus d'arrêt maladie disposeront de huit jours pour "établir la réalité du motif médical ayant justifié leur absence". Pour autant, a assuré une source policière, ces refus seront décidés avec "discernement". Pas question de sanctionner un fonctionnaire malade, a-t-on ajouté.
"La hiérarchie policière comprend la fatigue et l'émotion des policiers, particulièrement consciente de l'engagement exceptionnel qui leur a été demandé lors des récentes émeutes", ont fait valoir auprès de l'AFP des sources proches du DGPN et du Préfet de Police de Paris. "Pour autant, les policiers se doivent d'assurer la continuité des missions du service public de la sécurité", ont-elles justifié, oscillant entre compréhension et nécessité de durcir le ton.
"Nous prenons acte des lettres de l'administration relatives aux arrêts maladie. Elles sont analysées en interne par des spécialistes de notre organisation avant toute prise de position", a commenté auprès de l'AFP Eric Henry, délégué national d'Alliance, une des principaux syndicats de police.