Une piscine olympique qui doit servir de bassin d'entraînement pour les athlètes des JO 2024 doit empiéter sur une partie de ces jardins ouvriers cultivés par des habitants. Plusieurs centaines de manifestants ont défilé dans la commune ce samedi pour protester contre ce projet.
Le projet de piscine olympique d'Aubervilliers crispe bien au-delà des seuls jardiniers qui cultivent ces lopins de terre. Plusieurs centaines de personnes manifestaient ce samedi 17 avril contre le projet dont les travaux sont imminents.
Au cœur de la contestation, un complexe de natation comprenant trois bassins (dont un de 50 mètres) avec salles de sport, saunas, hammams et un solarium.
"Nous ne sommes pas contre le fait qu'il y ait un équipement qui s'installe à Aubervilliers, à savoir une piscine d'entraînement olympique de 50 mètres. Nous sommes contre le fait que cette piscine d'entraînement olympique soit conçue avec un budget spécifique qui oblige à avoir un solarium, c’est-à-dire une terrasse pour bronzer qui empiète sur des jardins ouvriers centenaires", explique Viviane Gribeau-Genest, jardinière et trésorière de l'association qui gère les jardins.
1 hectare de jardins menacé
Le projet, maintes fois remisé au placard, a suivi les échecs des différentes candidatures de Paris aux Jeux Olympiques. En 2016, lorsque la commune voisine de Saint-Denis fut choisie pour accueillir les épreuves de natation, les défenseurs du projet déchantaient à nouveau.
"Le Comité d’organisation des JO 2024 fit toutefois une fleur à Aubervilliers : en 2018, il lui promettait un bassin d’entraînement où s’échaufferaient les athlètes. Pas une piscine olympique, donc, mais un centre nautique tout de même, bâti autour d’un bassin de 50 mètres", explique ainsi la Métropole du Grand Paris.
Une fleur dont se seraient bien passées les associations qui dénoncent un projet non-adapté au territoire. "Il n'est pas normal qu'un évènement éphémère, les JO, suppriment des jardins centenaires. C'est un patrimoine agricole et cela nuit à l'environnement. On est dans une période d'urgence climatique, le réchauffement climatique est là à Aubervilliers avec des canicules à répétition", poursuit Viviane Gribeau-Genest.
Selon le Collectif de défense des jardins ouvriers d’Aubervilliers, 1 hectare de jardins sur les 7 cultivés sont menacés (4000 m² par le solarium et 6 000 autres pour la construction d'une gare du Grand Paris Express). Le collectif a lancé une pétition qui a réuni plus de 60 000 signatures et près de 4 000 euros ont été collectés pour organiser la lutte.
"Trop tard" pour changer le projet
"Dans ce projet on a le maintien de ce patrimoine notamment des sept hectares de jardins, c'est un engagement de longue date", se défend Camille Vienne-Thery, directrice de projet à Grand Paris Aménagement, détenteur du terrain. Elle argue par ailleurs que les jardiniers délogés seront d'abord accueillis dans ces jardins voisins puis disposeront d'un autre site sur "un terrain de foot qui est en friche".
Du côté de la mairie, on répond qu'il est "trop tard". La maire (UDI) Karine Franclet estime que casser le marché public signifierait "4,7 millions d'euros" de pénalités. Le modifier le signifierait aussi du retard, "et là on est déjà très juste dans les délais", souligne-t-elle.
Celle qui dit avoir hérité d'un "dossier compliqué" initié par sa prédécesseure communiste loue toutefois un équipement "essentiel" pour "faire partie de l'aventure" olympique et à visée pédagogique, dans un département où un enfant sur deux ne sait pas nager à son entrée en sixième.
"Nous avons un architecte qui a fait une simulation que toute piscine olympique entre sur un parking déjà artificialisé, celui du Fort d'Aubervilliers. Avec un peu de volonté politique, on peut mettre cette terrasse, si elle est jugée indispensable à l'équipement, sur le toit. Cela se fait d'ailleurs à Issy-les-Moulineaux", rétorque Mme Gribeau-Genest.
Pour bâtir le centre aquatique - 33,6 millions d'euros - la Ville, maître d'ouvrage, bénéficiera de subventions de la part de l'État et du département de Seine-Saint-Denis, et d'environ 10 millions d'euros de la Solideo, la société de livraison des ouvrages olympiques.