Le commanditaire de l'agression de l'adjointe au maire de Saint-Denis, Oriane Filhol, a été condamné en son absence à trois ans de prison ferme. Les trois agresseurs ont également été condamnés.
Le tribunal correctionnel de Bobigny a condamné jeudi à cinq ans de prison, dont deux avec sursis, un chef d'entreprise pour avoir commandité pour une raison inconnue l'agression en décembre dernier d'une adjointe au maire de Saint-Denis.
Le jugement est allé au-delà des réquisitions du parquet qui avait demandé quatre ans de prison, dont un avec sursis.
"Serial" entrepreneur de cette ville de Seine-Saint-Denis, engagé dans le monde associatif, Mouloud Bezzouh, 57 ans, a été reconnu coupable d'avoir envoyé des jeunes, contre la promesse de rémunération, passer à tabac Oriane Filhol alors qu'elle rentrait chez elle.
Passage à tabac dans un hall d'immeuble
Le 20 décembre 2023 au soir, Oriane Filhol, sixième adjointe au maire en charge des solidarités, est suivie dans la rue à Saint-Denis par deux hommes alors qu'elle sort du conseil d'administration du bailleur social de la ville et rentre à son domicile. Rattrapée alors qu'elle tente de s'enfuir, la trentenaire est passée à tabac dans le hall d'un immeuble où elle s'est réfugiée. L'agression provoque un tollé.
Un mois plus tard, en janvier, trois jeunes hommes de Saint-Denis, âgés de 18 à 22 ans, sont arrêtés et condamnés. À leur procès, ils ont expliqué s'être vu promettre 2.500 euros chacun par un mystérieux commanditaire, dont ils ont tu le nom, pour frapper une personne qu'ils ne connaissaient pas.
Un mandat de dépôt émis
Arrêté début mars par les policiers de la Sûreté territoriale puis placé sous contrôle judiciaire, Mouloud Bezzouh n'était pas venu à l'audience du 11 juin, et n'était pas présent également à l'annonce du délibéré. La justice a émis un mandat de dépôt à son encontre.
J'ai perdu une partie de ma liberté
Oriane Filhol, maire ajointe en charge des Solidarités
Légèrement blessée mais fortement marquée psychologiquement, la jeune femme, aux grandes lunettes rondes et coupe au carré, est restée sans réponses à ses interrogations sur les raisons de son agression. "J'ai perdu une partie de ma liberté, de mon indépendance, auxquelles je tiens beaucoup. Je ne peux plus me déplacer après une certaine heure seule, j'ai besoin que des collègues me raccompagnent jusqu'à mon domicile", a-t-elle confié au tribunal à l'audience.
Ce jugement "marque un moment important sur la question de l'agression des élus locaux en France, c'est vraiment un soulagement", a déclaré à l'AFP Katy Bontinck, première adjointe au maire PS Mathieu Hanotin, à la sortie de l'audience.
"Cette réponse ferme vient marquer cette nécessité d'ouvrir les yeux sur le fait que demain la démocratie représentative n'aura plus de représentants, notamment à l'échelon local", a-t-elle estimé.