Elizabeth Borne, la Première Ministre a présenté la réforme des retraites ce mardi 10 janvier. Quel est ce régime spécial de la RATP que l'exécutif souhaite supprimer ? Pour la CGT, "ce n'est pas un privilège".
"Contrairement à ce que l'on entend, les agents de la RATP ne sont pas des privilégiés puisque nous avons des spécificités et une pénibilité de nos métiers qu’il faut compenser par un départ anticipé", déclare Cemil Kaygisiz, conducteur de bus et secrétaire général de la CGT RATP.
Tous les salariés ne sont pas concernés
A la RATP, le régime spécial de retraite concerne tous les salariés recrutés au statut. Ils sont environ 40 000, contre 5 500 en CDI de droit privé. En revanche, seules certaines catégories de personnels bénéficient de mesures spécifiques permettant un départ en retraite anticipé.
"20 000 personnes sont concernées", confirme Cemil Kaygisiz. "Les personnels de la RATP couverts par ce régime spécial et qui peuvent bénéficier d'un départ anticipé à la retraite sont les agents d'exploitation. Ils représentent environ 20 000 personnes sur les 45 000 présents dans l’entreprise. On compte 16 000 conducteurs de bus, auquel il faut ajouter les 3 000 conducteurs de métro, de RER et une partie du personnel qui travaillent en horaires de nuit", détaille-t-il.
Avoir au moins 27 ans de service et atteindre 52 ans
"Pour compenser la pénibilité, nous bénéficions d’un départ anticipé en réunissant deux conditions : 27 ans d’ancienneté et 52 ans d’âge", explique le conducteur de bus. Les personnels de la RATP couverts par le régime spécial et qui peuvent bénéficier d'un départ anticipé à la retraite, sont autorisés à ouvrir des droits dix ans avant les salariés du régime général, soit aujourd'hui 52 ans.
Des conditions de départ liés à la pénibilité
"Mais ce qu'il faut savoir c'est que les agents qui bénéficient d’un départ anticipé partent avec une retraite qui n’est pas complète parce qu’ils n’ont pas toute la durée de cotisation", dit Cemil Kaygisiz. "Et en réalité, très peu d'agents font valoir leurs droits à 52 ans en raison d'une décote trop importante", ajoute-t-il.
"En fin de carrière", raconte Cemil Kaygisiz, "On est usé par le métier : on travaille en horaires décalés, on peut ainsi se retrouver à travailler très tôt le matin pendant une semaine et la semaine suivante, basculer en travail de nuit. Vous avez aussi des services mixtes, c'est-à-dire que vous faites les horaires de pointe du matin et ensuite vous revenez le soir pour assurer les horaires de pointe de fin de journée", poursuit-il.
"Vous travaillez le week-end, les jours fériés, le service de la RATP doit être assuré pendant 365 jours de l’année puisque nous sommes un service public", précise-t-il.
Le conducteur de bus déroule les contraintes liées à son métier : les horaires décalés, le stress de la circulation, le mécontentement des usagers mais aussi les douleurs physiques "A force de faire toujours les mêmes mouvements, on a beaucoup de collègues qui ont des pathologies, des troubles musculosquelettiques, un collègue sur cinq finit en inaptitude, c'est beaucoup", constate-t-il.
"Travailler pendant plus de 30 ans dans ces conditions a un impact sur la santé, notre système de retraite n’est absolument pas un privilège, mais la compensation d’une pénibilité que l’on ne peut pas enlever", résume Cemil Kaygisiz.
Une retraite calculée sur la toute fin de carrière
A la RATP, le montant de la pension de retraite est calculé comme celui des fonctionnaires en prenant en compte les six derniers mois de salaire, contre les 25 meilleures années dans le privé. A taux plein, elle représente 75% de ces six derniers salaires.
Dans les semaines qui viennent, la fin programmée de régimes spéciaux sera assurément un point de tension de la réforme des retraites. La suppression annoncée du régime spécial à la RATP suscite d'autant plus de résistance qu'elle arrive dans un contexte de fin annoncée du monopole sur les transports collectifs de l'entreprise. Dès 2025 pour les bus, 2029 pour les trams et 2039 pour le RER et le métro.