Un chirurgien de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) a cherché à vendre sur un site d’enchères la radio d’une victime des attentats du 13-Novembre, selon Mediapart. Martin Hirsch dénonce un "comportement odieux".
Alors que le procès des attentats du 13 novembre 2015 se poursuit sur l’île de la Cité, Emmanuel Masmejean, un chirurgien de l’AP-HP, a tenté de vendre pour l’équivalent de 2450 euros un "NFT" de la radio d'une survivante du Bataclan. Un cliché sur lequel apparaît une balle de Kalachnikov, d’après Mediapart.
Selon le site d’investigation, le chirurgien a tenté de vendre l’image sur OpenSea, une plateforme spécialisée dans les NFT. Les "Non-Fungible Tokens" (pour "Jetons Non Fongibles", c’est-à-dire qu’ils sont uniques et ne peuvent pas être échangés contre des équivalents) sont des certificats d'authenticité qui reposent sur des biens virtuels ou réels, et dont la propriété est traçable. Utilisés par des collectionneurs ou des spéculateurs sur le marché de l’art par exemple, les NFT sont des actifs numériques qui utilisent la "blockchain" : une technologie décentralisée sur laquelle reposent les crypto-monnaies, comme le Bitcoin. Les ventes peuvent atteindre plusieurs millions de dollars.
Toujours selon Mediapart, Emmanuel Masmejean raconte être le "créateur" de la radio dans la description publiée sur la plateforme de vente et d’achat de NFT. Il dit ainsi avoir opéré la patiente, "qui a perdu son petit ami dans cette attaque" et qui "avait une fracture ouverte de l’avant-bras gauche avec une balle restante de Kalachnikov dans les tissus mous". Auprès de Mediapart, le chirurgien tente de se justifier en prétextant "une vocation pédagogique, pour intéresser les gens", et souligne ne pas avoir vendu l’image.
Contacté, Emmanuel Masmejean met en avant des arguments similaires, et affirme ne pas avoir cherché à faire de profit. Il explique ne plus vouloir répondre à des questions sur le sujet.
Un "acte odieux et révoltant " selon l’association de victimes 13onze15
Egalement contactée, l’association de victimes 13onze15 "condamne fermement tout acte qui porte atteinte à la mémoire des victimes des attentats du 13 novembre 2015". "Il s’agit là d’un acte odieux et révoltant mais que nous savons isolé et non représentatif du travail réalisé par les professionnels de santé de l’AP-HP en qui nous avons toute confiance", réagit l’association.
Du côté de l’AP-HP, Martin Hirsch a partagé sur Twitter un message envoyé à l’ensemble des personnels. Le directeur général y dénonce un "acte scandaleux" d’une "gravité exceptionnelle", et décrit sa "plus vive indignation". "Ce chirurgien a mis en vente sur un site internet un cliché radiologique d’une patiente, victime des attentats du 13 novembre 2015. Cet acte est contraire à la déontologie, met en cause le secret médical, va à l’encontre des valeurs de l’AP-HP et du service public", dénonce Martin Hirsch.
"Un tel comportement est indigne et heurte notre conception du service public, ajoute le directeur général de l’AP-HP. Il serait scandaleux dans toute circonstances, et pour tout patient. Il prend une résonance d’autant plus abjecte dans le contexte du procès en cours et de ce qu’ont enduré les victimes de ces attentats. Un tel comportement odieux ne saurait salir une communauté hospitalière qui ne peut que se désolidariser de cet acte, le condamner avec la plus extrême fermeté et nous actionnerons toutes les voies de droit permettant d’en tirer les conséquences."
Martin Hirsch annonce ainsi "saisir le conseil de l’ordre, signaler à la justice en application de l’article 40 du code pénal' et "saisir les ministres qui disposent du pouvoir disciplinaire".