Déjà largement fragilisés suite au premier confinement, au couvre-feu et avec la chute du tourisme, de nombreux taxis parisiens s’inquiètent pour leur avenir. Alors que la crise sanitaire et économique semble loin de toucher à sa fin, la profession voit son activité chuter.
Ce lundi matin, on pouvait observer une file de près de 150 voitures à la gare Montparnasse, dans le XIVe arrondissement de la capitale. Sur place, les taxis doivent aujourd’hui attendre deux heures en moyenne avant de pouvoir prendre en charge un client. "En temps normal, ils sont nombreux, se désole un chauffeur rencontré par France 3 Paris IDF. Parfois on n’attend même pas 10 minutes. Là, je suis là depuis 8 heures du matin. Je ne sais pas comment on va faire."
Sans clients, les taxis parisiens paient le prix fort avec le reconfinement. Avec 70 % de trains supprimés du côté de la SNCF, la baisse du trafic des grandes lignes ne présage rien de bon. Jean-Paul Djom-Tia, chauffeur de taxi indépendant, explique avoir déjà perdu 80 % de son activité : "Les hôtels sont fermés, les aéroports, les trains… L’événementiel, les salons. On n’a rien."
Nordine Dahmane, chauffeur de taxi depuis 26 ans, dit n’avoir "jamais vu ça" : "Je n’ai jamais fait face à une telle crise. Même quand il y avait la concurrence sauvage des VTC, et que ce n’était pas encore régulé, on avait une bataille à mener sur le terrain, avec des clients à reconquérir. Aujourd’hui, il n’y a même plus de clients à reconquérir."Notre activité est directement liée au monde du tourisme, au tourisme d’affaires… Aujourd’hui, c’est vide quand vous allez dans Paris, il n’y a pratiquement plus personne qui se déplace en taxi.
Par ailleurs secrétaire général du syndicat FO Taxis Parisiens, Nordine Dahmane reste actuellement confiné, en raison d’une santé fragile. "Beaucoup de collègues sont dans une situation catastrophique, affirme-t-il. La baisse des revenus est parfois proche des 100%. Hier, des collègues m’ont raconté être rentré de leur journée avec 10 euros. Notre activité est directement liée au monde du tourisme, au tourisme d’affaires… Aujourd’hui, c’est vide quand vous allez dans Paris, il n’y a pratiquement plus personne qui se déplace en taxi."
"Un avenir sombre nous attend"
Cette chute de l’activité a des conséquences professionnelles mais aussi personnelles, souligne Nordine Dahmane : "Pour les crédits, les banques ont parfois aidé au début, avec des reports, mais tout finit par retomber sur nos têtes. La situation est dramatique. Il n’y a pas que les charges professionnelles à payer, il y a aussi les charges personnelles : les achats quotidiens, les loyers, les crédits pour la maison… Avec cette saloperie de virus, c’est difficile de tenir au fil des mois."Pour beaucoup de professionnels, l’aide de 1500 euros proposée par le gouvernement ne suffira pas. "On ne peut pas demander plus que les autres mais au moins qu’on fasse attention à notre profession, à nos besoins et à nos difficultés, affirme le secrétaire général de FO Taxis Parisiens. Il faut mieux accompagner les petites entreprises. La clientèle ne reviendra pas comme ça. De nombreuses petites entreprises très fragiles risquent de s’éteindre, tout ça va entraîner des dégâts et des drames."Parmi les nombreux motifs d’inquiétude, le chauffeur pointe du doigt la forte baisse du trafic aérien, alors que le groupe Aéroports de Paris a indiqué que son niveau d’activité ne devrait pas retourner à la normale avant plusieurs années. "Pendant ce temps, qu’est-ce qu’on va faire ?, s’interroge Nordine Dahmane. L’aéroport de Roissy, à lui seul, faisait travailler pas mal de gens, et ça ne touche pas que les taxis mais bien d’autres secteurs. Un avenir sombre nous attend. Ça va aussi être difficile de faire ressortir de chez elle la clientèle d’affaires, qui a gouté au télétravail, pour prendre le taxi."On ne peut pas se projeter dans l’avenir. On navigue à vue.
Le chauffeur souligne la détresse qui risque toucher la profession encore de nombreuses années : "On ne peut pas se projeter dans l’avenir. On navigue à vue... J’espère que la pandémie se terminera le plus vite possible." Si les centrales de réservation tentent certes d’aider les professionnels, de nombreux chauffeurs - parmi les 17 000 taxis parisiens - sont aujourd’hui menacés.